Avant de te voir

Chapitre 47 : Chris.

« Être profondément aimé par quelqu'un te donne la force, tandis qu'aimer quelqu'un profondément te donne du courage. » - Lao Tseu

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Le noir, les ténèbres, le néant.

Voilà ce dans quoi j'avais l'impression d'être plongé en ce moment même. Je ne voyais plus mon Ange, et ne plus la voir se résumait, selon moi à ne plus pouvoir être là pour elle. Ne plus l'aider. L'abandonner. Je détestais cela, plus que tout. Davantage encore que la dernière fois. Parce que tout était différent, avant.

Quand j'avais rencontré Emmy, je n'étais pas à ce point éperdu d'elle. Je ne l'aimais pas aussi fort qu'aujourd'hui et par dessus tout, je n'avais jamais posé les yeux sur elle. Je n'avais jamais vu ses jolis cheveux de feu, son sourire éblouissant quand elle rit ou qu'elle me sourit. J'aimais regarder ses yeux pétiller de joie lorsqu'on était ensemble, de désir lorsque je la caressais, et d'amour depuis peu. Cet amour pour moi qu'elle avait mis si longtemps à accepter et à admettre, j'avais pu le voir. Mais seulement l'espace d'une journée. Jusqu'à ce que je ferme les yeux. Et je détestais ça.

Je m'étais réveillé seul ce matin. J'avais pris l'habitude de sentir la présence d'Emmy avant même de la voir, et là, ce n'était pas le cas. Je passai tout de même ma main sur le drap à côté de moi, déjà devenu froid. Depuis combien de temps elle était levée ? Je ne pouvais même pas savoir l'heure qu'il était puisque j'avais abandonné ma montre depuis l'instant où j'avais recouvré la vue. Ce qui n'était plus le cas maintenant.

Je tentai donc d'écouter les bruits environnants, mais c'était le silence dans la chambre. Par contre, je percevais une musique de fond dans l'appartement, ce qui me rassura inconsciemment : elle était toujours là. Elle n'avait pas disparu. Ce qui était évident, dans un sens. Elle n'avait aucune raison de s'en aller, mais je n'y pouvais rien, c'était instinctif.

J'entendais la musique rythmée qui venait certainement de la cuisine. J'imaginai donc parfaitement mon Ange, en train de préparer un petit déjeuner - ou un déjeuner, tout dépendait de l'heure qu'il était - en bougeant sur le son entrainant qu'elle écoutait, comme elle en avait l'habitude. Même si elle avait perdu cette habituelle bonne humeur ces derniers jours, j'avais l'impression qu'elle tentait de remonter la pente aujourd'hui. Peut-être parce que c'était mon tour d'être un peu démoralisé... Mais de son côté, allait-elle vraiment mieux ou faisait-elle semblant pour moi ? J'allais en avoir la réponse puisque j'entendis la porte de la chambre s'ouvrir lentement.

Je restai allongé dans mon lit, sur le ventre et l'écoutai entrer dans la pièce. Elle s'immobilisa quelques secondes puis je sentis le matelas s'affaisser sous son poids. Elle s'approcha doucement de moi et alors que je pensais qu'elle allait me réveiller en douceur, elle se laissa tomber brutalement sur moi, me faisant grogner de mécontentement.

- Emmy...

- Bonjour, chantonna-t-elle doucement en s'allongeant littéralement sur moi.

Je ne pus m'empêcher de sourire au son de sa voix.

- T'as pas plus brutal comme réveil ? plaisantai-je.

- Non. J'ai réfléchis mais je n'ai pas trouvé, figure-toi, rétorqua-t-elle sérieusement en m'embrassant sur la joue.

- J'ai de la chance alors ! marmonnai-je.

Elle reposa sa tête sur la mienne et ses doigts glissèrent lentement le long de mon bras jusqu'à ma main. J'attrapai la sienne et entrelaçai nos doigts.

- J'en déduis que tu m'en veux ? demanda-t-elle timidement.

- Beaucoup.

- C'est dommage...