Sébastien

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Nous nous sommes assoupis après notre petit moment d'amour. Je me lève et vais me rafraichir. À mon retour dans la chambre, Jennifer est déjà réveillée. Elle est assise sur le lit, les cheveux en bataille, la couverture remontée jusqu'au cou et la tête entre les jambes. Lorsqu'elle sent ma présence, elle lève la tête me dévisage en souriant telle une gamine à qui on offre une maison de poupée. Sûrement aime t-elle la vue de mon corps presque nu ou de mes cheveux encore humides. Je lui souris en retour et le rouge lui monte aux joues. Elle ne dit rien mais ne me lâche toujours pas du regard.

L'une des portes adjacentes de ma chambre est celle de mon dressing. Je m'y engouffre, et me rend compte à contre cœur qu'il est presque aussi grand que l'appartement de la rousse actuellement dans mon lit. Je descends les quelques marches qui me séparent de  mes vêtements. Je choisis un jeans bleu et une chemise blanche puis, remonte dans ma chambre.

"Et si on l'annonçait à ta mère ?"  elle me regarde l'air de ne pas comprendre. Je décide donc de répondre à sa question muette.

"Que son opération sera entièrement prise en charge par ton adorable patron"  elle n'a pas l'air d'accord, je dirais même qu'elle est réticente mais, elle finit par céder. Ce qui me fait sourire. C'est ma seconde victoire face à elle aujourd'hui.

Après avoir enfilé  mon pantalon, je m'attaque à ma chemise quand Jennifer pousse un cri de surprise à peine étouffé.

"Un tat...un tatouage?"

Ce n'est que ça! Le kanji que je me suis fait  tatouer à la face interne du bras droit. Je suis étonné qu'elle l'ai aperçu puisqu'il n'est pas très voyant.

"Et oui darling !" dis-je en souriant. Sa réaction était vraiment très drôle. On aurait dit qu'elle a vu un fantôme.

"Et qu'est-ce que c'est ?" demande t-elle curieuse, essayant de reprendre ses esprits. Ce qui n'arrête pas pour autant de m'amuser.

"C'est juste un symbole japonais" je m'approche pour qu'elle le voit de plus près. Elle passe ses doigts dessus, et me caresse le bras par la même occasion.

"Oh! Et qu'est-ce qu'il signifie ?"

"Ça dépend : pour Mariella, ça symbolise ma défaite; pour les japonais ça veut tout simplement dire  Amour ; et pour moi, c'est le moyen que j'ai trouvé pour demander pardon à ma mère de ne pas lui avoir dit assez souvent combien je l'aime"

Après ça, elle m'embrasse tendrement, comme pour me montrer qu'elle est là pour moi. Brusquement, elle s'arrête  et me fusille du regard. Je ne comprends pas ce qui se passe encore dans sa tête.

"M-Mariella? La Mariella?" et comme si elle n'attendait qu'une approbation de ma part, elle se lève et s'en va dans la salle de bain marmonnant qu'elle serait prête à y aller dans peu de temps. Ma réponse n'a pas eut l'air de beaucoup lui plaire.

Oui Mariella. Celle de qui j'étais éperdument amoureux au lycée. À la mort de ma mère, je broyais littéralement du noir. Je trouvais que c'était trop tôt, je n'avais pas assez profité de la vie avec elle. Je n'avais pas assez profité d'elle tout simplement. Elle avait beau être sévère avec moi de temps en temps, mais elle savait aussi se montrer tendre et aimante exactement comme seule une mère en a le secret. C'était ma mère. Je l'aimais mais, ma fierté m'a empêché de le lui dire souvent. Lorsqu'avec mon père on avait appris aux infos qu'il y avait eu une explosion à la banque où elle s'était rendue quelques minutes plus tôt et qu'il n'y avait aucun survivant, je me suis terré dans le silence. Mon père lui, gardait espoir alors que moi je m'étais rendu à l'évidence. J'avais à peine dix-huit ans et je venais de perdre ma mère. La femme qui m'a mis au monde. La femme que j'ai aimé comme je n'aimerais jamais personne. La femme que je continue d'aimer d'ailleurs.

Mariella a su se montrer d'un énorme soutient à sa façon, même si je continuais à faire ami-ami avec le silence. Elle nous avait organisé un voyage en amoureux à Las Vegas durant lequel le maitre mot était: «profiter». Mais profiter de quoi alors que je venais  perdre un être cher? Je n'en avais aucune envie et comme pour me booster, elle m'a conduit dans un Cassino disant que la personne qui gagnerait le plus d'argent ferait à l'autre ce qu'elle voulait. J'ai perdu.Voilà comment je me retrouve avec un tatouage sur le bras. Et voilà comment elle a réussi peu à peu avec ses idées folles à me faire sortir de ma dépression.

Dans la voiture en route pour l'hôpital, je trouve Jennifer étrangement calme, trop calme à mon goût. Je ne sais pas ce qui lui arrive, elle ne veut rien me dire si ce n'est que tout va bien. Elle souffle un bon coup une fois que je me suis garé dans le parking de l'hôpital. J'en déduis donc qu'elle n'est pas prête à voir sa mère. Mais pourquoi ? A t-elle peur? Oui? Non? Autant de questions se bousculent dans ma tête. Nous rendons une petite visite aux enfants, surtout parce que je savais qu'ils étaient impatients de la revoir. Je me suis dit que ça lui plairait à elle aussi et, je ne me suis pas trompé.

Après deux longues heures à rires au éclats,à jouer avec notre bande de petits copains, elle entreprend de leur lire une petite histoire pour les endormir à l'heure de la sieste.

À ma grande surprise, elle me prend par le bras et m'attire dans la chambre de sa génitrice. Celle-ci regarde par la fenêtre le soleil de fin d'été, assise sur son lit.

Je remarque tout de suite que cette femme maigre, pâle aux cheveux ternis n'a rien à voir de près ni de le loin avec ma Jennifer. Cependant, sa beauté est visible malgré la maladie et l'âge avancé. Je me mets un peu en retrait pour les laisser parler. J'ai pensé que la jeune femme voudrait elle-même annoncer la nouvelle à sa mère. Au bout de ce qui me semble une éternité, elles me font signe d'approcher. La mère, Elena de son prénom, me remercie chaleureusement en prenant mes grandes mains dans les siennes plus petites.

La fatigue a pris le dessus sur elle. Elle dort comme un bébé. Signe évident qu'il est l'heure pour nous de nous en aller.

"Jennifer ?" demande t-elle d'une voix légèrement rauque. Son sommeil aura été le plus court que l'histoire n'ait jamais connu. Jennifer que je tiens fermement par la taille se retourne pour faire face à sa mère qui la regarde avec étonnement.

"Mais...O-Où est ton père ?"

elle semble gênée et s'approche de sa mère pour lui répondre de sorte de que je n'entende pas. C'est raté !

"Parti. Tu sais bien qu'il nous a laissé"

C'est à ne rien y comprendre. Elena aurait oublié le départ de son mari? Comment peut-on abandonné sa famille?

"Jack? Approche mon enfant." dit-elle en me regardant. A t-elle déjà oublié comment je m'appelle? Et ce prénom, j'ai déjà entendu Jennifer le prononcer dans un de ses cauchemars. Après une brève conversation entre les deux femmes où la rousse explique à sa mère que je ne suis pas le fameux Jack, nous sortons de la pièce.

Nous n'avons pas mangé depuis des heures. Je décide d'y remédier en  nous conduisant jusqu'à un petit restaurant chic. Cependant, je ne peux m'empêcher de repenser à la confusion faite par Elena.

"Qui est Jack?"

"Personne"

Voilà qui est une réponse trop rapide, trop agressive et pas assez claire pour être vraie.

Like A Star: quand le passé se conjugue au présentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant