Partie 2 - Chapitre 9

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Citadelle d'Avril

Bois de la source

Nolan se concentre. Que peut-il bien faire  ? Il n'en a aucune idée. Il plonge les doigts dans le courant et sent le liquide froid les rendre petit à petit insensibles. Il doit trouver un moyen de suivre la rivière jusqu'à la sortie du dôme.

À une cinquantaine de mètres de là, le cours d'eau disparaît bruyamment dans un immense mur de granit, comme aspiré par la pierre. Si le fleuve entre ici, il doit bien sortir quelque part. Il faut donc que lui, Silvi et Mara plongent dans la rivière et retiennent suffisamment longtemps leurs respirations pour s'échapper de la cité. Reste à savoir combien de temps ils doivent nager en apnée.

Il peut sans doute les aider à réussir cet exploit en manipulant le canevas. Mais si jamais il tente ne serait-ce que de tisser un nœud de la Toile, les Artistes les repéreront aussitôt. Il doit faire attention.

Nolan expire doucement. Il essaie de se concentrer, mais quelque chose le dérange. Quelque chose s'attarde dans son champ de vision et le perturbe. Il ne l'avait pas remarqué auparavant, c'est comme si cette anomalie venait de faire son apparition. Elle est là, juste à côté, sur l'autre rive du fleuve.

—  C'est quoi ce truc  ? souffle-t-il en direction de ses camarades.

Silvi aussi a senti l'intrus. Mara porte la main à la garde de son épée. Elle ne voit rien, il fait beaucoup trop noir, toute la rivière est plongée dans l'obscurité.

—  Vous entendez comme moi ou pas  ? s'inquiète-t-elle auprès des deux apprentis.

—  Entendre quoi  ?

—  Et bien... rien justement. Les animaux ne font plus de bruit, comme s'ils avaient disparu.

—  Il fait nuit, ils dorment, non  ?

—  Pas tous... Et les cigales  ? J'en entends plus une seule.

Nolan tend l'oreille. Le silence est surprenant. Même le cours d'eau semble ralentir sa course pour faire moins de clapotis. Les branches des arbres ne se balancent plus, comme si la nature était bâillonnée. Quelque chose se serre dans sa poitrine, cette atmosphère, il la connaît bien.

—  Oh non...

Silvi étouffe un cri. Elle se met à trembler comme une feuille, essaie de reculer mais trébuche.

Nolan retire doucement les mains du courant et rejoint ses amies. Il n'arrive pas à décrocher son regard de l'autre rive, même s'il ne perçoit rien, car un manteau noir s'est jeté sur toute la berge, l'emprisonnant et l'empêchant de respirer.

—  Faites aussi peu de bruits que possible. Ne bougez pas... Il ne nous a peut-être pas encore vus.

—  Mais qui ça  ? lui demande Mara dans un souffle.

—  Le kauroc.

Le jeune homme a à peine eu le temps de terminer sa phrase qu'un râle macabre retentit. Terrorisée, Silvi se lève d'un bond et commence à remonter la pente en trébuchant. Nolan n'a pas pu la retenir.

Aussitôt, une lourde masse s'écrase à quelques pas. La bête est là, énorme, monstrueuse. Une folie meurtrière se lit dans ses yeux, c'est la seule chose qu'il est possible de distinguer dans les ténèbres.

Sans hésiter, l'ombre se met en chasse et poursuit Silvi qui vient de s'écrouler encore une fois. Elle n'a pas le temps de se relever que le monstre est déjà sur elle, se délectant du futur massacre.

Artistes et PhalangesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant