Partie 3 - chapitre 13

12 0 0
                                    

Chaîne de Coton

Territoire des Marches

Val des Arts, Abords de la Gronde

Mara est toujours sans connaissance. Silvi et Nolan l'ont traînée tant bien que mal sur la berge en glissant sur les galets luisants de la rivière. Par chance, le cours d'eau forme un coude à quelques mètres et une petite plage, qui remonte en pente douce, s'est nichée dans le virage.

C'est inespéré, car le paysage est accidenté au-delà : l'immense falaise qui borde cette partie du cratère se dresse dans les eaux et écorche la rive d'énormes blocs de roches crayeuses. Les collines ne s'adoucissent que bien plus loin, en direction du centre du cratère, là où quelques buissons rachitiques lancent leurs épines brisées vers le ciel. S'y rendre sera compliqué, les chemins qui y mènent seront probablement impraticables tant qu'il faudra compter parmi eux une personne évanouie. Ils doivent s'abriter dans les parages en attendant que Mara retrouve ses esprits.

La pluie tombe dru, épaisse et chaude, et les nuages lourds couvrent le ciel d'une chape de plomb. Nolan trouve sans peine une brèche entre deux rochers. La cavité creusée est peu profonde, mais suffisamment protégée pour permettre à trois personnes de se mettre au sec.

Ils sont peut-être complètement trempés par leur péripétie aquatique, mais ce n'est pas une raison pour rester plus longtemps sous le déluge. Le jeune homme porte Mara et l'allonge sur le sable, au fond de l'abri de pierre. Il vérifie une dernière fois qu'elle respire et rejoint Silvi qui récolte des morceaux de mousse humides accrochées aux parois, ainsi que des éclats de bois drainés par le fleuve jusqu'à l'entrée de la brèche.

Allumer un feu est une bonne idée, cela leur donnera un peu plus de lumière et les réchauffera. Malheureusement, le combustible est imbibé d'eau. Les deux jeunes gens sont obligés de se concentrer pour assécher les branches au maximum. Dans leur état peu reluisant, l'opération est épuisante. Nolan est même contraint de fermer les yeux pour ne pas perdre le fil, alors que ce genre d'art ne lui demande normalement aucun effort. Après avoir évaporé le plus de liquide possible, Silvi touche doucement le petit monticule en différents endroits, laissant à chaque point de contact une étincelle qui scintille et brille d'un éclat orangé de plus en plus vif. Au bout de quelques secondes, les flammes semblent courir d'elles-mêmes le long des brindilles et viennent se loger dans les mottes de mousse asséchées.

Les deux amis étendent les mains au-dessus du foyer et soupirent de soulagement. Nolan a pensé un temps user de cette technique pour sécher ses vêtements, mais il sent que cela lui demanderait trop d'énergie. Tant pis, ils utiliseront les vieilles méthodes : un peu de patience et un honorable feu de bois.

Silvi se retourne vers la forme allongée de Mara. Elle est recroquevillée sur le côté, face au mur et dos au feu. La lune rousse écorchée luit toujours entre ses omoplates, comme la fidèle gardienne du sommeil de la jeune fille. Elle est clairement visible dans la pénombre de la grotte. Si le tatouage est magnifique avec ses formes et ses détails finement dessinés, la lune déchiquetée et ses morceaux éparpillés sur l'épaule gauche de Mara semblent irréels. Silvi s'accroupit à ses côtés. Elle trouve la marque envoûtante, belle et complexe, mais un malaise indéfinissable lui comprime la poitrine lorsqu'elle la regarde.

Quelque chose brille au bras de Mara, juste au bout de la manche qui couvre son bras droit. Silvi relève doucement le tissu et découvre un bijou d'argent, un large bracelet avec un insert d'ivoire : c'est un dragon de couleur crème qui s'étale et pourchasse avec souplesse sa propre queue. Il l'a tient entre ses crocs après avoir fait un tour complet du bijou argenté.

Artistes et PhalangesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant