Artistes et Phalanges

Partie 4 - Chapitre 6

Chaîne de Coton

Cache de Premiers

La caverne résonne de pas, les Artistes mettent en place le campement. Kamir a repris la direction de son unité et vocifère en direction de ses soldats pour qu'ils accélèrent le mouvement. Des torches sont allumées un peu partout afin d'apporter de la lumière. Une centaine de guerriers a rejoint les fuyards, les voilà encadrés par des militaires qui prennent les choses en mains.

Josic se surprend à constater que, malgré le nombre d'individus, la caverne est loin d'être bondée. Elle recèle en permanence de recoins supplémentaires qui repoussent le volume total de la montagne. On pourrait croire que celle-ci est creuse devant la démesure de l'endroit. Le jeune homme jurerait que celle-ci a gonflé pour prendre des dimensions démentielles.

Tout autour de lui, les guerriers s'agitent et se répartissent les tâches comme les rouages d'une gigantesque horloge bien huilée. En moins d'une heure, une ligne de défense est levée devant la grotte par un groupe d'Artistes infatigables. Ils sont allés couper les troncs des quelques arbres qui s'élancent à flanc de montagne, les ont taillés en pointe et dressés sous la forme de deux solides rangées de palissades à l'extérieur du camp. La barrière est consolidée par des blocs de roches entassés rapidement pour maintenir les renforts et constituer un obstacle supplémentaire.

Le barrage est bien conçu. Il facilite la protection et offre de nouveaux points de tirs aux défenseurs : un homme seul pourra aisément tenir tête à cinq attaquants. La configuration des lieux, une grotte, aide également les réfugiés : il sera très difficile, voire impossible, à une éventuelle armée de les débusquer. Dans le pire des cas, ils seront contraints de rester dans leur caverne. Mais comme elle donne sur un réseau immense de souterrains sous la montagne, les assiégés pourront y perdre facilement leurs assaillants.

Une autre compagnie d'Artistes se réunit pour monter les infrastructures indispensables à la vie du campement. Plusieurs feux sont allumés dans des endroits bien ventilés pour réchauffer l'atmosphère et préparer le repas... Des soldats se relayent pour remonter de l'eau des souterrains, devant les yeux hagards des apprentis abrutis par la fatigue. Mais les Artistes de la phalange ne les ont pas oubliés. Dans une partie plus profonde des tunnels, à l'abri de l'humidité et des courants d'air, ils montent des lits de camp pour leur permettre de reprendre des forces. Puis ils lèvent un hôpital de campagne pour s'occuper des blessés dans leurs rangs.

Des soldats-médecins sortent des onguents et examinent les blessures. Josic compte à la volée une trentaine de personnes allongées sur les brancards, majoritairement des apprentis. Leurs états ne sont pas dûs à la dernière attaque des Kaurocs, mais plutôt à la mise à sac de la citadelle et au séjour prolongé dans les cavernes.

Seuls quelques-uns, comme lui, ont tenté de repousser les monstres quand ils ont surgi derrière les Porteurs en fuite. Il doit bien le reconnaître, si aucun d'entre eux n'est blessé, c'est grâce à l'arrivée soudaine de la phalange qui les a sauvés d'une mort certaine. Pour être tout à fait réaliste, il a plutôt été spectateur du sauvetage. Une vingtaine de silhouettes blanches se sont écrasées sur le sol, pour mieux rebondir en direction des Ombres et les submerger sous le nombre. L'action n'a duré que quelques minutes, mais cela a suffit à la poignée de monstres pour balayer cinq Artistes aguerris. Aucun apprenti n'a eu le temps d'utiliser son arme. Les enveloppes des Kaurocs se sont vidées comme des baudruches pleines de gaz pestilentiel et cinq soldats sont restés au sol.

Choqués par la violence de l'assaut, Josic et ses compagnons ont laissé les guerriers prendre soin de leurs camarades qui ne se sont pas relevés. Ils ont investis la caverne pour les allonger à l'écart en attendant le gros de la troupe. Le reste de la phalange est arrivée et depuis, les corps sans vie sont toujours allongés là-bas, recouverts d'un linge blanc.