✨Chapitre 7 - D'une fiole et d'une sortie shopping

718 82 134
                                    

Le dortoir était plus peuplé que je ne l'avais laissé. Quelques lits étaient désormais occupés. Par une fille ou un garçon. Il me fallut un certain temps pour percuter ce que cela signifiait. Un dortoir mixte. On ne pouvait pas rêver mieux. Tous me dévisagèrent dès que j'eus posé un pied à l'intérieur. Je m'arrêtai juste derrière la porte qui venait de se refermer. En vain, je cherchai un visage connu dans la pièce. À part Zed et Lumia, je ne connaissais personne... Et évidemment ils n'étaient pas là.

Je m'avançai vers mon lit avec la ferme intention de m'y allonger et de m'endormir jusqu'à ce que ce monde bizarre ait encore besoin de me réveiller. L'Évaluation avait épuisé mon corps et l'entretien avec les évaluateurs avait court-circuité mon cerveau. J'étais lessivée.

Mais la réalité me rattrapa bien vite. Une intruse était assise sur mon lit. Je m'arrêtai sur place, prise de doute et me demandai si je ne me trompais pas de lit ou de dortoir. La fille avait de longs cheveux bruns ondulés entremêlés de mèches argentées qui encadraient un visage pâle aux traits fins. Assise en tailleur, elle ne semblait pas m'avoir aperçue, trop occupée à tracer des motifs avec ses doigts dans la couette de mon lit.

— T'inquiète pas, me rassura une fille à ma droite qui devait avoir perçu mon trouble, c'est bien ton lit. D'habitude elle fait pas ça mais elle n'est pas méchante.

— Elle est juste bizarre, renchérit un garçon, elle te fera rien. Au moins, ajouta-t-il en lançant un regard appuyé à sa camarade, c'est pas une Innée...

La fille acquiesça et rit de la remarque. N'ayant rien compris, je laissai tomber.

L'intruse releva les yeux lorsque j'arrivai à sa hauteur. Couleur chocolat noir, ils étaient accueillants. Qu'est-ce que je ne donnerais pas pour un carreau de chocolat, pensai-je tout à coup.

— Salut, me lança-t-elle lorsque je m'arrêtai devant elle, ou Dyha, comme on dit en sircien.

Ses yeux aussi souriaient. Tout chez elle semblait rayonner. Elle devait avoir à peu près le même âge que moi.

— En sircien ? répétai-je.

Elle acquiesça.

— C'est la langue des sorciers. On l'utilise peu ceci dit. La langue principale c'est le français. Viens, m'invita-t-elle, assieds-toi, après tout c'est moi qui me suis incrustée.

Elle tapotait le lit et je me laissai tomber à côté d'elle, la tête contre l'oreiller, curieuse d'en apprendre plus sur cette sorcière aux manières étranges. Le dortoir était loin d'être silencieux, il y avait des bavardages et chutes d'objets par-ci, des raclements de chaises et autres bruitages par-là, créant un fond sonore rassurant. Ils sont comme toi. Ils viennent du même monde que toi. Vous allez pouvoir vous serrez les coudes. Eux peuvent comprendre... mais eux n'ont pas eu ton score.

— Moi c'est Ethel, se présenta-t-elle en me tendant la main. Dans un mois, ça fera un an que je suis là.

— Je m'appelle May, lui répondis-je en lui serrant sa main.

La fille hocha la tête.

— Je sais, tu l'as dit pendant ton Évaluation. D'ailleurs, tu t'en es drôlement bien sortie ! Qu'est-ce que j'aimerais pouvoir grimper aux arbres comme toi, avec cette agilité, c'était fascinant.

J'haussai un sourcil.

— J'essayai juste de survivre tu sais... J'ai passé la pire demi-heure de toute ma vie !

Ethel rit et ses yeux se réduisirent à deux petits croissants de lune.

— C'est sûr que c'est toujours plus agréable à regarder qu'à vivre... concéda-t-elle. Mais te voir dans cet arbre... Il était beau... J'adore les arbres, me confia-t-elle alors, le regard dans le vide, perdue dans des pensées que je ne pouvais pas atteindre. Il fallait que je te le dise, appuya-t-elle en me regardant de nouveau.

Jusqu'à ce que tout disparaisse derrière la LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant