Charly entra par une autre porte que celle que nous avions empruntée. À chaque fois qu'il posait son pied droit par terre, il grimaçait. Lui avaient-ils fait du mal ? Le garçon se plaça au centre du croissant de sorciers, debout. Il n'avait même pas droit à une chaise.
L'un des sorciers du croissant se leva et prit la parole. Comme si nous avions la moindre chance de l'oublier, il rappela ce pour quoi nous étions là : juger le coupable du meurtre de Saundra, jeune Innée de neuf ans.
Je fronçai les sourcils. L'âge de l'Innée renforçait mon sentiment que Charly n'avait pas pu atteindre à sa vie de manière volontaire.
Que s'était-il donc passé ?
Je repensai au jour où Spoty avait utilisé ses pouvoirs au dortoir et où je m'étais transformée. Charly avait pu être victime d'une apparition similaire de ses pouvoirs sauf que dans son cas, ils se seraient carrément manifestés avec une puissance suffisante pour enlever la vie de quelqu'un ! Mais ça ne tenait toujours pas debout. J'en étais persuadée.
Le sorcier continua son monologue, présenta les parents de la défunte qui se trouvaient assis à l'écart de l'assistance et les messagers, les sorciers responsables de l'interprétation des données recueillies par les otuples qui avaient été témoins du meurtre. Il avança ensuite que le « meurtrier » avait déjà commis des actes similaires dans le « triste monde dont il provenait ».
— Le coupable est connu pour avoir dans son passé, dérobé de la monnaie et des objets d'une certaine valeur, expliqua le sorcier dont on ne voyait que la bouche s'articuler pour prononcer ces paroles improbables.
Je jetai un œil vers le pauvre Charly, seul, sans personne pour le défendre. Lui, voleur ? Il avait le regard d'un animal pris au piège, oui... C'était insoutenable. Il était bien courageux d'affronter autant d'accusations et de regards inquisiteurs sans personne pour le soutenir. La compassion et le sentiment d'impuissance que je ressentais à ce moment étaient étouffants. Le Juge annonça alors qu'il avait une chance d'expliquer ses actes. Après quelques hésitations, il se lança :
— A-avec m-mon frère, commença-t-il, on, on allait tous les étés chez notre tante à la campagne et elle avait des... heu, des problèmes de mémoire on va dire.
Il déglutit.
— Elle perdait toujours des choses ! Alors un jour, mes grands frères m'ont défié de lui piquer tout ce qu'elle perdrait dans la journée. Et je devais leur rapporter ce que je trouvais. Et moi je voulais leur montrer que j'en étais capable, que j'étais plus un bébé. Je croyais qu'après ça ils me laisseraient jouer avec eux ! Du coup, j'lui ai pris des sous, des bijoux et heu... son magazine.
Le garçon fit une pause, la sueur perlait sur son visage.
— Mais c'est pas un crime, reprit-il, parce que le lendemain je lui ai tout rendu, sans qu'elle s'en rende compte en plus ! C'était un jeu, c'est tout. Mais... interrogea-t-il les sorciers en se tournant vers eux, c-comment vous pouvez savoir tout—
— C'est nous qui posons les questions, le coupa le seul sorcier qui avait parlé depuis le début de l'audience.
Charly se mordit la lèvre. J'étais frustrée pour lui. Le juge ne manquait pas de montrer qui avait la main sur le procès. Mais c'était stupide. Charly était trop jeune pour ça, quelque chose clochait, je ne savais pas quoi. Je me tournai alors vers Lumia, une idée m'ayant soudainement frappée :
— Les Innés n'auraient pas la capacité de voir ce qui se passe chez les humains par hasard ? faisant ainsi référence au fait qu'elle savait des choses sur mon passé qu'il était impossible de lire sur mon visage.
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Jusqu'à ce que tout disparaisse derrière la Lune
FantasyMay pense être une ado ordinaire. Elle pense que rêver de créatures d'ombre et de poussière est normal. Et elle ne voit pas pourquoi obtenir un score aussi élevé à l'Évaluation, lorsqu'elle atterrit par hasard dans un monde de sorciers, pourrait la...