Une année s'était écoulée et une autre la remplaça mais quelque chose permit la transition : les fêtes. Qu'aurais-je donné pour pouvoir les passer avec ma famille et mes amis... Le point positif était que le temps s'était de nouveau rafraichi et la plaine arborait un épais manteau neigeux qui me donnait envie de sauter dedans. Ceci faisait que j'embêtais Ethel tous les matins en la sortant du lit plus tôt que nécessaire pour pouvoir observer le paysage depuis le dôme de verre avant d'aller en cours. Lorsque je ne parvenais pas à la tirer de ses couvertures ? Eh bien nous arrivions en retard, ce qui nous valait le regard liquéfiant de Madame Kletter. Mais le jeu en valait la chandelle.
J'aimais d'autant plus admirer le paysage enneigé que lors de mes sorties avec Gorigann et Zed nous n'allions que dans la forêt dorée. Elle s'était couverte d'une bonne épaisseur de poussière pailletée la faisant encore plus étinceler – si quelque chose de tel est possible – mais ne contenait nulle trace neige.
Et bien entendu, il faisait un froid de canard. Cela n'avait aucun effet sur le maître qui tenait à ce que nous poursuivions les entraînements comme lorsqu'il faisait chaud et c'était bien plus fatiguant. Cependant, je progressais. Les enchaînements s'organisaient mieux dans mon esprit et j'en maîtrisais à peu près deux. C'était un exploit.
Un soir, alors qu'Ethel, Thomas et moi passions la soirée sur mon lit, notre conversation dériva jusqu'au sujet dont tout le monde raffolait en ce moment.
— Donc il y a un « Noël sorcier » ici ? lançai-je.
— C'est ça, me répondit Ethel.
— Que j'ai manqué l'année dernière parce que j'étais en convalescence chez Feuille d'Automne.
— Tout à fait, enchaîna Thomas. On les nomme les fêtes de l'Hommage.
— Selon la légende, elles datent des créateurs du C.I.S.I, reprit Ethel. Mais ce sont plutôt une vénération aux dieux sorciers et à la Grande Prêtresse qu'autre chose...
— Les dieux sorciers, ce sont le Soleil, la Lune et le Néant, je me trompe ?
— C'est ça, et pour qui nous avons un respect incommensurable, ajouta Thomas.
— Parce qu'ils ont choisi Soleil Levant pour devenir Grande Prêtresse, joignit Ethel.
— Mais ils sont inconscients ! m'écriai-je.
Ethel rit en hochant la tête.
— On est plusieurs Transferts à penser qu'ils ne sont qu'une supercherie des Innés... me répondit Thomas. D'autres sont sceptiques, comme Spoty, et le reste y croit vraiment.
— Déplorable, s'exaspéra Ethel. Sans vouloir t'offenser May, mais Zed, sa petite famille et ses amis Innés doivent vraiment être aveugles pour croire à de telles bêtises. Depuis quand une étoile, un satellite et du vide pourraient déterminer nos vies et veiller sur nous ? Non, nous sommes les seuls à pouvoir influencer notre destin et les seuls qui peuvent nous protéger sont les arbres. Eux entendent nos prières et sont capables de nous aider.
Thomas sourit. Je ne savais trop que répondre. Ethel avait une vision si particulière du monde qui nous entourait...
— Tu sais bien que je crois aussi peu aux arbres qu'aux dieux sorciers... avoua enfin Thomas, mais ça ne veut pas dire que je ne crois pas à une entité supérieure qui nous domine et nous nous guide dans notre vie. On ne peut tout de même pas être livrés à nous-même dans un monde aussi vaste. Ça n'aurait aucun sens. Ce serait effrayant.
— Ok, on n'a pas du tout le même point de vue, constata Ethel en faisant la moue.
— Mais au final, réalisai-je, peu importe la forme que vous leur donnez, vous croyez tous les deux en quelque chose, vous avez une foi qui vous porte : les arbres pour Ethel, une entité divine pour Thomas. C'est tout ce qui compte, non ?
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Jusqu'à ce que tout disparaisse derrière la Lune
FantasyMay pense être une ado ordinaire. Elle pense que rêver de créatures d'ombre et de poussière est normal. Et elle ne voit pas pourquoi obtenir un score aussi élevé à l'Évaluation, lorsqu'elle atterrit par hasard dans un monde de sorciers, pourrait la...