10. Ti... Titania...

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« - Titania, concentrez-vous mon enfant ! »

J'acquiesçai lentement, mais restai immobile, le regard fixé sur ma broderie. Je ne savais même plus ce qu'elle était censée représenter... Une fleur, peut-être. Je sentis un pied écraser discrètement le mien. Doucement, je tournai la tête vers Eglantine, qui me fixait avec un air inquiet sur le visage. Elle me souffla en piquant son aiguille à un rythme régulier dans son canevas :

« - Que t'arrive-t-il ? Tu es malade ? Tu t'es peut-être enrhumée en sortant avec ton Côme ?

- Ce n'est pas mon Côme. Je le déteste. »

Je baissai la tête, les yeux secs. J'avais tellement pleuré hier soir que je n'avais plus de larmes. La rousse eut une exclamation de surprise, et Mère Louise demanda en soupirant :

« - Qu'y a-t-il, Eglantine ?

- Rien, ma mère. J'ai failli me piquer.

- Bien. Continuez à broder. »

Mon amie me demanda d'une voix douce :

« - Pourquoi ? C'est pour cela que tu n'étais pas au repas du soir, hier ?

- Oui. Il... Il m'a menti.

- A propos de quoi ? »

Je lâchai un soupir douloureux, sentant la douleur désormais familière étreindre mon cœur, avant d'avouer :

« - C'est le prince. Le fils du roi et de la reine. »

Elle lâcha sa broderie de surprise, avant de se plaquer les mains sur la bouche pour étouffer un cri de stupeur. Puis, elle m'agrippa le bras après avoir vérifié que Mère Louise ne nous regardait pas :

« - Mais... Tu ne te rends pas compte de la chance que tu as ! Le prince !

- Il m'a menti ! m'exclamai-je en tentant d'être discrète. Il a fait semblant de m'aimer !

- C'est lui qui t'a dit cela ? »

Elle semblait choquée, alors je secouai la tête :

« - Non, mais... C'est le prince ! Comment pourrait-il m'aimer ? C'est complètement impossible. »

Je me tus, terrassée par la douleur. C'était si dur de penser à lui ! Eglantine posa une main sur mon bras :

« - Ecoute... S'il ne te l'a pas directement dit, ce n'est peut-être pas vrai !

- Si. Je le sais. »

Je me dégageai avant de me concentrer de toutes mes forces pour broder. Mais des visions de Côme ne cessaient de m'envahir à chaque instant. Au bord des larmes, je lâchai mon canevas pour lever la main :

« - Ma mère ? Je ne me sens pas bien. Puis-je aller prendre l'air ? »

Mère Louise me jaugea du regard. Je ne devais pas avoir bonne mine, car elle acquiesça :

« - Oui, allez-y. Revenez quand vous irez mieux. »

Sans perdre de temps, ni regarder la rousse, je me levai et sortis rapidement de la pièce. J'étouffai. Sans réfléchir, je me rendis dans les jardins de l'Institution, le cœur serré. Une légère brise me frappa, et je reniflai pour tenter de me calmer.

La gorge nouée, je déambulai dans les allées, avant d'échouer dans mon coin habituel. Je me laissai pesamment tomber sur une souche, avant d'éclater en sanglots. C'était trop dur de vivre avec cette trahison ! Je me pris le visage dans mes mains en essayant de me calmer, mais je n'y parvenais pas. J'en avais trop gros sur le cœur. Je me laissai glisser dans l'herbe, n'ayant pas conscience de mes mouvements. Je voulais tellement arrêter de souffrir !

The sound of silence (Tome 1) ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant