Chapitre 28

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Millicent

Clarisse posa son verre désormais vide d'un geste brusque. Alex qui lui tenait la main deux secondes auparavant croisait en ce moment même ses bras sans croiser son regard. On se connaissait depuis tant d'années... Je ne savais pas quoi en penser. Elle ne m'en avait jamais parlé. Clarisse claqua la langue, puis relança le jeu d'une voix fébrile.

— Je n'ai jamais pleuré pour un garçon ou une fille.

La suite du jeu se déroula au début dans une ambiance des plus froides jusqu'à reprendre petit à petit, à mon grand soulagement, une tournure à nouveau joviale.

— Je n'ai jamais utilisé de capotes phosphorescentes.

Blaise sourit et but aussitôt. Il revint au mode « soft » pour tenter d'alléger l'atmosphère.

— Je n'ai jamais dormi dans la voiture.

Le jeu avait beau faire rire, le cœur n'y était plus vraiment.

— Je n'ai jamais fantasmé sur une star.

— Je n'ai jamais chanté sous la douche.

***

Le jeu prit fin peu de temps avant minuit. Les poings crispés, je me levai. Ma tête tournait un peu, mais je prenais sur moi pour emmener Clarisse loin de la foule. Il valait mieux laisser les mecs entre eux pour le moment. Malgré la musique qui résonnait à travers la pièce et les éclats de rire qui provenaient des autres groupes, j'entendis des pas approcher. En me retournant, je découvris Alex. Je soupirai d'agacement, mais Clarisse hocha la tête en signe d'approbation. Alex ferma la porte derrière nous et soudain, le silence nous entoura. L'air frais me permis de respirer avec plus de facilité. Ma meilleure amie me tournait le dos et Alex, l'air renfrogné ne songeait pas à dire le premier mot.

— Ça remonte à quand ?

— Franchement, je ne vois vraiment pas pourquoi vous en faites toute une histoire... mais bon, si vous tenez tant à le savoir, alors je vous le raconter.

Clarisse leva la tête vers le ciel étoilé et commença son récit. Il y a deux ans, ses parents l'avaient inscrite en colonie de vacances pour adolescents afin qu'elle puisse découvrir la Corse. Cet été-là, elle avait quinze ans, et comme la plupart des filles qui l'entouraient, elle avait sympathisé avec des garçons âgés de dix-sept ans. Elle nous avoua qu'elle était très rapidement tombée sous le charme de Maxence, un brun aux yeux bleus. Il allait entrer en Terminale et elle en seconde. Elle s'arrêta un instant avant de poursuivre. Elle avait compris qu'après ces vacances, elle ne le reverrait pas. C'était simplement un amour de vacances et pourtant lors du dernier soir de notre séjour, ils s'étaient rejoints, comme promis, à la plage. Elle s'en rappelait comme si c'était la veille. Pour que tout soit parfait, elle avait demandé à Cécile, sa camarade de chambre, de la couvrir. Maxence l'attendait, sac à dos sur l'épaule, à l'entrée de l'établissement, le sourire aux lèvres. Clarisse était vêtue d'une robe de bain rouge à col V et Maxence portait simplement un maillot de bain noir. En le voyant, elle se précipita vers lui, posa ses mains sur son torse nu et l'embrassa. Il lui avait murmuré au creux de l'oreille qu'elle était sexy dans cette tenue, ce qui l'avait fait rougir. Ils avançaient main dans la main vers la mer et avant d'aller plus loin, Maxence lui avait demandé si elle en avait toujours envie. Il savait que c'était sa première fois et il avait peur de tout gâcher, mais elle voulait continuer.

Elle se tourna enfin vers nous et nous raconta la suite avec une pointe d'amertume. Maxence avait posé sa serviette sur le sable fin et retiré son bas sous les yeux émerveillés de Clarisse. Ils s'étaient tous les deux assis sur la serviette et Maxence avait commencé tout doucement à l'embrasser sur la bouche puis sur tout le corps. Il avait posé sa bouche sur ses seins et pour la détendre un peu et l'exciter, il s'était mis à les lécher avec passion. En même temps, il avait retiré le bas de maillot de Clarisse et glissé un doigt, puis deux en elle.

— C'est bon, stop. Je crois que l'on pourra se passer des détails, l'interrompit Alex.

— Je...

— Tu lui parles encore à ce « Maxence » ? demanda-t-il à ma meilleure amie, d'un ton agacé.

— Non, s'écria-t-elle en se tournant vers nous.

— Tant mieux ! Clarisse, je n'ai aucune envie que tu me racontes comment ce Maxence t'a dépucelée, crois-moi. Si ça intéresse, Millie, elle peut rester, mais en ce qui concerne, je me tire. Bonne soirée, déclara-t-il en nous laissant toutes les deux.

La mine triste, j'entourais Clarisse qui venait d'être prise au dépourvu alors qu'elle venait de nous confier une part de sa vie intime. Elle pleurait dans mes bras, et je laissais faire sans prononcer un mot. En l'écoutant, je venais de comprendre qu'elle n'avait simplement eu une première relation sexuelle, mais aussi son cœur brisé. Ma clarisse l'aimait.

— Tu n'es pas obligé de me raconter la suite, c'est ta vie privée après tout.

— Merci, Millie, mais je comprends ta colère. Tu es ma meilleure amie, j'aurais pu te le raconter.

— Oui. Je me trompe peut-être, mais j'ai l'impression que ce n'était uniquement un amour d'été.

— Hum.

— Du moment que ta première fois s'est bien passée, ça me convient.

— Oui, il a été parfait.

— Alors, c'est tout ce qui compte.

***

La soirée s'était achevée. Je venais de me glisser sous les draps pour rejoindre Zac dans la chambre d'amis. J'éteignis la lumière et je devinai sans peine son sourire au son de sa voix.

— Encore bonne année, petit cœur, me susurra Zac.

— Merci, chou, chuchotai-je en l'embrassant sur la bouche.

Heureusement que j'avais choisi de prendre un pyjama d'hiver des plus ordinaires, car Zac, lui, était simplement vêtu d'un caleçon noir moulant. Couchés sur le dos, Zac entremêla ses doigts aux miens. Ce geste empli de tendresse fit soudain accélérer ma respiration. Très rapidement, je l'entendis me murmurer un « bonne nuit » avant de rejoindre le pays des rêves.

Comment fait-il pour s'endormir aussi rapidement ? L'avoir aussi près de moi me rend toute chose.

Sa proximité m'apaisait, mais en même temps elle me perturbait, car elle faisait naître une sensation que je n'avais jamais connue auparavant. Je restais là à fixer le plafond un moment, avant de me mettre sur le côté. Alors que j'arrivais à contrôler de nouveau ma respiration, Zac bougea pour venir me câliner.

— Zac ?

— Huuum ?

Je venais de le réveiller, apparemment.

— Non, rien. Enfin si. Bonne nuit.

Bon sang, il était beaucoup trop collé à moi. Je déglutis avec peine et mon cœur battait à la chamade quand je sentis son membre se durcir dans le bas de mon dos. Même vêtue d'un pyjama blanc ourson, je lui faisais de l'effet. C'était la première fois que je dormais avec lui, alors forcément... l'amour que je ressentais pour lui se transforma à ce moment précis en désir. Je mordis la lèvre inférieure, en pensant à son torse nu. Je me surpris à imaginer ce que cela donnerait si on allait plus loin, et finalement, je m'endormis à mon tour peu de temps après, son souffle sur ma peau. De toute façon, j'avais mes règles alors on ne pouvait pas aller plus loin. 

Tu te souviens du jour où...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant