Chapitre 36

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Millicent

La terrible nouvelle remontait maintenant à un peu plus de quinze jours. Entre-temps, il s'en était passé des choses. Oh oui, croyez-moi ! D'abord, il y eut une scène assez mémorable à mes yeux. Elle avait eu lieu quelques jours après que Clarisse fut sortie de l'hôpital. Heureusement pour elle, on l'avait opéré d'urgence.

Cette dernière avait invité Alex et moi-même à venir chez elle. Tout d'abord heureux de la voir en dehors de l'hôpital, la douleur qui nous tuait un peu plus tôt à l'intérieur revint dès l'instant où Clarisse nous demanda de tenir une promesse. Je pensais que durant ces quelques jours passés à l'hôpital, ma meilleure amie aurait eu le temps de faire le deuil de sa passion. Eh bien... oui, elle l'avait en quelque sorte fait, mais pas de la manière dont je l'avais imaginé. Je le compris avec cette fameuse promesse.

— Après avoir mûrement réfléchi, j'aimerais que vous me promettiez une chose. Rien qu'une seule. déclara posément Clarisse.

— Tout ce que tu voudras !

J'avais énoncé cette phrase en même temps que mon meilleur ami.

— J'aimerais ne plus jamais aborder le sujet de la natation et j'attends de vous la même chose.

J'avais dû mal entendre, hein ? Depuis que je connaissais Clarisse, la natation faisait partie intégrante de ses sujets de conversation favoris. Faire le deuil, c'était une chose... Mais choisir de ne plus en parler, c'en était une autre. Un silence de plomb régna ensuite, du moins tant que l'un de nous trois ne daigne prendre la parole. Je le brisais pour exprimer à voix haute ce que chacun de nous pensait tout bas.

— Clarisse. Tu ne peux pas nous demander ça ! C'est... C'est juste insensé ! lui avouai-je les larmes aux yeux.

Comme réponse, j'eus le droit à un regard profondément triste de la part de ma meilleure amie avant qu'elle ne s'exprime à nouveau.

— Ce n'est pas compliqué comme promesse à tenir, pourtant.

— Oui, mais... me désolai-je.

— Il n'y a pas de mais qui tienne ! Vous êtes avec moi ou... contre moi ? s'énerva Clarisse.

— AVEC toi, bien sûr. Enfin Clarisse, c'est quoi cette question ? — Je m'adressais juste après à Alex — Et toi, putain, pourquoi ne réagis-tu pas ?

— Je... Moi aussi, je suis avec toi. Je serai toujours avec toi, avoua Alexandre.

— Clarisse. — Je marquais une courte pause – Je jure solennellement que...

— Attends, qu'est-ce que tu me fais, là ? me coupa dans mon élan ma meilleure amie.

— En tant que fan de la saga Harry Potter, je voulais lui faire honneur, mais surtout je souhaitais dédramatiser la situation.

— C'est gentil Millie, mais je trouve que l'heure n'est pas à la rigolade et par-dessus tout je n'en ai pas envie.

***

Une fois la promesse, qui me semblait difficile à tenir, faite... Clarisse m'avait demandé de sortir quelques minutes de la chambre et de fermer la porte derrière moi, le temps de parler durement d'un sujet avec son petit-ami. J'étais donc sortie de la pièce sans broncher, mais m'adossais toutefois contre la porte après que celle-ci fut fermée, pour les écouter en douce. Bien sûr, sensible comme j'étais, cette action m'était fatale par la suite. Si Clarisse avait voulu se retrouver seule avec Alex, ce n'était pas pour faire des mamours. Non. C'était pour rompre.

Je crois que je n'aurais pas pu supporter de voir cette scène de mes propres yeux. À vrai dire, je m'en mordais déjà les doigts de les écouter. C'était bien trop dur à entendre. Tellement dur que je pleurais à chaudes larmes, comme eux derrière la porte sans qu'ils le sachent. Clarisse ne rompait pas parce qu'elle n'aimait plus Alex, non, elle souhaitait rompre, car elle avait peur qu'il finisse par rester avec elle au bout d'un moment par pitié. Comme elle le lui avait si bien dit, sa vie ne serait désormais plus pareille.

Elle ne lui en voulait pas pour la promenade à cheval. Enfin ça c'était ce qu'elle lui avait dit plus tôt, car aujourd'hui, soit environ deux semaines après que cette scène fut écoulée, elle percevait les choses différemment.

***

Lorsque le jour des résultats du baccalauréat arriva, tout le monde fut bien évidemment excité à l'idée de les découvrir. Tout le monde sauf ma meilleure amie qui redoutait le regard des autres. Pour la motiver, j'avais décidé de l'accompagner. J'avais même fait appel à ma mère pour qu'elle nous emmène en voiture au lycée. Têtue, Clarisse refusa ma proposition, mais persévérante comme j'étais je n'abandonnais pas pour autant. Au contraire, je tentais de la rassurer en lui disant qu'elle restait la même et qu'au fond elle n'avait pas changé. Il fallait que quelqu'un lui dise que ce n'était pas le regard des autres qui allait l'empêcher de continuer à vivre normalement et sereinement. À la suite de ma confidence, Clarisse avait fondu en larmes et s'était avouée vaincue en acceptant ma proposition. Elle me reprit néanmoins sur un point en me rétorquant « Millie, tu es la meilleure des amies qu'on puisse avoir, mais toi comme moi savons pertinemment que ma vie ne sera plus jamais comme avant. Elle prendra un nouveau tournant parce que je suis et que je resterai en fauteuil roulant jusqu'à la fin de ma vie ». Pour éviter de la faire pleurer encore plus, je choisis de ne rien dire et préférais sourire.

***

Arrivées au lycée, on ne s'occupa pas du regard des autres, même si on les sentait braqués sur nous. Pour nous aider, Zacchary vola à notre secours dès qu'il nous vit. Avec Matthias, il demanda aux élèves situés aux alentours s'ils n'avaient pas autre chose de plus intéressant à regarder... comme les résultats du baccalauréat par exemple. Je saluais Zacchary par un bisou et je les remerciais lui et Matthias avant d'avancer vers les tableaux d'affichage les mains sur le fauteuil de Clarisse pour l'aider à rouler sur les graviers.

***

La journée ne pouvait pas mieux commencer, enfin si on oubliait le petit incident de tout à l'heure. Tout le monde avait obtenu son bac avec plus ou moins d'aisance. Chacun était ravi sauf moi. Je ne connaissais toujours pas le verdict et je devais bien avouer que je me sentais de plus en plus mal. Et si je ne l'avais pas ? Après tout, tout était possible. Tout oui, mais...

— Millie ? m'interrompit Zach dans mes pensées.

— Oui ? répondis-je la bouche sèche tellement j'étais stressée.

— As-tu été voir ce tableau d'affichage ?

Zach m'indiqua du doigt le tableau d'affichage situé le plus à gauche.

— Euh non, mais en même temps c'est normal hein ? À quoi cela servirait-il ? Comme si moi, Millicent Aberline, j'avais eu mon BAC mention très bien. Pff. m'exclamai-je.

En voyant un grand sourire s'étirer sur les lèvres de mon petit-ami, j'avalais difficilement ma salive puis je marchais d'un pas décidé en direction de ce tableau.

***

— Oh mon Dieu ! Zac, j'ai eu mon BAC avec la mention très bien ! Ce n'est pas possible ! — Je regardais à nouveau sur le tableau pour être sûre à 100% que mon nom et prénom figuraient bien sur cette liste — Si ça l'est ! Oh, je n'en crois pas mes yeux ! affirmai-je en pleurant de joie.

Fier de moi, Zac m'étreignit ensuite avant de m'embrasser fougueusement.

— Aie confiance en toi ma douce Millie et surtout félicitations, car tu le mérites amplement ! me murmura au creux de l'oreille Zac.   

Tu te souviens du jour où...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant