Chapitre 28

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Maël fixait son assiette avec haine, le visage rouge de colère. Par pitié, pourvu que...

― Yann, voyons ! intervint leur mère. C'était il y a douze ans !

― Qu'en sais-tu, maman ? Il a très bien pu se bourrer la gueule à nouveau, n'importe quand !

Je ne comprenais pas ce soudain débordement, paniquée par la tournure des événements.

― Mais qu'est-ce qui te prend ? lui demandai-je.

― C'est simple !

La voix de Maël claqua comme un fouet, tandis qu'il serrait avec force son verre dans sa main.

― C'est simple, Céline, il est furax que tu sortes avec moi plutôt qu'avec lui !

Ce fut à mon tour de rougir fortement, d'indignation.

― Qu'est-ce que tu racontes ? Tu dis n'importe quoi ! m'affolai-je.

― Ce n'est pas agréable à entendre, mais c'est la vérité.

― Mais pas du tout !

Je lançai un regard à Yann, qui restait crispé de colère, sans démentir. Misère de misère ! Sa jalousie était un paramètre que je n'avais absolument pas prévu !

― Il n'était pas en train de te payer un verre, quand on s'est rencontrés ? insista Maël. Il n'a jamais pu le digérer, ça !

― Tu as fait exprès de me la voler, connard ! s'écria Yann en se levant.

― Ça t'arrangerait, hein, que ce soit de ma faute ? ricana Maël. Eh bien même pas ! Notre relation n'a rien à voir avec toi, abruti. Tu t'es pris un râteau, faut que tu t'y fasses.

― Je rêve ou vous vous servez de moi comme prétexte pour vous engueuler ?? m'exclamai-je à mon tour, outrée. Pas de ça !

Je me levai en tentant de rester digne, et me tournai vers Brigitte. Elle regardait l'affrontement avec de grands yeux effrayés, comme si son monde s'écroulait. Les autres restaient sans voix, consternés.

― Je suis vraiment désolée, lui dis-je. Je vais partir. Je vous demande encore pardon pour tout ça.

J'attrapai mon manteau sur le bras et marchai jusqu'à la porte. Yann contourna la table pour me rejoindre.

― Attends, Céline...

Enfermé dans son ressentiment, Maël réagit avec un temps de retard. Il leva la tête brusquement :

― Hé mais... où tu vas, toi ??

... avant de bondir pour nous rejoindre. J'allais ouvrir la porte, mais Yann me supplia :

― Je t'en prie, Céline, dis-moi au moins ce que tu lui trouves ? Pourquoi lui ??

― Fiche-lui la paix ! s'interposa Maël, écarlate. Tu la touches, je te tue !

― C'est à elle que je parle, connard ! Combien de fois tu l'as déjà trompée, obsédé ?

― Putain, espèce de...

― Ça suffit vous deux !! tonna la grosse voix de l'oncle André.

Il arriva jusqu'à nous, furieux, et attrapa brusquement chaque frère par le col, les hissant sur la pointe des pieds.

― Je vous défends de vous battre sous le toit de votre mère ! C'est compris ?!

Yann et Maël restèrent de marbre, les dents crispées. André finit par les reposer, lentement. Je ne pus retenir mes larmes plus longtemps.

Aimer, rire... survivre (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant