Chapitre 5, partie 2

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Chapitre 5

Partie 2

Comme elle avait annoncé débuter son travail dimanche, elle ne pouvait rester cloîtrer dans la villa. Son mensonge aurait été des plus évidents.

N'ayant rien à faire et ne connaissant personne, elle s'était décidée à explorer les environs.

Dimanche, après avoir quitté son lit sans difficulté, elle se prépara pour la journée et prit le temps de passer par la cuisine où elle laissa un petit mot reposer sur la table dans lequel elle mentionnait son absence pour tous les soirs à venir.

Le temps était toujours couvert mais la pluie avait cessé durant la nuit, lui évitant l'ennui qu'était un parapluie.

Une fois dehors, elle acheta un plan sous les yeux moqueurs du premier marchand de journaux qu'elle croisa et divisa la carte en six parties. La plus grande était réservée pour le jour même et les plus petites pour ceux de la semaine prochaine.

Comme Frank et Noémie auront repris les cours, elle allait pouvoir faire la grasse matinée sans risquer de les croiser. Et si elle se faisait aussi légère qu'une souris chaque fois qu'elle quitterait la maison, l'après-midi, personne ne réalisera ses va-et-vient.

Son père travaillait et bien qu'elle n'était pas sûre de ce qu'Emma faisait, avec la soudaine fortune dans laquelle son père vivait, elle devait avoir un job bien rémunéré.

Mais on ne savait jamais. Elle était peut-être une mère au foyer avec un héritage énorme. Ou ils avaient gagné le gros lot au loto. Peu importe, Elise ne voulait pas la croiser.

Et ce fut ainsi que ses journées se passèrent pour les jours qui suivirent. Elle filait sans être vue, telle une voleuse, son plan à la main, à travers les rue habitées ou vides, pleines ou désertes, sous un soleil qui réapparaissait timidement jusqu'à devenir, une fois de plus, resplendissant dans un ciel sans nuage avec une température agréable qui, bientôt, descendra paresseusement pour faire place à l'automne.

Lundi, l'exploration sud de la ville fut agrémentée d'une religieuse au chocolat, spécialité de la région qu'elle avait estimée nécessaire de goûter, suite au son distinct d'une notification provenant de son portable.

La probabilité qu'Adrien en était la cause était grande et il lui fallait un endroit pour s'assoir si elle voulait pouvoir répondre. Pour elle, les gens capables d'écrire un message professionnel plus au moins correcte tout en marchant étaient des magiciens. Elle avait suffisamment de peine à lire en marchant. Se montrer multitâche n'était pas un de ses talents.


Bonjour Mlle Maillard,

Comme mentionné durant notre conversation lors de notre rencontre, j'ai pris note de votre contrat et de ses exigences. L'une des clauses est que vous refusez les propositions entrant dans les catégories suivantes : sous-vêtement, lingerie et maillot de bain. Sauf exception de marque très renommée.

Ce qui m'amène aux questions suivantes :

Qu'en est-il des castings pour ces marques renommées. Dois-je proposer votre candidature avec l'espoir d'une réponse positive immédiate ou pour l'étape suivante du dit casting? Ou la possibilité d'un contrat se fait uniquement lorsque ceux-ci vous font l'offre personnellement ?

Mes meilleures salutations

Adrien Motrel


Les doigts sur son portable, elle jouait des touches tactiles revenant régulièrement sur la touche d'effacement. Trop souvent.

Les minutes s'accumulèrent alors qu'elle essayait d'écrire avec les bons mots et finit par lui envoyer le message suivant :


Monsieur Motrel,

Dans la majorité des cas, ils demandent des photos en maillot de bain ou en sous-vêtement dans le book à envoyer. N'en n'ayant jamais fait, ma candidature n'est pas possible.

Dans le cas où ils n'en demandent pas, n'hésitez pas à envoyer ma candidature. Il est toujours possible de se retirer avant l'étape suivante du casting ou de la décision finale, bien que je doute de prendre cette décision. Après tout c'est une opportunité qui ouvre de grandes portes.

Mes sentiments distingués

Elise Maillard


Sa réponse, contrairement à la sienne, fut rapide.



Mlle Maillard,

Je vous remercie de votre précision.

Dernière question, cela vous dérange-t-il si je vous tutoie ? J'avoue qu'utiliser le vouvoiement avec quelqu'un comme vous, je n'entends par là rien de péjoratif mais une allusion à votre jeunesse, me paraît étrange et ne me vient guère naturellement. Bien entendu, il en sera de même de vous à moi.

Mes meilleures salutations

Adrien Motrel


Sacre bleu merci! Elise était fort soulagée de lire ces lignes car il lui fallait bien trop de temps pour écrire un mail avec une telle politesse. Elle avait passé la dernière heure à chercher la bonne formulation pour cinq misérables lignes.


Oui !!!! C'est bien plus facile pour moi aussi.

Bonne soirée

Elise


Elle envoya le dernier message de la journée et, après relecture, espéra ne pas en avoir fait trop. Les points d'exclamations n'auraient pas été nécessaires. Elle soupira.

Vendredi vint avec l'annonce d'un contrat. Trois fois par semaine, le matin et jusqu'à nouvel avis, elle sera mannequin de show-room, également appelé mannequin-cabine si l'on voulait ôter tout le glamour que laissait sous-entendre le terme anglais quand on ne savait pas de quoi il s'agissait.

Rien de fantastique, mais elle savait que l'occasion offrait une paye régulière et minimum pour le moment. Les bons contrats viendront entre-deux. Tout du moins, elle l'espérait.

Cette nuit-là, elle se coucha satisfaite de sa semaine. Elle avait évité les occupants de la maison et avait suivi les instructions que son ancien agent n'avait cessé de lui bourrer dans le crâne. Elle avait marché toute la journée en s'alimentant de son régime Vegan. Le tout sans difficulté. À l'exception de la pâtisserie, mais celle-ci avait été incontournable et délicieuse. Explorer la ville avait été plus intéressant qu'elle n'avait pensé.

Malheureusement, tout le monde ne fut pas de son avis. Son père la confronta le lendemain.



Pas assezOù les histoires vivent. Découvrez maintenant