Pas assez

Chapitre 29, partie 2

Chapitre 29

Partie 2

- Écoute, je ne veux pas te blesser. Mais ce qui vient de se passer ne se reproduira pas.

- Pourquoi pas ? J'ai peut-être été la première à t'embrasser mais tu ne m'as pas repoussée. Je ne te laisse pas indifférente et je ne vois pas pourquoi tu me repousses maintenant. Donne-moi une raison.

Faisait-elle une erreur en insistant ? Devrait-elle prétendre n'avoir aucun problème avec ce rejet et ainsi éviter de paraître désespérée ?

Non. Elle avait pris sa décision en venant ici et, bien que son cœur battait un rythme infernal et que ses jambes faiblissaient, elle voulait une réponse. Peut-être ne l'aimait-il simplement pas. Cependant, elle avait besoin de l'entendre prononcer ces mots ou ses sentiments ne deviendraient que plus intense. Elle ne voulait pas se faire guider par un espoir qui n'était qu'une illusion.

- Tu es jeune et j'ai 22 ans, bientôt 23.

- Et alors ?

- C'est une différence d'âge considérable.

Elise le regarda perplexe, un instant. Là, n'était pas une des réponses qu'elle avait envisagées. Beaucoup avaient été passées à la loupe. De son insécurité qu'elle tentait de surmonter, à chaque moment peu flatteur dont il avait eu le malheur d'être témoin. De son orteil gauche à son oreille droite passant par sa poitrine. Tout y était passé. Ou presque.

- Tu plaisantes ? C'est ce qui te perturbe ?! C'est pour ça que tu me repousses ?

- Elise, réfléchis-

Non, elle ne le laissa pas terminer. Décroisant ses bras de sa poitrine, elle pointa un doigt contre son torse avec insistance.

- Si tu ne veux pas, juste dis-le. Ne cherche pas des excuses débiles.

Bien qu'Elise paraisse sur l'offensive dans sa stature et ses mots, sa voix la trahissait. La vulnérabilité y était audible et le ton, au lieu d'être ferme, sortit chancelant.

- Je suis sérieux. Je t'apprécie. Beaucoup. Mais ne dis pas que tu n'y as pas pensé ?

- C'est cinq ans.

- Ce qui est beaucoup.

Elle n'arrivait pas à le croire. Leur différence d'âge n'était définitivement pas quelque chose qui la dérangeait. Surtout pour cinq misérables années.

- C'est rien du tout. Quel âge ont tes parents ? Mon père a cinq ans de plus qu'Emma et je suis sûre que beaucoup de couples ont une plus grande différence sans que ça ne cause de problème.

Adrien se frotta à nouveau les cheveux avec frustration.

- Tu me donne l'impression d'être ridicule.

- Vraiment ? Peut-être parce que tu l'es !

- Tu as l'âge de ma petite sœur. Et juste penser qu'elle puisse sortir avec un type de mon âge me rend dingue.

- Dieu Merci, je ne suis pas ta sœur.

Les bras d'Elise se croisèrent à nouveau devant elle. Une protection minime qu'elle tentait de faire passer pour de la nonchalance qu'elle ne ressentait pas. Adrien la regarda, les sourcils levés.

- Oui, heureusement. Mais le fait de vouloir casser la figure à un type du genre ne change pas. Je ne veux pas être ce genre de personne.

- Claudia pourrait sortir avec un type plus jeune que tu voudrais l'amocher.

Elise n'était pas sûre de ce qu'elle avançait. Il semblait quelqu'un de calme mais il pouvait avoir un caractère prompt. Ou peut-être était-ce justement ce détail qui le dérangeait.

- Je n'ai pas de frère qui va t'amocher.

Cette fois il la regardait comme si elle avait perdu la tête. Bon, peut-être faisait-elle exprès de tourner autour du pot. Elle avait réalisé ce qui le gênait la seconde où elle avait prononcé la différence d'âge. Ce n'était pas ce point qui le dérangeait, mais son âge à elle.

- Tu ne comprends pas.

- Non je ne comprends définitivement pas. Si c'est le fait que je n'ai pas dix-huit ans, t'inquiète pas, j'ai la majorité sexuelle. Personne ne te cherchera des ennuis.

- Sérieux ?

Son expression était abasourdie. Ses sourcils froncés et son nez plissé laissaient transparaître son désarroi face aux paroles sorties de la bouche de la jeune fille.

Elise, d'une expression contrite, débita.

- Cours d'éducation sexuelle au lycée.

Puis, elle soupira.

- J'essaie juste de comprendre ce qui te retient. Si c'est que je suis mineure, dans deux semaines j'ai mon anniversaire et je serai majeure.

Adrien secoua la tête, refusant tout d'un bloc et le rejet vint frapper Elise de plein fouet. Dans un dernier effort elle s'exclama :

- Non ! Dis-moi pourquoi ? N'importe quoi qui n'est pas cette stupidité, parce que je ne la comprends pas. Tu dis que tu m'apprécies beaucoup, je me fais des tas d'idées et tu dis qu'on ne peut pas. Non pas parce que tu ne ressens rien envers moi, mais parce que tu veux la jouer Roméo et Juliette ou je ne sais quoi. Le seul obstacle c'est celui que tu mets, toi.

À présent les larmes coulaient le long de ses joues.

- Tu me tends une perche mais, peu importe mes efforts, elle reste impossible à attraper. J'aime pas ça.

Elise reniflait pour tenter de calmer sa tristesse mais la douleur dans sa poitrine gardait le flot continu. À travers une vue brouillée par les larmes, elle regarda Adrien.

Il paraissait vouloir dire quelque chose mais sa mâchoire se refermait toujours sans qu'aucun son n'en sorte. Son expression était déchirée et ses bras, à plusieurs reprise, avaient été sur le point de l'enlacer mais à chaque fois, il se ravisa peu convaincu.

Le manège ne paraissait pas avoir de fin. Il voulait dire quelque chose sans jamais rien dire et s'avançait pour se reculer.

- Quand tu as pris une décision, fais-le-moi savoir. Si il y a une chose que tu m'as appris c'est de réfléchir à ce que je veux et non ce qui est attendu de moi ou ce que je crois qu'on veut de moi.

Elise n'avait jamais pensé qu'un jour elle serait celle qui lui dirait ces paroles. Le fait qu'elle ne soit pas majeure était-il un si grand dilemme ? Au pire, comme si son cœur et sa personne n'avaient pas été suffisamment mis à l'épreuve, elle pouvait réessayer dans deux semaines.

Non, elle pouvait souffrir d'être rejetée qu'un certain nombre de fois. Elle n'était pas incassable et avait atteint sa limite.

****

Alors qu'est-ce que vous en avez pensé? Cette fois c'est LA déclaration. Une vrai de vrai et voilà qu'Adrien s'y oppose...

Sinon, Elise a définitivement du courage. N'est-ce pas?

Avez-vous déjà fait le premier pas? De manière subtile ou cache?

Si oui, j'espère que ça s'est bien passé pour vous mais quelque soit la réponse, positive ou négative, sachez que je vous admire.