Chapitre 7 - Partie 2

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Deux fois ! Deux soirs de suite qu'Elias me faisait peur de cette manière. C'était devenu son nouveau jeu ou quoi. Je glissais rapidement le journal et la photo sous mon oreiller avant de me redresser à genou sur mon matelas pour lui dire ma façon de penser. Il posa une main sur ma bouche pour m'en empêcher avant de pointer un doigt dans mon dos. Je me tournais pour tomber sur le visage endormi de Cora. Il avait trouvé la parade parfaite. Je ne lèverais jamais la voix si c'est pour la réveiller. Il se savait bien. Je me tournais de nouveau vers lui avec un regard assassin. Sauf qu'il ne regardait même pas mon visage. Son regard était dirigé plus bas. Je baissais les yeux avant de comprendre et de rougir. J'attrapais ma couverture pour couvrir mes jambes nues. Je frappais du plat de main son bras, la seule chose que je pouvais atteindre à cette hauteur. Il osa alors me faire un large sourire. Je plissais les yeux, je crois que j'avais enfin compris : il était suicidaire en réalité !

Il se pencha vers moi, mettant son visage au niveau de mon oreille.
- Habilles toi et viens avec moi, je veux te montrer quelque chose, murmura-t-il.
Je me laissais retomber sur mes fesses. Il pouvait courir. Il avait eu droit à une journée et c'était fini maintenant. Il s'installa alors sur le lit à son tour.
- Ou je reste là et on prend le risque de réveiller tout le monde.
S'il avait parler à voix basse, le son était tout de même plus fort qu'un murmure. Il me faisait carrément du chantage maintenant. Et ça marchait !
- Sors, j'arrive.
Hors de question de lui montrer une nouvelle fois ma culotte. Une fois la porte refermée sur lui, j'enfilais mon pantalon et un pull par dessus mon t-shirt.

Je le retrouvais adossé près de la porte, les bras croisé dans une posture qui faisait ressortir ses muscles nouvellement acquis. Je me concentrai sur son visage, m'interdisant ainsi de regarder d'autres parties de son corps.
- Tu voulais me montrer quoi ?
Un sourire espiègle se dessina sur son visage. Le même que celui de notre enfance, quand il avait une bêtise à me proposer. Il attrapa ma main.
- Je t'y emmenes ! S'exclama-t-il.
Je ne savais pas si c'était à cause de son sourire ou de son enthousiasme, mais je le laissais m'entraîner sans protester.

Il nous fit nous éloigner du camp pour se diriger vers des ruines, qui n'étaient pas hors limites bien sûr. Nous grimpâmes une petite colline. Tout en haut, il y avait les restes d'une vieille maison, mais il ne nous dirigea pas vers elle. Il nous fit faire le tour, avant de se stopper près de ce qui devait être un reste de mur.
- Oh !
Je venais de comprendre pourquoi il m'avait emmené ici. La vue était incomparable. On pouvait voir absolument tout le camp et au loin, les ruines d'une ville bien plus grande.

Elias serra davantage ma main dans la sienne.
- Je savais que tu aimerais.
Une part de moi me soufflait de retirer ma main, de ne pas le laisser gagner de nouveau ma confiance. Une autre voulait se laisser aller et profiter des moments qu'il m'offrait. Aucune des deux ne me satisfaisaient. Je cédais alors à une troisième voix, celle qui réclamait la vérité.
- Pourquoi t'es tu engagé ?
J'avais parlé d'une voix douce. Un ton que je n'employais plus beaucoup quand il s'agissait de lui. Pourtant je le vis se refermer et perdre son sourire. Il lâcha ma main et fuya mon regard. Il passa une main dans ses cheveux, ne me regardant toujours pas.
- Pourquoi est ce qu'il devrait y avoir une raison ? Répondit-il enfin
Je m'asseyais sur le mur, les yeux fixés sur l'horizon. Quelques instants plus tard, il s'installait près de moi à son tour.
- Lou...
Mais il ne termina pas sa phrase. Je sentais son regard sur moi mais m'empêchais de le regarder en retour. Je muselais cette part de moi qui voulait juste l'envoyer paître comme d'habitude. C'est d'une voix calme qui me surprenait moi-même que je repris.
- Tu dis vouloir me garder dans ta vie, mais tu n'es même pas capable de me dire la vérité. Tu connais tout mes secrets et toi tu sembles en garder plein.
Bon tout mes secrets sauf un.

Il gardait toujours le silence. Je poussais un long soupir.
- Je vais rentrer, lui dis-je en me levant.
Il suivit le mouvement.
- Je t'accompagne.
Je secouais la tête mais ne dis rien. Je commençais à en avoir marre de me battre avec lui.

Le trajet jusqu'à la chambre se fit en silence. Je n'avais plus rien à dire maintenant. Du moins pas tant qu'il n'était pas décidé à me dire ce qu'il avait. Je ne voulais même pas lui dire au revoir et me dirigeais sans un regard vers la porte. Je sentis alors une main encerclée mon poignet et me tirer en arrière. Quand je me retournais, sa deuxième main trouva son chemin sur ma nuque. Je sentis alors ses lèvres déposer un baiser sur ma joue. Je restais là, incapable de bouger, sentant les battements erratiques de mon cœur. Et aussi rapidement qu'il s'était approché de moi, il s'eloigna et disparut.

Il me fallut un temps pour retrouver mes esprits. Je crois que je n'y parviens réellement que quand je m'allongeais de nouveau sur mon matelas - non sans avoir enfiler un pyjama cette fois-ci -. En posant ma tête sur l'oreille je sentis le journal en dessous. Je le sortis doucement et attrapais ma lampe. Je tirais la couverture sur ma tête, allumais la lampe et l'ouvris. Je pensais relire les messages précédents de C.C. mais j'eus la surprise d'en trouver un nouveau. Pourtant en la lisant, il me semblait qu'il s'était écoulé plusieurs jours pour elle, alors que pour moi, il n'y avait que quelques heures. J'eus subitement envie de rire. Je discutais avec le passé et je m'étonnais du temps qui s'écoulait entre deux messages de sa part ? Si je voulais m'étonner, je devrais d'abord tenter de comprendre comment fonctionnait ce cahier.

Je me mordais la lèvre inférieur. Je comptais aller voir Ettie demain, pour la photo. Mais je voulais tellement lui répondre. Je regardais la photo qu'elle m'avait laisser et finalement je n'y tins plus.

C.C.

Sais-tu que pour il s'est écoulé à peine quelques heures entre mon précédent message et le tien ? Ce journal continue de me surprendre. Du coup j'ai hésité à te répondre tout de suite. Je voulais aller voir Ettie avant, trouver un moyen de prendre une photo pour toi, mais j'ai besoin de parler de ma soirée, de ses quelques heures qui sépare nos messages. Et il n'y qu'à toi que je peux le faire.

J'étais avec Elias. Il est venu me chercher en pleine nuit. Il disait qu'il voulait me montrer quelque chose. Je l'ai donc suivi. Il m'a fait grimpé en haut d'une colline, où il y avait une maison dans le passé. Ce doit être magnifique chez toi. Moi c'est de la vue que j'ai pu profiter. C'était magnifique. Du coup, j'ai pas pu me retenir, je lui ai demandé pourquoi il s'était engagé. Comme tu l'as toi même suggéré, même si je n'avais pas lu ton message, il faut croire que je devinais ton conseil d'avance. Sauf qu'il a refusé de me répondre... Au moins maintenant je sais qu'il me cache quelque chose, mais c'est peut-être pire pour moi de savoir qu'il refuse de me le dire.

J'adore la photo. Je dois me faire des films mais j'ai l'impression d'avoir le même menton que toi. J'espère vite pouvoir t'en montrer une aussi.

Le mot NASA me dit quelque chose mais je suis bien incapable de savoir quoi. Il faut dire que personne ne nous apprend ce genre de choses. On se forme tout seul. Les rares que nous avons sont là pour nous donner les bases mais même là c'est vite compliqué. Beaucoup de mes camarades savent à peine lire. Je sais que je le dois à Ettie de pouvoir t'écrire facilement.

En parlant d'Ettie, il me semble que son collier ressemble à ce que tu me décris. Je vérifierais tout à l'heure en allant la voir. Ce serait assez drôle de voir qu'elle porte un collier similaire à celui de la femme qui t'as laissé le journal.

Bon, je vais te laisser et enfin aller dormir. Avec un peu de chance la prochaine fois que je t'écrirais, j'aurais une photo pour toi.

À très vite.
Lou

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