Faible

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Je fonçais jusque chez moi. Je sentis les larmes me monter aux yeux. Après les avoir refoulé plusieurs fois avec la manche de mon pull, elles finirent par reprendre le dessus. Et cette fois-ci, je ne tentais pas de les arrêter. Ma respiration se faisait irrégulière. Je pleurais toutes les larmes de mon corps, hoquetant et tremblant. Pourquoi moi ? Que lui avais-je fait ? Pourquoi ne s'était-il pas contenté de voler mon goûter seulement, comme il le faisait aux autres enfants ? Etais-je vraiment voué à cela ? Etais-je vraiment voué à être sa victime, son bouc émissaire ? Tellement de questions se bousculaient dans ma tête. La frustration de ne trouver aucune réponse plausible à mon problème ne fit qu'augmenter le flux de larmes qui se déversaient sur mes joues. Je me levai pour rejoindre la salle de bain, mettre un coton d'eau froide sur mon œil.

Lorsque je me vis dans le miroir, je ne me reconnaissais plus. Mon œil droit était devenu énorme et rouge foncé, teinté de bleu par endroits. Ma mâchoire était recouverte d'un gigantesque hématome et ma joue était brûlée de mon œil gauche jusqu'au menton. J'utilisai la totalité des cotons de la salle de bain pour débarrasser mon œil du sang séché qui le recouvrait. J'entendis la poignée de la porte d'entrée se baisser et il entra. Mon père. Comment allais-je lui expliquer ?

J'entendis ses pas se diriger directement dans la salle de bain. Comment savait-il que je me trouvais ici ? Le pouvoir d'un père, je suppose : même s'il ne m'aime pas, il doit en être doté. « Némo qu'est-ce que tu fabriques dans la s... » Il s'interrompit en voyant mon sale visage, que j'essayais maintenant de cacher. « Tu t'es battu ? » continua-t-il sans chercher à cacher son étonnement. « Némo, explique-moi ce qu'il s'est passé. » finit-il par dire, la voix inquiète.

« C'est Bruce... On s'est battu sur le chemin pour rentrer du collège.

- Vous vous êtes battus ou IL t'a battu ? insista-t-il.

- Il m'a battu, me corrigeai-je.

- Je m'en doutais. Tu ne sais pas te défendre, Némo. Je ne sais plus quoi faire, tu es comme ta mère l'était : faible. »

Après avoir parlé de maman, le visage de mon père pâlit. Son regard, auparavant empli de compassion, laissa place à des yeux vides et perdus. 

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Suite : Maman? 2

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