Confiance

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Pour une raison inconnue, ce vieillard m'inspirait confiance. Son visage à l'allure poussiéreuse, ses rides recouvrant la moindre parcelle de sa peau, ses yeux noisette plissés, ses lèvres sèches, sa légère barbe blanche et le peu de cheveux qui lui restait sur le dessus de sa tête me semblaient familiers. Sa façon de se tenir, le dos courbé, sa voix et sa manière de s'exprimer ne m'étaient pas inconnus non plus. Il avait eu la gentillesse de nous prendre avec lui, je n'allais pas jouer la carte de la méfiance comme Coton me le suggérait, mais plutôt celle de la reconnaissance par le respect. Je n'allais pas lui mentir.

« Némo. Je m'appelle Némo. »

Les sourcils du vieil homme se haussèrent lorsqu'il entendit mon nom. Sa réponse ne se fit pas attendre :

« Oh ! Némo tu dis ? Je sais à qui tu m'fais penser maintenant... A un p'tit gars, je lui donnerai la dizaine, même pô. Il était venu à mon stand de tirs, à une p'tite fête foraine... Haha, fallait l'voir, l'petiot, il peinait à la soulever, sa carabine ! Il voulait gagner une p'luche... il-il était v'nu avec une copine, elle était marrante aussi, avec ses p'tites couettes noires et ses bagues aux dents... »

Il s'arrêta brusquement dans son récit, il semblait réfléchir à la suite de son histoire. Il se frappa le front à plusieurs reprises, s'efforçant de se rappeler :

« Dory ? demandai-je, son récit me semblant très familier.

- Ah oui ! Dory, c'est ça ! s'exclama-t-il à toute vitesse, comme s'il avait peur d'oublier à nouveau. Ils étaient rigolos, ces p'tits gamins là. J'm'en rappelle maintenant : la p'luche, c'était... c'était...

- Un poisson chirurgien, murmurai-je, n'y revenant pas.

- Haha c'est ça, c'était marrant, hein : Némo et Dory, qui veulent un poisson chirurgien ! (il fit une petite pause avant de reprendre) Alors c'est toi, le p'tit Némo du stand de carabine... Qu'est-ce qui t'amène à Toulon mon p'tit gars ?

- Je cherche Dory, justement... Elle a déménagé à Toulon il y a deux ans.

- Tu t'y prends un peu tard mon ami, ricana le vieillard. J'te dépose à Toulon, c'est tout c'que j'peux faire pour toi, j'suis désolé. Tu sais, nous les forains on est des p'tits routards, on passe par-ci, par-là, mais on s'arrête jamais !

- Quoi ? On s'arrête jamais ?! s'écria Gary à l'arrière, ensommeillé. »

Nous éclatâmes de rire, puis il se rendormit sans poser plus de questions : cette course poursuite avec le policier l'avait achevé.

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Suite : Bonne chance Némo

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