2. Le manoir.

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Les garçons venaient tous d'essayer de décoincer la porte. Enzo proposa même de l'enfoncer, mais personne n'accepta l'idée. Déjà que nous ne devrions pas être ici, autant ne pas donner un motif supplémentaire en cas de poursuites judiciaires. Nous choisîmes donc de contourner la bâtisse discrètement. Une vieille fenêtre au rez-de-chaussée attira notre attention. Des planches clouées à la façade barricadaient l'accès. Théo prit aussitôt les devants, bien décidé à entrer malgré les signes qui nous l'interdisaient. Marc et Enzo le rejoignirent pour détruire l'obstacle à coups de genoux. Des fissures apparurent sur le bois qui céda plus rapidement que prévu. Un ultime craquement libéra le passage.

Marc et Théo se penchèrent d'abord vers l'intérieur pour analyser les lieux. Enzo les bouscula et sauta dedans sans aucune vérification préalable. Si Lisa le trouvait très courageux, nous autres le voyons plutôt comme l'idiot du groupe. Il nous invita à franchir la fenêtre brisée après avoir lui même observé l'intérieur.

Je fus la dernière à traverser l'ouverture. Marc m'attrapa la main pour m'éviter une blessure. Entre les copeaux de bois fendus et le verre brisé, je préférais faire attention. Ma lampe torche illumina aussitôt l'intérieur. Mes yeux s'écarquillèrent à la vue de la superficie immense de la pièce. Tous les meubles demeuraient en place. Certains semblaient abîmés, d'autre enfouies sous une quantité phénoménale de poussière. Mais aucun n'avait été déplacé malgré tout ce temps. Un canapé en cuir déchiré trônait en plein milieu de ce qui devait être autrefois un salon. La cheminée imposante recouvrant une partie du mur du fond démontrait une certaine convivialité avant l'abandon. Il n'y avait cela dit aucun objet onéreux ici. Le reste n'était que babioles inutiles. Une table, une armoire, des vases, mais rien de valeur.

- Sympas l'ambiance. Ironisa Théo.

Les garçons pouffèrent de rire, mais Lisa et moi restions de marbre. Enzo s'aventura dans une pièce voisine, suivit par Marc et Lisa. Je collais Théo qui leur emboîtait le pas. Celle ci était ronde et destinée à l'intellect, ce qui manquait à Enzo. Une grande bibliothèque trônait sur l'ensemble des murs de la salle, regroupant sûrement des centaines d'ouvrages. J'eus de la peine pour la famille qui avait vécu ici autrefois. Pourquoi tous ces objets avaient été ainsi abandonnés ? Lisa saisit un livre au hasard sur l'étagère, puis souffla dessus pour y voir la couverture. Il s'agissait d'un livre d'horreur écrit par Stephen King.

- J'adore cet auteur ! S'exclama elle.

- T'as cas le prendre. Souriait Théo. Il ne servira plus à rien ici de toutes manières.

Elle s'empressa de le glisser dans son sac. J'étais au paradis ici avec tous ces livres. Je fis le tour des bouquins rapidement avant de remarquer l'absence d'Enzo. Il appréciait trop faire bande à part pour nous attendre.

- Il est passé où l'autre idiot ? Lançais-je exaspérée qu'il ne puisse pas rester en place deux minutes.

Ils remarquèrent seulement maintenant qu'il n'était plus là. Nous sortions en trombe de la bibliothèque, puis orientâmes nos torches dans les quatre coins de la maison. Aucune trace de lui. Nos lumières éclairaient finalement un escalier en bois qui montait vers le deuxième étage. Il ne pouvait qu'être là haut. Marc soupira en comprenant que nous allions monter.

Les marches craquaient sous nos pieds. Je n'avais pas confiance en ce bois pourri par le temps. Les grincements sinistres me terrorisaient. Comment avait-il pu monter ici sans se faire entendre ?
En haut, un étroit couloir s'offrait à nous. Il y avait deux portes fermées de chaque côté et une entrouverte au fond du couloir. Nous marchions vers celle ci d'un pas hésitant. Lisa agrippait fermement le bras de son copain.

Marc poussa doucement la porte qui s'ouvrit en grinçant. Sur la gauche, un vieux bureau regroupait une dizaine de papiers empilés dessus. Il s'agissait manifestement une pièce de travail. Un hublot au dessus de nos tête laissait passer la lumière de la lune. Cet endroit paraissait encore plus glauque qu'il ne l'était déjà.

Un grincement résonna sur notre droite. Lisa bondit de surprise. Nous orientâmes toutes nos torches vers l'endroit. Ce fut avec soulagement qu'Enzo fit son apparition. Il était de dos, regardant fixement le mur.

- Qu'est ce que tu fou là ?! Tu nous a fait flipper ! Chuchota Lisa comme si elle avait peur de déranger quelqu'un.

Il ne bougeait pas, restait de marbre.

- Qu'est ce que tu fais ? Demanda Théo.

Son comportement était étrange. Il ne parlait pas. Seul son t-shirt bleuté tremblait sous l'effet des courants d'airs.

- Ça va mec ? Intervint Marc. C'est pas drôle tu sais..

L'absence de mouvement énerva Théo qui lui attrapa l'épaule. Notre ami sursauta à la seconde où il sentit le contact.

- Hein.. Qu.. bégaya-il.

- Tu fais quoi ? S'impatienta Théo.

Son regard se posa sur le mur. Nos lampes se dirigèrent instinctivement vers l'endroit qu'il regardait. Lisa fit tomber son portable au sol en se retenant de crier. Mes mains rejoignirent ma bouche. Je me fis violence pour ne pas laisser mon estomac régurgiter le repas. Dans quelle merde nous étions-nous fourrés ?

Hantée.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant