12. Retour au manoir.

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La respiration haletante, je ne m'arrêtais pas de courir. Mon coeur battait la chamade, il menaçait de s'éteindre à chaque instant. J'aurais dû les écouter, et ne pas m'égarer d'eux ne serait ce que quelques secondes. Tout est identique dans cette maudite forêt, impossible de retrouver mon chemin. Depuis plusieurs minutes, seul mes jambes travaillaient. Je ne savais pas où j'allais, et ma batterie affichait 20%. Qu'est ce que je peux faire ? Je ne sais même pas si je cours vers la route ou vers le coeur de cette foutue forêt !

Les ronces m'éraflaient les mains, la sueur coulait le long de ma nuque durant cette course affolée. Chaque cailloux sous mes pieds s'enfonçaient dans la semelle amochée de mes chaussures, l'envie de crier me traversa l'esprit. Mais à quoi bon ? J'avais déjà crié deux fois sans obtenir de réponses. Il ne me restait que la course, seule dans les bois. Ma survie ne dépendait que de moi désormais.

Puis, au loin, une lueur scintillante. Par réflexe, ma trajectoire s'orienta vers l'éclat lumineux, qui grandissait au fur et à mesure que je m'en approchais. Plus j'avançais à travers ce dédale ronceux, plus ma peur grandissait. La lampe me bouffait toute la batterie, qui ne tiendra plus longtemps.

Des torches. Voilà d'où venait cette lumière. De part et d'autres du chemin rocailleux, sur chaque arbre, figurait une torche. Elles m'indiquaient le chemin à suivre, sans voir où il me menait. L'expérience me disait de ne pas suivre cette trajectoire, mais la peur de l'obscurité me forçait à y aller. "Suivre la lumière", je n'avais pas le choix. Lentement, je suivais le chemin de feu, en engouffrant mon visage glacé dans mon pull.

Des rires enfantins déchiraient l'air tout autour. J'étais observé de part et d'autres des bois. Des silhouettes transcendantes flottaient sur ma droite, le regard noirci tourné vers moi. Des femmes, des enfants, les mêmes qui nous sont apparu plus tôt. J'en ai ma claque de cet endroit !

J'accélérais le pas en m'efforçant de ne pas les regarder. Des veines noirâtres sortaient de leurs nuques, en
remontant jusqu'aux joues. La peur ne suffisait pas à décrire mon état actuel. J'étais tétanisée, terrorisée, un vrai cauchemar.

Mes jambes tremblantes accéléraient encore la cadence. Je me mis à courir de toutes mes forces, bravant ronces et rochers blessant. Les esprits me suivaient de plus en plus rapidement, mais aussi de plus en plus nombreux. Folle de rage, les larmes inondaient mon visage.
J'étais en colère contre le monde entier. À cause de cette idée à la con, nous sommes condamnés à pourrir dans cette forêt. Je les détestes !

Devant moi, les torches s'arrêtaient, j'étais enfin arrivée au bout de ce maudit chemin. Malheureusement, le pire restait à venir. Des voix résonnaient dans ma tête, jusqu'à me causer de violentes migraines.

«Tu vas mourir pour avoir profanée notre manoir»
«Nous allons t'égorger et te vider de ton sang !»

Le cauchemar ne fait que commencer. Devant moi, le manoir Mckeller se dessinait à la lisière des bois. Là où tout a commencé. Le chemin menant à la route était barrée par les démons flottant. Leurs regards sans vie me faisait frémir d'effroi.

Ils se rapprochaient tous en murmurant affreusement :

« On va te tuer.»

Je n'avais aucune issue possible à part le sordide manoir. Que faire ? M'engouffrer dans une maison hantée ou affronter une trentaine de fantôme avec des intentions meurtrières ? Avec un peu de chance, ils resteront dehors et me laisseront tranquille. C'est à l'intérieur que tout a commencé, et c'est là que ça se finira.

Je courrais à me rompre les rotules jusqu'à la porte, puis entrais sans problèmes. Le souffle hésitant, je zieutais pas la fenêtre barricadée les esprits désormais immobiles. Ils encerclaient la baraque sans bouger, le sourire en coin.

Puis, un craquement résonna derrière moi. Je fis volte face, le coeur palpitant, puis criais d'effroi. Une femme flottante, me foudroyait du regard. Elle tenait un bébé égorgé dans les bras, le sang dégoulinant par terre. Contrairement au fantôme, l'enfant semblait si réel.. des araignées noirâtres sortaient par la bouche du démon, puis rentraient à nouveau par l'oreille. Ses vêtements déchirés indiquaient un lourd passé meurtri.

Lentement, sa main cadavéreuse se dressa vers moi, puis sa tête prit un angle à 90 degrés. Un haut le cœur m'envahit, et le vomis me monta à la gorge en voyant les araignées déguerpir de la plaie mortelle autour de sa nuque.

« Amie du démon »
« Tu vas mourir »

Cette nouvelle voix, plus rauque, provenait de la droite. Deux hommes au crâne fracassé par une balle passèrent l'arcade de la porte. Ils avançaient dangereusement vers moi, puis s'arrêtèrent à moins d'un mètre.

Mes genoux s'entrechoquaient face à cet immonde spectacle.

- Que me voulez vous ?! Implorais je en haussant la voix.

Ils répondirent en coeur d'une voix mortuaire :

« Amie du démon, tu mourras en dernière »

Une larme dégoulina de ma joue, puis roula jusqu'au sol.

Au même moment, des pleurs enfantins surgir de l'obscurité. Ce fut la femme qui réagit la première.

« Bébé doit manger »

Puis elle disparut comme si de rien était, laissant une grande tâche de sang par terre. Cet enfant n'était pas un esprit..

Soudain, une porte claqua à l'étage, et des bruits de pas faisaient craquer le vieux plancher.

Le regard glacial des deux esprits à la tête éclatée prirent un air effrayé.

« Il arrive ! Ne restons pas là »

En quelques secondes, j'étais seule avec les bruits de pas qui approchaient dangereusement. Une marche par une, une silhouette humaine descendait.

- C'est stupide de vouloir m'emmener chez un prêtre.

La voix inhumaine de celui qui était autrefois mon ami déchira l'air. J'étais tétanisée, incapable de bouger.

- Tu n'aurais jamais dû te mêler de ça. Je lis en vous comme dans un livre. Je sais exactement tout ce que vous avez en tête. Bande d'insolents !

Un chandelier auparavant posé sur la table s'écrasa contre le mur, et se brisa en milieu de fragments de verre.

Son visage apparut devant moi.

- Tu n'aurais jamais dû venir ici.

Ses deux mains se resserraient violemment autour de mon cou. L'air s'arrêta immédiatement de passer dans ma trachée.

- Arrête.. balbutiais je. C'est moi.. je ne suis pas ton ennemie..

- Il ne t'entend plus petite sotte !

Les larmes inondaient mon visage désormais violet. L'air me manquait atrocement et ma vue se troublait. Lentement mes yeux se fermaient, c'était la fin. Mourir des mains de son propre ami..

Mes paupières se baissaient, les yeux sombres de ce démon furent la dernière chose que je vis dans ce monde.

Hantée.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant