~ Chapitre 55

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Nate :

Il faut que je fasse quelque chose parce sinon je fais péter une pile et je risque de gâcher cette farce de mariage.

Bon, ce n'est pas vraiment une farce, June a vraiment l'air amoureuse et mon ... beau-frère, eh bien, j'aurai pu avoir pire. Mais avoir Victoria comme ça en face de moi, c'est pire qu'être au bûcher.

Pendant des mois je me suis préparé à cette confrontation, j'ai imaginé dans les moindres détails nos retrouvailles, j'avais même prévu ce que je pourrais lui dire, j'avais imaginé comment j'allais amorcer la conversation, mais au final, quand je l'ai vu en chair et en os, ça a été le blanc total. Je ne savais plus ni quoi dire, ni quoi faire, ni comment me comporter et en la voyant, plus belle que jamais, j'ai eu peur.

Comme un gosse de cinq ans, j'ai joué le celui qui ne la voyait pas, alors qu'elle éclipsait pourtant tout le reste. Il y a des choses dans la vie qui ne changent pas, comme le fait que je sois lâche quand il s'agit de cette fille qui a volé mon cœur il y a quelques années.

Enfin, elle ne l'a pas volé. Elle a réparé cette merde qui ne fonctionnait pas bien, et ensuite elle s'en est occupée. Elle a tout fait pour que ma vie reparte sur les rails pendant que moi je la bousillais et la fatiguait à petit feu. Je lui ai volé son innocence et j'ai écrasé sa confiance sous la semelle de ma chaussure sans penser un instant aux conséquences.

Pendant que June et Andrew sont en train de faire leur ouverture de bal mielleuse à souhait, j'observe Victoria de tout mon saoul car elle est tournée en direction de la scène ou les deux mariés dansent. Son regard est perdu dans le vide et je me demande à quoi elle pense. Clairement pas à la scène qui est en train de se jouer devant nous, ça c'est sûr.

Il y a tellement de choses que j'aimerai lui dire.

J'aimerai lui parler du nouveau boulot que j'effectue à la criminelle, après avoir galéré à obtenir mon diplôme, j'aimerai lui parler de Henri, de la façon dont ce petit garçon me rend meilleur même si comme tous les petits garçons de deux ans il est casse-couille bien sûr, j'aimerai lui parler des coups de fil que j'ai régulièrement donné à mon père ces deux dernières années et je voudrais lui parler du Noël que j'ai passé dans le Montana l'année dernière. Lui et moi n'aurons probablement jamais cette relation père-fils, mais on s'y essaye et par moment ça marche plus ou moins. J'arrive à rester au téléphone avec lui environ 5 minutes, avant qu'on n'ait plus rien à se dire. Mais en soi, c'est un véritable changement.

J'aimerai vraiment qu'elle voit toutes les choses que j'ai faites pour elle, tous les changements qui se sont opérées en moi. Je ne serai jamais le garçon parfait qu'elle exige, mais je m'en rapproche un peu plus chaque jour et même si je ne serai jamais assez bien pour elle, même si je sais que je ne serai jamais à la hauteur, je veux qu'elle sache qu'elle représente tout pour moi. Ça ne changera jamais.

Une fois la chanson pourrie terminée, quelques personnes se dirigent timidement vers la piste de danse et je me lève brusquement, ajustant au passage mon costume qui me gratte et me serre trop et je fais le tour de la table. Si je n'y vais pas, on ne va jamais y arriver.

Lorsque je me retrouve planté devant Victoria, j'ai les mains qui deviennent moites et je les essuie discrètement sur ma veste. Ce n'est vraiment pas le moment que je me mette à transpirer comme un gros porc !

Les yeux de Victoria sont deux véritables soucoupes, et elle me dévisage comme si elle n'y croyait pas du tout. Je lui offre ma main sans dire un mot et je me dis que si elle a l'attention de me lancer un vent, ce sera probablement la pire honte de toute ma vie.

Manibus Retorta IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant