L'obstacle

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Se plaquant sans bruit au fourgon, Sora avança vers l'avant du véhicule. Son cœur battait à une fréquence légèrement trop rapide, et ses mains étaient moites. L'air était étrangement doux, malgré le matin frais d'il y a quelques heures. Des odeurs inconnues assaillirent Sora tandis qu'il essayait de se concentrer pour ne pas faire de bruit.

Un frémissement le parcourut alors qu'il se penchait vers le devant du véhicule. Rien, le capot enfoncé fumait dans le vide.

Immobile comme une statue, Sora fit le vide dans sa tête et supprima la moindre trace de peur de son corps. À droite et à gauche, rien non plus. Il se retourna lentement, mais toujours nulle trace de ce qui avait fait ce trou.
L'air sembla soudain frémir. L'instinct qui, quoi qu'on dise, habite les Hommes, le fit lever la tête.
Yeux rouges, grandes plumes d'un noir de jais, un immense oiseau le fixait, en vol stationnaire juste au dessus de sa tête. Un oiseau? Comment avait-il pu percuter le véhicule sans le faire exprès? Et même, comment pouvait-il avoir seulement quelques plumes de travers après avoir enfoncé le capot d'un véhicule?

Une sueur glacée se rependit dans le dos de l'enfant et il ressera sa prise sur son arme qui ressemblait davantage à un jouet désormais. Un long échange de regard s'ensuivit, aucun des deux ne bougeant, ne serait-ce que d'un millimètre. Sora avait la terrible impression de soutenir le regard d'un humain. Au moins, il était fixé: le gouvernement avait raison. Des animaux fous et dangereux habitaient la Terre hors de la ville.

Un sifflement suraigu se fit entendre. L'oiseau avait ouvert son bec imposant pour lancer un cri qui ne laissait rien présager de bon. Sora recula lentement mais une pression sur son épaule le fit s'arrêter. Sans avoir besoin de se retourner, il savait que c'était Sara. Un étrange soulagement l'envahit mais il le repoussa aussitôt: rien n'était gagné. Et pourquoi ferait-il confiance à quelqu'un d'autre qu'à lui-même ?

Malgré tout ce qu'il aurait pu penser, cette présence lui avait redonné confiance. Les yeux rouges lui semblaient moins brillants, moins intelligents. D'un mouvement vif, il visa la gorge de l'animal qui avait commis l'erreur de rester en vol stationnaire au dessus de lui. L'oiseau s'écrasa, mort, en une masse informe de plumes et de sang.

Patientant quelques instants, il remercia intérieurement Sara de ne pas intervenir. Ça prouvait aussi qu'elle n'était pas débutante en survie. Elle savait que rien n'était encore fini.
Le petit garçon s'approcha lentement de l'oiseau et le retourna d'un coup de pied. En voyant le voile posé sur ces yeux, il ne douta plus de la mort de l'animal et il retira son couteau, insensible au bruit de sucion qui se fit entendre. Il se retourna vers Sara. Il était inquiet: et si le cri étrange qu'avait poussé l'oiseau appelait du renfort?

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