CHAPITRE 11

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Neuf heures du matin sonnaient le glas. Le chef du commissariat de Rodez arrivait dans les locaux. En bon leader, il était de ceux qui montrent l'exemple et il arrivait à son fief toujours à des heures matinales. Rien que pour ça, il avait gagné le respect de toute la brigade. En effet ses prédécesseurs étaient plutôt du genre à s'aménager des plages horaires de complaisance. Il y avait tout le temps une espèce d'effervescence au commissariat. On aurait dit une fourmilière constamment sur le pied de guerre. Il dirigeait ses pas aux travers des couloirs, en direction du bureau de son second, Paul Texier. C'était de loin son homme de confiance. Il était, au fil des années, devenu bien plus qu'un bras sur qui l'on peut compter, ou une espèce de vizir aspirant à devenir calife à la place du calife. Homme au-dessus de tout ça. C'était un véritable ami. C'était une chose rare et remarquable. Marc savait que les sourires de bien des autres membres de son personnel, toutes leurs formes de politesses, et autres courbettes du genre, ne voyaient leurs existences que pour faire bonne figure. S'il n'y avait pas eu ce rapport hiérarchique, se seraient-ils comportés ainsi, sans doute non. Mais il ne les blâmait pas pour avoir les dents longues, et appréciait d'autant plus cette amitié désintéressée de Paul.

- Salut Paul, comment ça va ?

Les deux hommes échangèrent une poignée de main solide.

- Salut chef, bien et toi ?

Tous les bureaux des commissaires semblaient avoir été conçus sur un modèle unique. C'était déprimant de voir les machines archaïques qui leur servaient d'ordinateur. Décemment, toutes personnes saines d'esprits auraient catégoriquement refusées d'avoir un tel objet chez lui.

- Ça va. J'ai une affaire sur le feu, je veux que tu t'en charge, et que tu laisses provisoirement toutes celles que tu as en cours, ou tu les refiles. Je veux que tu prennes avec toi la stagiaire, comment elle s'appelle déjà ?

- Lucie.

- Ah oui c'est vrai. Je veux que tu la prennes avec toi sur cette enquête, ça lui fera les dents. Autre chose, t'as quelqu'un sous la main de pas trop occupé, pour un boulot de recherche à la con ?

- Bernard. Je pense qu'il tourne un peu en rond ces derniers temps, un peu d'occupation ça lui fera pas de mal, le bougre.

- Ok ça roule. Je veux vous voir tous les trois d'ici une demi-heure dans mon bureau.

- Ça faisait longtemps que je t'avais pas vu avec une telle flamme, et ce regard dans tes yeux... ça vient de ta source cette affaire ?

- On peut rien te cacher à toi.

- Putain c'est du lourd alors ! Dans une demi-heure dans ton bureau, ok.

Marc alla prendre position à son poste. Au préalable il écouta le débriefing de sa secrétaire sur les courriers arrivés importants à traiter. Puis il laissa à ses bons soins de lui faire quelques photocopies, et bien évidement de lui ramener son habituel café. Trente minutes plus tard, Paul se présentait dans son enceinte accompagné de la jeune stagiaire Lucie, qui aspirait à un poste de commissaire. Sa posture timide d'une fraiche écolière à peine sortie des bancs trahissait son manque cruel d'expérience. En dernière position, il y avait Bernard, un policier qui arborait fièrement la fameuse moustache des hommes en uniforme bleu. Ses cheveux avaient depuis longtemps tournés poivre-sel. C'était un homme qui approchait à grand pas de sa fin de carrière, sans aucune ombre à son actif.

- Tout d'abord, bonjour à ceux que je n'ai pas vu aujourd'hui, Lucie, Bernard, il les salua d'une poignée de main généreuse. Paul, je sais que tu vas m'en vouloir de te demander ça, mais il va falloir que tu te rendes à Marseille, au centre de la police scientifique, pour quelques jours à mon avis. Je veux que tu emmènes avec toi la stagiaire... pardon, Lucie, excusez-moi.

les rêves de LolaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant