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La discussion assez vive avait entrainé plusieurs personnes dans le débat. L'une d'elle s'avérait être l'homme qui avait essayé de me tuer. Il s'appelait Lincoln. Et avec lui, nous nous demandions ce qu'il était judicieux de faire. Michael n'admettait pas ma position sur le sujet. La seule divergence qui nous éloignait tous les deux.

—Au départ, nous devions prendre le contrôle du train ! argua Michael qui agitait vivement les bras. Il n'y a rien qui change si ce n'est que nous le stopperons nous-même. On doit le faire. Qui sait ce que manigance Shruger.

—Si on tente le coup, et qu'elle a raison au sujet du réchauffement, reprit Lincoln, nous risquerions d'y passer et pour rien. En ce cas, il serait mieux d'attendre.

Il parut de toutes évidences d'accord avec mon plan. Ce fut également le cas de Rosa, une femme hispanique qui avait appris la langue après notre démarrage. Du haut de son mètre soixante dix, et ses yeux marrons, cette fille d'apparence timide n'hésitait jamais à se montrer quand il s'agissait de donner son opinion. Malheureusement, elle ne parlait jamais beaucoup.

—Alors que si nous attendons et prenons notre mal en patience... commença-t-elle, nous reverrons sans doute le monde extérieur. C'est perturbant comme situation mais...

—Auquel cas, ils auront toujours leurs armes et ils auront le champ libre pour nous abattre et augmenter leur chance de survie, attaqua Michael nerveux.

Un point de vue qui se défendait et avec lequel j'étais aussi d'accord. C'était pour cela que j'avais besoin de leur aide. Je ne parvenais pas à me décider. Mais plus les minutes passaient, plus je finis par me dire que cette arche serait notre tombeau. Même si nous sortions, nous ne pourrions aller nulle part. Il faudrait tout reconstruire.

Et qui aurait assez de tête pour mener tout le monde ?

—Il faudra quand même faire un choix ! s'exclama soudain une voix dans mon dos.

Une voix que je n'avais plus entendu depuis cinq ans.

—Jason ! murmurai-je avant de me lever et de pivoter sur moi-même.

Nos regards se croisèrent et se défièrent longuement. A l'intérieur, j'y vis de la colère et de la frustration. Malgré nos conflits, cela me fit un bien fou. J'aurais aimé qu'il nous pardonne, mais il était plus buté que moi.

—On ne peut pas vivre définitivement de cette manière, continua-t-il.

Il ne bougea pas, et continua son manège. Lorsque ses yeux se tournèrent vers Michael, sa colère redoubla d'intensité.

—Je suis d'accord petit ! approuva Lincoln, mais ce qui parait être une bonne chose, n'est pas forcément la meilleure. Il faut penser à tout le monde. L'avant du train y comprit.

Cette idée en revanche, me déplaisait. Leur idée de départ avait été de nous laisser crever de faim. Pourquoi les aider ?

Lincoln eut la réponse à ma question.

—C'est Shruger qui a décidé cela tout seul. Vous croyez que les passagers de l'avant connaisse notre existence ?

Eux seuls le savaient.

—Non, ou peut-être que oui, répondit Lincoln, qui sait. Mais c'est leur argent qui a financé l'arche. C'est grâce à eux, si nous sommes là... Peu importe comment ça s'est passé au départ, cette arche est aussi prévue pour nous.

Lincoln nous dévisagea tour à tour, et chercha à connaître notre opinion sur la question.

—C'est vrai... lança Jason pensif. Mais croyez-vous qu'ils auraient pensé à donner quelque fois leur part ? Ils se gavent. Nous crevons de faim. Moi, je dis que nous devons prendre le contrôle du train. Ça ne veut pas dire l'arrêter ou tous nous faire tuer, mais nous devons passer maitre.

La volonté d'un suicidaire, ou d'un fou...

—Et tu as un plan ? demandai-je perplexe à l'idée de le suivre.

Seuls la haine et la rancœur le faisaient parler... Non la logique. Il voulait en finir probablement, mais pas tout seul. A moins que je ne me trompe.

—J'ai une idée en tout cas, c'est toujours ça.

—On peut savoir ce que c'est ? s'intéressa Lincoln dont les sourcils s'élevèrent aussi rapidement que sa curiosité.

—Si on chope les armes des gardes, on peut avancer sans problème.

Il croyait son idée infaillible ? Lincoln restait sceptique. Quant à Michael, impossible de dire quand il se manifesterait. Depuis que Jason était réapparu, celui-ci était resté très calme. La prochaine fois, je saurais quelle méthode utiliser.

—Il risque d'y avoir des pertes si on s'y prend mal... lança Rosa perdue et peu encline à tenter le coup.

Tout le monde parut tout à coup changer d'avis, ce qui ne ravit pas les deux garçons.

—Oui, et nous n'aurions plus de munitions...

—Sans compter que la porte numéro un ne s'ouvre que de leur côté, continuai-je. Il y a un garde derrière chacune d'elle. Pour que ton plan marche, il faut passer toutes les portes d'un coup. Autrement, nous serions bloqués. Si elles ne sont pas ouvertes, ça ne sert à rien.

—Bonne idée, signa enfin Michael que je croyais perdu à jamais.

—Oui, c'est vrai, on a qu'à faire ça, approuva Jason satisfait.

Un sourire sur son visage me fit penser que c'était gagné, et qu'il reviendrait avec nous, sans pour autant effacer toute sa rancune.

—Partons là-dessus... s'exclama Lincoln qui se leva d'un bond.

Il se frotta les mains, satisfait. Il eut l'air d'un gros ours en mal de câlins.

—C'est impossible... dis-je alors en brisant tous leurs espoirs.

Pour l'avoir maintes fois observés, je ne pouvais leur donner de fausses joies. Les quatre portes ne s'ouvraient jamais toutes en même temps. Il était donc impossible de remonter le train de cette façon. Nous serions bloqués dès le début de notre révolte. Nous le payerions très cher.

A l'annonce de cette nouvelle, tout le monde se mit à me maudire.

—Alors pourquoi nous en avoir parlé ?

Tous attendirent une réponse de ma part. Mais je n'en fis rien. Je laissai mes amis en pleine conversations avant de partir. Certains se demandaient ce qui m'arrivaient, tandis que d'autres se fichaient de mon opinion.

Je ne prendrais pas part à cette rébellion. Ils ne le comprenaient pas encore.

Le Dernier RemèdeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant