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            Ma joie revint au galop et élimina toute la gêne que nous ressentions. Les choses étaient loin d'être gagnées et Riley ne manqua pas à sa parole, et m'emmena illico sur place.

Le trajet s'avéra interminable, tant mon excitation était à son comble. Comme la dernière fois, une drôle d'odeur aseptisée me surpris une fois que nous eûmes passé la porte verrouillée. Il se pouvait que ma chambre ait été juste à côté de la sienne, mais Riley réfuta aussitôt.

—Non, il était beaucoup plus loin.

Quatre chambres exactement. Quatre chambres plus loin, et une fois devant, mon cœur s'emballa comme jamais.

Primo, je ne devais pas être là, et si Carlton l'apprenait, Riley et moi le payerions très cher.

Deuxio, j'ignorais comment je réagirais lorsque je découvrirais la dite personne. No dans quel état je verrais. Inquiète, je n'osai pas faire un pas de plus, et attendis que mon courage me revienne.

Dans quelques secondes, j'aurais enfin cette réponse que je cherchais depuis longtemps. Ça changeait forcément la donne.

—Prête ? me demanda Riley qui posa la main sur la poignée.

Il attendit une réponse que je ne pus lui donner. J'étais comme bloquée.

—On y va ! dis-je après plusieurs minutes de réflexion.

Riley s'exécuta doucement, m'ouvrit la porte, et par galanterie, me laissa passer en premier.

A l'intérieur, une faible lumière éclairait les lieux, et nous permit d'apercevoir un lit sur lequel reposait un jeune homme méconnaissable. Il dormait, récupérant sûrement des forces pour se remettre du déraillement du train qui l'avait défiguré à vie. Il m'était impossible de reconnaître mon ami d'enfance.

Je pus tout de même faire quelques déductions, malgré mes nausées naissantes. Ses cheveux étaient noirs. Et il parut avoir la même taille. Endormi pour le moment, je ne pus voir la couleur de ses yeux, mais n'hésitai pas à m'en approcher pour m'en faire une idée. Et si je patientais, peut-être qu'il se réveillerait ? Peut-être même qu'il me reconnaîtrait ?

Ce fut assez difficile de ne pas fuir en courant quand la vie avait ravagé le corps d'un proche. Les séquelles définitives rongeaient sa peau, tiraient ses traits, et laissaient des rougeurs qui ne disparaitraient sûrement jamais. Le feu... Le pire des maux.

—Il a été gravement brûlé, et il a fait une grave infection qu'on ne parvient pas à soigner. C'est un miracle qu'il soit encore en vie, mais il n'en a plus pour longtemps. Est-ce lui ?

J'en eus l'impression, sans pouvoir le confirmer. Si je pouvais faire accélérer les choses...

—Je n'en suis pas certaine, bredouillai-je alors que je me retenais de pleurer.

Mon intuition me confirmait bien qu'il s'agissait de Jason pourtant. Pourquoi c'étaient toujours compliqué ?

—Je comprends, mais tu ne pourras pas rester ici...

—Oui, je peux attendre de voir s'il se réveille ? espérai-je avec un sourire.

Le supposé Jason remua doucement, et m'interpella. A le voir se débattre, je pus confirmer qu'il souffrait atrocement, et que personne ne pourrait vraiment le soulager. Je m'approchai tout de même, dégoûtée de le trouver dans cet état, et prêtai oreille à son discours à peine compréhensible.

—C'est moi ! Alanah ! me présentai-je alors que je ne comprenais absolument rien de ce qu'il disait.

Riley s'approcha également, et s'inquiéta plutôt de l'état du patient. Pour lui, il n'y avait rien de plus important pour l'instant.

—C'est sûrement un peu tôt, déclara Riley déçu et désolé.

—Al... marmonna difficilement le malade.

Se pouvait-il que ce soit vraiment lui ? Peut-être que je me faisais une fausse joie ? Comment pouvait-on se faire une joie de découvrir quelqu'un dans un état pareil.

Déterminée, j'approchai une nouvelle fois mon oreille et écoutai avec une grande attention. Je ne voulais surtout pas qu'il ait l'impression d'être seul au monde.

—... Jas... maugréa-t-il d'une voix rauque et cassée.

—Jason ? C'est toi ? m'enquerrai-je.

Il hocha imperceptiblement la tête en signe d'affirmation. Lentement mais sûrement. Ce simple geste semblait lui donner la pire douleur qui soit. Comment pouvait-il être encore en vie s'il souffrait autant ?

Le Dernier RemèdeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant