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Assise dans un coin calme de l'arche, je m'efforçais toujours de méditer sur la question. Ce problème ne cessait de m'envahir depuis le début et pour une fois, je n'eus pas honte de me dire que j'en avais marre d'y penser. Je ne voulais plus avoir affaire avec tout cela.

—Alanah ! m'interpella alors la voix de Jason.

Une scène lointaine m'apparut. J'avais l'impression de le retrouver, et au fond de moi, je savais qu'il ne reviendrait jamais totalement, pas tant que Michael et moi serions ensemble.

—Mon frère s'inquiète de ne plus te voir, continua-t-il alors que je gardais le silence.

Je le regardai fixement, jusqu'à jauger ses intentions. Son visage impassible ne me permit pas d'y distinguer quoi que ce soit.

—Je n'ai pas l'intention de faire l'impasse sur ce qui s'est passé. Je veux juste sortir de là.

—Tu te sers de nous ? demandai-je. Tu sais, vu le contexte, t'es vraiment con de nous faire la tête pour des conneries pareilles. Autrefois, tu m'as fait la morale. Tu disais qu'il fallait se serrer les coudes au lieu de se détester.

Des mots qui dépassèrent ma pensée et pour lesquelles je ne m'excuserais pas. De toute façon, il s'en fichait bien. Pourquoi le raisonner ? Ce ne serait qu'une perte de temps.

—Peut-être... dit-il simplement. En attendant, tu dois nous aider. Déjà, c'est impossible de comprendre Michael. Il faut un interprète.

Je ne servais qu'à ça. Exaspérant. Il n'avait qu'à se débrouiller. Je n'étais pas la bonne ç tout faire.

—Sans toi, personne ne sera motivé.

—Arrêtes de dire n'importe quoi, crachai-je.

Enervée, je me levai vivement dans l'espoir de l'abandonner. Mais ce fut sans compter sur son acharnement à me casser les pieds. En quelques secondes, il revint à la charge et prétexta que j'étais la seule capable de tous le réunir.

—Stop ! criai-je. Si tu avais voulu tenter quoi que ce soit, tu l'aurais fait. Tu n'as pas besoin de moi.

—Seul. C'est impossible.

—Evidemment, il nous faut tout le monde ! Mais si nous ne sommes pas capable de nous entendre ton frère, toi et moi, alors comment pourrions nous lever une révolte pour prendre le contrôle du train ?

Une question auquel il ne répondit pas. Trop obnubilé par la colère croissante, le jeune homme me fixa silencieusement et me laisser brailler toute seule un tas d'inepties. Dans de rares moment, j'avais l'impression que la folie me guettait. Et elle me tomberait sûrement dessus prochainement.

—Oui, tu as raison, admit-il simplement après plusieurs minutes. C'est mieux de crever tous ensemble.

—Ne dis pas de conneries ! le réprimandai-je. Je n'ai jamais dit ça.

—Tu crois que ce n'est pas ce qui nous attend, grogna-t-il le visage à quelques centimètres du mien. Tu crois aux contes de fées qui nous donne à tous une fin heureuse ? Il n'y aura pas de fin heureuse.

Son souffle me parvint jusque dans les narines. Mon cœur battit à tout rompre dans ma poitrine et craignit un acte malveillant de sa part. Là, à cet instant précis, je ne savais plus sur quel pied danser.

Quitte à crever la bouche ouverte, autant tenter le diable, non ?

Pourtant, je me ravisai. Pourquoi tenter un truc impossible en apparence ? Nous avions largement le temps de réfléchir. Il ne me ferait pas faire de faux pas, quoi qu'il en dise.

Là, la bouche close, je me contentai de l'affronter aussi longtemps que possible. Je refusais d'abandonner et de le laisser gagner aussi facilement. Il nous avait laissé pendant cinq ans. Maintenant, il fallait l'accueillir gentiment, tout en respectant ses conditions. Non, même pour tout l'or du monde.

—Faites ce que bon vous semble, finis-je par dire. Mais se sera sans moi.

Je le quittai tranquillement, alors que je pensais la conversation finie. Mais Jason me donna très rapidement tort.

—Où est passé l'Alanah que j'ai connue ? Celle qui se battait...

Je m'arrêtai, surprise par sa question, sans me retourner, je lui répondis quelques mots qui eurent pour but de le blesser.

—Tu ne la verras plus jamais. Elle est morte le jour où elle est entrée dans ce train.

—Je te connais par cœur. Tu n'es pas du genre à laisser tomber.

—Apparemment si. Trouve un plan infaillible, et je te suivrai sans problème, dis-je alors que je pivotais lentement pour le regarder dans les yeux. Mais il va falloir mesurer chaque étape, ainsi que chaque conséquence. Inutile de prendre des risques. Je ne foncerai pas vers une mort certaine sans savoir ce qu'elle apportera ou non.

— ça ne servira à rien et tu le sais, acheva-t-il.

Un silence survint, et nous nous défiâmes du regard. Lui aussi n'était plus le même qu'autrefois. Tant de choses avaient changée. Ça me fendait le cœur.

—J'ai compris, finit-il par dire tout simplement. Je n'y arriverai pas seul.

—Je n'ai jamais dit que tu le serais, juste que je ne ferais rien.

Le Dernier RemèdeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant