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Alors que j'étais en cuisine le lendemain, mon esprit, perdu dans le brouillard de la réflexion, ne parvenait pas à se concentrer sur quoi que ce soit. Et Juanita n'eut de cesse de me rappeler à l'ordre que ce soit gentiment ou méchamment.

—Désolée, dis-je encore une fois pour la calmer, en vain.

Je relevai les yeux subitement et crut voir la porte se refermer, alors que personne ne l'avait empruntée. Perplexe, je décidai d'ailler vérifier, malgré les jérémiades de ma camarade. Il fallait que je sache qui était passé par là, afin de satisfaire ma curiosité.

Je suivis donc le mouvement, et sortis aussi rapidement que possible. Au détour d'un couloir je pus remarquer la silhouette d'un homme qui boitait. Mais rien d'autre. D'ailleurs, après un simple clignement d'œil, celui-ci avait tout bonnement disparu. Je ne me souvenais pas l'avoir déjà vu avant. Et après cela, je crus à un mauvais tour de mon imagination.

Que voulait-il ? Était-il l'un des deux survivants encore dans le coma ? Il n'y avait que cette solution d'envisageable. Mais pourquoi Riley ne m'en avait-il pas parlé ? C'était plutôt bizarre non ? Il n'avait pas pu sortir du coma et remarcher en une journée ! Riley connaîtrait la réponse à cette question. Néanmoins, il me serait difficile de mettre le sujet sur la table après ce qui s'était passé entre nous. C'était déjà assez tendu comme ça.

****

Riley m'attendit comme à son habitude, au milieu du grand hall de rassemblement et ce coup-ci, pas de conversation surprise entre Carlton et lui. En revanche, aucun de nous deux fut très à l'aise. Inutile de passer par quatre chemins pour renouer le contact, mais un minimum de politesse restait à envisager.

— ça va ? me demanda-t-il.

—Oui, très bien, mais tout est relatif.

—Bien, excuse-moi ! J'ai passé la nuit à repenser à ta demande et ça me rendait malade.

—C'est rien !

—J'insiste, j'étais mal.

Malade dans quel sens ? L'air désolé, Riley me supplia de le pardonner et d'oublier ce qui s'était passé. Il me promit également que ça n'arriverait plus, mais je ne préférai ne pas y croire. Toutes les promesses finissaient par être bafouées.

—Ok, dis-je tout de même. Merci.

Il ôtait les mots de ma bouche, à tel point que j'en oubliais mon sujet principal. Le jeune homme qui m'avait surprise en cuisine. Et plus les minutes passèrent, plus j'abandonnai l'idée de le lui dire. Devant mon silence plutôt insistant, Riley paniqua.

—Tu sais, c'est très...

—Quoi ? Très quoi ? demandai-je.

—Nous deux... La fois .... C'était bien. Et depuis je ne cesse de me dire...

—... ça ne signifiait rien, coupai-je anxieuse. On en avait parlé, et je ne voulais surtout pas que l'on remette ça sur le tapis. Pas encore.

Mal à l'aise, je tremblai et me demandai comment cette discussion se terminerait. Riley était un très bon ami depuis plusieurs semaines. Loyal. Quelqu'un sur qui je pouvais compter. Et dont je ne parviendrais pas à m'éloigner.

Cette conversation parvint pourtant à occulter toute cette facette de lui en une seconde. Inutile de dire que j'étais anxieuse, paniquée...

—Tu sais comment je suis. Je n'abandonne jamais, me lança-t-il. Je suis un peu comme toi.

Affolée, je le quittai et fis semblant de ne pas l'entendre me suivre dans le but de couper court au drame qui me tomberait prochainement dessus. Mon but n'était pas que de fuir mes sentiments, mais aussi Riley. Mais Riley était un guerrier. Il n'abandonnait jamais. Il venait de le dire et je m'attendais au pire. Alors qu'il me talonnait de près, le jeune homme me lança ;

—J'ai des sentiments pour toi ! ça, tu ne peux pas me dire de les oublier !

Je m'arrêtai net, au milieu du couloir et me rendis compte qu'il se trouvait plus près que je ne l'imaginais. Finalement, j'avais déniché un très bon rival. Têtu. Qui finissait par avoir ce qu'il voulait.

—Tu t'attendais à quoi en me disant ça ? voulus-je savoir après avoir fait volte face.

Nous nous affrontâmes longuement et cherchâmes ce qu'il était convenu de faire. J'ignorais la réponse. Lui aussi. Si bien que nous restâmes bloqués. Du coup, aucun de nous ne bougea de peur de monter sa plus grande faiblesse. Comme un concours de fierté... Comme si la vie avait décidé de suspendre le court de notre vie plusieurs minutes d'affilées.

Le Dernier RemèdeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant