Chapitre 10

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Nous marchâmes dans la forêt pour éviter de se faire repérer. La nuit tombait peu à peu et le vent glacial ma faisait frissonner. Les graviers roulaient sous nos pas et les herbes humides devenaient glissantes. Je regardais souvent en arrière de peur que quelqu'un surgisse de nulle part pour nous ramener chez Pierre.

On s'arrêta pour étaler nos sacs de couchage sous un arbre au cas où la pluie tomberait. Je restais là à regarder les étoiles en pensant à Maurine, ma sœur jumelle. Savait-elle que j'existais ? Depuis combien de temps avions-nous été séparées ? Se souvenait-elle de notre père ?

Les étoiles me paraissaient si lointaines, si instables. À tout moment, l'une d'elle, là-haut, pouvait s'éteindre ne laissant aucune trace de sa présence dans le ciel. Serait-ce pareil pour Maurine ? Était-elle toujours en vie, au couvent de Lacherme ? Toutes ces questions me torturaient. Impossible de dormir. Je me levai et ramassai un couteau.

Je partis dans les bois sombres, une lampe-torche à la main. Les sens aux aguets, j'avançais dans la forêt inhospitalière. Le bruissement des feuilles me donnait l'impression d'être suivie. Alors que je me baissai pour resserrer mes lacets, le craquement d'une branche attira mon attention. Prise d'une grande frayeur, je me relevai et scrutai les petits buissons aux alentours. Une forme humaine se dirigeait vers moi. Je reculai, sans bruit, le cœur battant.

Je plissai des yeux, tentant de mieux apercevoir la personne. Je sursautai et lâchai ma lampe, qui s'éteignit, lorsque je sentis l'écorce d'un arbre sur mon dos. Je jurais, et, sortis le couteau pour le pointer devant moi. Mon corps, glacé par la terreur. L'homme que je pouvais légèrement apercevoir, était tout proche. Je respirai fortement me collant, autant que je le pouvais, contre le tronc. Un jet lumineux éclaira mon visage, m'obligeant à protéger mes yeux de mes mains.

- Tu aurais pu me dire que tu adorais les escapades nocturnes !

Je soupirais de soulagement en reconnaissant la voix de Gautier. Mon cœur se calma doucement. Il m'avait suivie ! Je levai les yeux au ciel et retournai au camp, ignorant sa question. Il m'énervait, toutefois, sa présence était cruciale.

Le soleil commençait déjà à se lever. Gautier s'affairait à ranger son sac de couchage. Je fis de même, m'emparant de la bouteille d'eau.

- Il reste encore combien de temps ?, voulus-je me renseigner.

- Trois kilomètres. On devrait les faire en plus d'une heure.

- Et le couvent ? Il se trouve où dans Lacherme ?

Il déplia la facture et répondit :

- 6 rue des Eglantiers.

- D'accord.

Nous finîmes de ranger, dans le silence, sous les premiers rayons du soleil qui venaient éclairer notre petit "camp". Je brûlais d'impatience d'arriver et de rencontrer Maurine, espérant de toutes mes forces qu'elle soit là-bas.

J'avais une sœur jumelle ! C'était incroyable.

Mais une question restait sans réponse : Pourquoi avions-nous été séparées ?

Je marchais, suivant Gautier qui ne me lançait aucun regard. Je le scrutais en pensant :

"Il m'a aidé à m'échapper, il m'aide encore pour la route à suivre, mais pourquoi a-t-il voulu tout cela ? Que cherche-t-il ? Il m'a suivie dans la forêt. Pourquoi ne me laisse-t-il pas tranquille ?"

Le soleil était déjà bien haut dans le ciel et sans montre je pus deviner qu'il était plus de midi. On pouvait apercevoir au loin, des petites maisons, des champs et une grande église.

Morgane: Passé: Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant