Ce ne fut pas l'attaque des rayons du soleil qui me réveilla le lendemain, mais une soudaine constatation. Athéna ne m'avait pas recontactée depuis notre semblant de discussion la veille. Pourtant, je m'attendais à ce qu'elle le fasse.
Me redressant avec lassitude, je gagnai la salle de bain et entrepris de me rendre un tantinet plus présentable. Quand j'eus fini, je fus agréablement surprise de retrouver l'ancienne moi, celle soignée, qui sentait bon le jasmin. Je fus enfin quelqu'un d'humain à mes yeux.
Piochant parmi mes habits, je choisis une robe au hasard, mis un collier de perles au ras de mon cou, me chaussai puis sortis. Une fois en bas, je trouvai Aidan, contemplant d'un regard vide une table dégarnie. Je n'avais pas faim, et apparemment, lui non-plus.
Quand il m'aperçut, ses lèvres s'étirèrent en un sourire chaleureux mais pensif, il m'invita à m'asseoir près de lui. Je m'exécutai alors qu'il repoussait la chaise à dossier à sa droite.
– Bonjour, dit-il.
Je lui souhaitai le bonjour également, avant qu'un silence inhabituel ne s'installe progressivement. Il prit ma main entre les siennes, conservant un mutisme que je n'aimais guère.
– Si seulement cela pouvait être aussi simple, murmura-t-il.
Ce geste m'apaisait. Curieusement, il semblait le savoir.
– Rien n'a jamais été simple, depuis le tout début. Mais peut-être que cela le deviendra.
– Peut-être.
Il y eut un blanc. Un blanc pendant lequel nos deux âmes tentaient vainement de se débarrasser de leurs démons intérieurs. Le regard perdu dans le vide, j'essayais de me concentrer essentiellement sur la pression de sa main sur la mienne. Il mit fin à ce moment de quiétude en se levant brusquement, me faisant sursauter.
– Il faut qu'on y aille, marmonna-t-il.
Je me levai à mon tour, poussant la chaise, et, jetant un dernier regard dénué d'émotions sur la pièce ainsi déserte, je me retournai d'un mouvement dont la brusquerie me surprit.
Aidan m'attendait sur le perron, dos à moi, son regard cristallin toujours perdu dans le vague. Il avait toujours été très secret, très discret aussi. J'aurais donné n'importe quoi pour pouvoir sonder son esprit en cet instant précis.
On échangea un dernier regard, le sien se voulant rassurant, pourtant je voyais bien aux plis de ses yeux qu'il était bel et bien perdu.
Nous quittâmes HiddenWood Manor puis marchâmes dans les sentiers de la ville. Je n'aurais jamais cru que les bâtiments titanesques de cet endroit allaient me manquer un jour. Nous empruntâmes un étroit chemin bordé d'une rangée de maison de part et d'autre, qui me rappela avec une certaine nostalgie les rues de London, que j'avais visité un jour en compagnie de Sarah et de son petit ami de l'époque, Bryan, un jeune entrepreneur, qui avait savamment entrepris de tromper ma cousine après un an de relation.
Aidan me tira par le bras, et nous bifurquâmes dans une autre ruelle, plongée dans la pénombre. Le soleil étirait à peine ses rayons depuis le zénith, la nuit s'essoufflait lentement, laissant place à une journée qui s'annonçait radieuse. Quelques minutes plus tard, et nous avions quitté la partie urbaine de la ville. Au lieu des bâtiments à l'allure spectaculaire, se dressaient çà et là, des maisonnettes miteuses, quelques unes à moitié effondrées.
L'adolescent posa un bras sur ma taille, et pressa le pas, je le suivis de près. Mes jambes étaient engourdies par le froid, mes lèvres et mes joues avaient rougi. Nous montâmes quelques marches humides puis tournâmes à droite. Quelques mètres plus loin, Aidan s'arrêta devant une bâtisse se situant à l'angle de la rue. Sa surface en pierres noires et ses vitres sales lui conféraient une allure sinistre. Une porte robuste en fer forgé en interdisait l'accès.
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MILLENIUM
FantasyC'était supposé être un été comme les autres. Un été où, à l'aube de ma rentrée à l'université, je me serais libérée de mes chaînes, et je me serais enfin permis de commettre le plus grand des impairs. Un été où j'aurais oublié mes souvenirs brûmeux...