Chapitre 34

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Je continuais à m'acharner sur le corps inerte en dessous de moi.

Cela ne faisait qu'une mort de plus que j'ajoutais à une série de victimes qui avaient péri dans mon sillage.

– Katy, je t'en prie...

Une quinte de toux suivit cette faible supplication, et me fit réaliser ce que j'étais entrain de faire.
L'image d'une barbarie innommable surgit dans mon esprit.

Et l'auteure de ce sinistre tableau n'était autre que ma sombre personne.

– Oh mon Dieu, balbutiai-je.

Je reculai à quatre pattes, les larmes aux yeux. J'avais peur de moi-même, peur de ce que j'étais devenue, peur de l'impact qu'avaient mes sentiments sur ma raison lorsque je les laissais s'emparer de moi...

Pourtant je pris sur moi. Je clignai des yeux et mes larmes tarirent. Je ne pouvais pas me permettre de flancher. Aidan se vidait de son sang à mes côtés.

Je me relevai, les mains dégoulinant de sang. Immonde liquide noirâtre, et avec une froideur tétanisante, je versai l'alcool posé sur la table sur ces dernières et les lavai.

Puis je me tournai vers les hommes de mains après les avoir mis sous hypnose :

– Allez me chercher tous ce qui peut soigner. Tout ce que vous pouvez trouver, immédiatement.

Ils s'exécutèrent sans broncher. J'étais à bout de nerfs, mais visiblement Lydia ne semblait pas en tenir rigueur.

Je dus m'absenter afin de préparer un matelas pour Aidan, quand je fus de retour, je surpris une conversation entre un Aidan souffrant, et Lydia, penchée sur lui.

– Pauvre Aidan, regarde où tu en es... à cause d'elle !

– Lydia, arrête, je t'en prie ...

Elle le coupa en se penchant vers lui. D'un geste brusque et possessif elle posa ses lèvres sur les siennes. Je sentis ce qui restait de mon cœur s'effriter entre les doigts squelettiques qui tentaient de le retenir.

Je me raclai la gorge, meurtrie, gardant toutefois un air impassible. Je ne pouvais pas me permettre de faiblir, pas maintenant.

Lydia se releva, un sourire triomphant sur les lèvres. Elle vivait toujours dans le fantôme du passé qu'ils avaient eu ensemble, et refusait de voir que c'était bel et bien fini.

Quant à moi, mon impassibilité soudaine cachait une instabilité dangereuse que je ne pouvais me permettre d'afficher.

Je claquai des doigts sans prononcer mot. Être cruelle et user de mes dons pour obtenir le pouvoir était chose facile, j'aurais pu le faire au moment où j'avais réussi à maitriser ces derniers, pourtant ma conscience ne me le permettais pas. Avant...

Désormais, cette dernière comptait parmi les abonnés absents.

Un des gardes s'avança vers moi, puis fléchit le genou.

– Que désire son éminence l'Enchanteresse ?

– Appelle les autres, dis-leur de porter cet homme jusqu'à une chambre avec beaucoup de précaution. Et apporte-moi tout ce qui peut soigner. Immédiatement, ordonnai-je avec une surprenante froideur.

– À vos ordres.

Et il disparut, pendant que je fulminais, sur du charbon ardent, près d'un Aidan souffrant le martyr.

Deux hommes apparurent devant moi quelques secondes plus tard. Sans que je n'eusse à prononcer mot, ils se dirigèrent vers lui et le portèrent sans plus de cérémonie vers l'une des chambres. Ce dernier poussa un cri de douleur face à leur brutalité. Je fronçai les sourcils, ne pouvant m'empêcher de m'en inquiéter.

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