Chapitre 18 - Une visite impromptue

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Étendue dans le canapé à la recherche d'un peu d'air frais, Annabelle éventait son visage en prenant de fortes inspirations. Cela lui aura pris plus de deux heures, mais elle avait enfin réussi à assembler les pièces de son étagère dans laquelle elle rangerait tout ce qui lui paraîtrait « exposable », à commencer par des livres et de vieilles photos de famille.

En trois semaines d'aménagement, la maison de son enfance commençait enfin à retrouver vie et ordre. Même si plus rien ne ressemblait à ses souvenirs, elle commençait tout juste à prendre plaisir à retrouver ses marques dans la grande demeure dont l'odeur de poussière et de renfermé était toujours persistante. À mesure qu'elle montait les meubles, l'écho des pièces se réduisait, mais il n'en était pas de même son sentiment de solitude. La présence de sa mère était ce qu'il lui manquait le plus. Elle ne l'entendait plus chantonner dans la salle de bain ni se plaindre en tentant de préparer ce qui allait leur servir de repas – chose qui se concluait fréquemment par une livraison à domicile.

Du coin de l'œil, Annabelle observa la paperasse qui reposait sur un coin du plan de travail. La passation avec le notaire s'était déroulée à merveille et la jeune fille de tout juste dix-huit ans était enfin l'heureuse propriétaire de la maison bleue.

Mais ce qui la tracassait au plus haut point, ce n'étaient pas les dizaines de formulaires à remplir, mais plutôt la somme qui allait renflouer son compte bancaire. Devant le notaire, elle avait ravalé une exclamation soudaine en déchiffrant le montant qui composait le solde de Meryl. C'était ce qui avait d'abord inquiété la jeune Croisée.

De toute son enfance, elle n'avait jamais vu sa mère travailler ou faire que ce soit pour gagner sa vie. À son jeune âge, elle ne s'en était pas préoccupée. Mais en grandissant avec un oncle faisait très régulièrement ses comptes à la main, elle s'était interrogée sur la source des finances de sa mère. Non seulement, elle n'avait formulé aucun prêt pour s'offrir la maison, mais elle disposait également d'une somme très confortable pour vivre tranquillement quelques années - si ce n'est toute sa vie. Au premier abord, cela aurait pu réjouir n'importe qui. L'idée de pouvoir vivre dans l'opulence dès l'accès à la majorité était un souhait purement utopique et pourtant cela mettait Annabelle mal à l'aise. Car cela soulevait pour elle une question bien plus qu'évidente. D'où venait tout cet argent ?

Au cours des trois dernières semaines, elle avait mené sa petite enquête, sans grand succès. Du jour au lendemain, Meryl Fletcher avait ouvert un compte et fait transférer la totalité de cette somme sans jamais justifier sa provenance.

Soupçonneuse, la toute jeune adulte était devenue réticente à l'idée d'encaisser l'argent et le chèque lui faisait chaque jour face, accroché sur le frigo dans l'attente de rejoindre son propre compte. Sa décision, elle devait rapidement la prendre. Faire meubler la bâtisse venait d'engloutir une grosse partie de ses économies qui devait servir à financer ses études. Si elle ne parvenait pas à se décider, la maison serait saisie dans les mois qui suivraient.

Mais alors qu'elle se perdait dans sa réflexion, une sonnerie captiva son attention derrière elle. Tant bien que mal, elle s'extirpa du canapé et sentit les courbatures lui vriller les cuisses. C'est donc avec difficulté qu'elle rejoignit son ordinateur sur lequel un visage bien familier apparut, attachant sa grande tignasse rouge à coup d'épingle.

- Salut, ma belle !

Annabelle régla la caméra pour se rendre parfaitement visible aux yeux de sa meilleure amie puis se laissa complètement choir sur la chaise.

- T'as fait un footing ? l'interrogea l'Organtienne en remarquant la transpiration sur sa peau.

- En quelque sorte. Alors, les révisions ?

Annabelle Storm - L'héritière d'OrgantiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant