27 : Choix

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Tandis que Marie s'endormait, Pierre alla rejoindre les chefs dans la tente de rassemblement pour annoncer la nouvelle et pour discuter avec eux. Lorsqu'il passa le tissu lourd, les voix se turent. Fronçant les sourcils, Lantagnac s'approcha et posa un pichet de vin sur la table.

- Messieurs, je ne sais pour quoi ce silence, mais je voulais vous annoncer la bonne nouvelle. Je suis à présent père d'un fils.

Les hommes s'approchèrent de lui et le félicitèrent. Tous sauf un. Jean de Namur qui restait en retrait. Pierre, le remarquant, s'approcha de lui et tendit une coupe. L'oncle de l'archevêque le regarda un instant et s'avança vers la table au centre sans prendre la coupe.

- Pour vous, ce jour est peut-être fête. Mais pour d'autres c'est l'heure du deuil. Avant votre entrée, nous étions en train de discuter du sort de votre ami. Robert de Dampierre.

Il fronça à nouveau les sourcils et demanda quelques explications quant à son emprisonnement.

- Après que vous avez emmené votre femme au campement, les français sont partis. Nous nous sommes étonnés de ce changement de comportement soudain. Après avoir établi le bilan de nos morts et blessés, un fantassin nous a appris que le fils de Dampierre avait été capturé. Robert d'Artois a accompli son travail. Je suis donc désolé mais je ne boirai point en sachant qu'un de nos confrères est enfermé.

- Confrère ? Comte, nous sommes au même rang vous et moi. Certes vous avez plus d'expériences car vous êtes plus âgé que beaucoup d'entre nous. Cependant, je vous reprends sur le fait que vous utilisiez le mot « confrère ». Vous l'avez rejeté, vous l'avez refusé comme comte de Flandre si son père venait à trépasser. Le nierez-vous comte ?

- Je ne le nie point. Mais il semble être notre seul espoir. Personne ne veut de ce titre. En tout cas, personne de sensé. Il est notre seule chance si son père trépasse. Et malheureusement, il se fait vieux.

- Je croyais que les flamands n'apprécient point le comte, ironisa Pierre en entendant le malheureusement.

- En effet, mais il a été un des seuls à tenir tête au roy.

- De toute façon, nous nous devons de le sortir de là. Le roy va le pendre. Nous devons les intercepter !

- Nous ne pouvons. Plus aucun flamands ne nous soutient. Nous avons perdu plus de la moitié de nos hommes. Si nous nous faisons attaquer ou bien si nous attaquons, nous ne pourrons les vaincre.

- Vous voulez me dire que nous n'allons rien faire ? Il va périr comme son père et la lignée des Dampierre s'éteindra.

- Nenni Lantagnac. Il a déjà cinq enfants, dont deux fils, déclara le clerc.

A ces mots, Pierre se tourna vers l'archevêque et le regarda avec de grands yeux. Jean de Namur, un sourire ironique sur les lèvres, fit un pas dans sa direction et dit d'un ton narquois :

- Votre ami s'est bien gardé de vous dire qu'il s'était marié.

- Il ne m'a jamais parlé de sa femme, ni même de ses enfants.

- C'est un passé bien sombre qu'il a derrière lui. Robert a épousaillé deux femmes. La première est morte en couche en donnant naissance à un fils. Quelques mois plus tard, il se remarie sur l'ordre de son père, et son héritier décède. Après avoir eu ses cinq enfants, sa deuxième femme, Yolande de Bourgogne, est retrouvée morte dans son lit. Robert était à ses côtés. Il a avoué l'avoir étranglée.

Pierre s'assit en entendant ces propos et regarda, choqué, l'homme de Dieu.

- Pourquoi a-t-il fait cela ?

- Il pensait qu'elle avait tué son héritier par jalousie, déclara Namur en jouant avec sa dague, c'est pour cela que nous avons hésité à le prendre comme comte. Il a du courage certes, mais tous les flamands sont au courant de ses aventures. Ils ont peur. Peur de son tempérament. Qui sait ce qu'il peut faire à son peuple.

- J'ai Foi en lui, nombreux sont les moments où il aurait pu m'occire. Il ne l'a point fait. Dieu sait pourtant que j'ai déshonoré sa famille comme la mienne. Si vous ne voulez point le délivrer, je le ferais !

- Si vous êtes assez fol dingo pour vous suicider, allez-y, je ne vous retiens point.

- Moi je m'y oppose.

L'archevêque se leva de son fauteuil et s'approcha de Pierre. Posant une main sur son épaule, il le regarda et dit :

- Vous venez d'avoir un héritier mon fils. Vous avez une femme qui vous aime. Pourquoi souhaiteriez-vous mourir pour lui ? Dois-je vous rappeler que vous êtes un fugitif aux yeux du roy ? Vous l'avez trahi en vous alliant aux flamands.

- Robert est devenu mon ami depuis le jour où il m'a sauvé d'une mort atroce. Depuis, j'ai une dette envers lui.

- Vous l'avez aussi sauvé. Nous avons besoin de vous ici Lantagnac. Votre femme a aussi besoin de vous. La Flandre ne pourra être libre qu'avec un chef loyal et juste pour les guider. Nous avons perdu la confiance de notre région. Nous ne pourrons la regagner qu'avec une personne qui sait pour quoi elle se bat.

- Je ne suis point votre homme et vous le savez, déclara Pierre en baissant les yeux, j'ai plus d'une fois offensé Dieu. Je ne mérite point de tels compliments.

Après avoir dit cela, Pierre posa sa coupe sur la table et sortit de la tente de commandement. Il marcha au soleil qui était apparu et qui dissipait la brume installée dans la nuit. Après avoir monté une petite colline, il s'assit sur un rocher et contempla la plaine qui s'étendait sous ses yeux. Inspirant profondément, il réfléchit à tous ce qui venait de se passer. Quelle était la voie qu'il devait emprunter ? Aller chercher son ami, son camarade à Paris ou bien conduire les flamands vers une victoire ? Devait-il laisser sa femme et son enfant pendant plusieurs semaines pour retrouver un ami ou bien rester avec eux en guidant les soldats ? Préférait-il mourir sur un bûcher ou sur le champ de bataille ? Il posa ses mains sur son visage et pleura, libérant toute la tension et la peur qui s'étaient accumulées.

 Quelle était la voie qu'il devait emprunter ? Aller chercher son ami, son camarade à Paris ou bien conduire les flamands vers une victoire ? Devait-il laisser sa femme et son enfant pendant plusieurs semaines pour retrouver un ami ou bien rester ...

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Bonjour, bonjour,

Me voilà de nouveau avec un nouveau chapitre de cette histoire.

Excusez-moi pour cette longue attente. Je suis en cours d'écriture pour le prochain.


Bonne vacances !

La Revanche de LantagnacOù les histoires vivent. Découvrez maintenant