31 : Déception & Colère

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Pierre s'acharnait sur les français, tombés autour de lui même après que le cor ait retentit. Ce n'est que lorsqu'une main se posa sur son épaule qu'il s'arrêta et se retourna. Guillaume de Juliers se tenait derrière lui, l'air sérieux. 

- Arrêtez de vous infliger cela mon enfant. La bataille est terminée.

- Récupérez tous les éperons de ces preux chevaliers tombés au combat, ordonna Jean de Namur. Ce sera le témoignage de notre bravoure et de notre victoire.

Tous les flamands levèrent leurs armes vers le haut en hurlant et en acclamant leur confrère. Pour eux, c'était un sentiment de liberté qui s'installait. Leur chef allait revenir et le roy de France partirait taxer d'autres régions. Il était temps maintenant de libérer les autres villes de Flandre et de devenir indépendant. 

- Comment ? L'armée française a été déroutée ? Cela ne se peut !

Philippe le Bel était dans son bureau avec ses ministres lorsqu'il avait appris la nouvelle de la défaite. Furieux, il balaya la table et tapa du poing dessus. Tous ses ennemis et en particulier l'Angleterre, allaient croire que les troupes françaises étaient faibles et que la France pouvait être envahie. 

- Combien d'hommes ?

- 7 000 hommes se sont réfugiés dans les différents bastions que nous détenons encore votre Majesté. 

- Je demandais combien d'hommes nous avions perdus Guillaume, s'impatienta Philippe.

- 1000 votre Majesté dont 8 commandants. 

- Combien de pertes dans leur camp ?

- 100 fantassins votre Majesté, déclara Enguerrand de Marigny.

- Vous voulez dire que j'ai perdu une grande partie de mon armé, mes meilleurs commandants dont d'Artois ?

- Oui votre Majesté. Mais nous allons gagner cette guerre.

- Pouvez-vous m'expliquer par quels moyens nous allons gagner cette foutue bataille Marigny ?! Nos hommes se sont fait massacrés, nos coffres sont pratiquement vides, les Templiers commencent à me poser problème, l'Angleterre veut la Guyenne et ma femme est en plein abattement moral de puis la mort de sa mère. Alors, j'attends vos explications et vos propositions pour sortir de cette merdaille !

Après avoir dit cela, Philippe se le va et renversa toutes les cartes avec les informations importantes. Puis, il alla s'accouder devant la cheminée.
Aucune réponse n'était attendue de la part des ministres présents dans la salle. D'un geste, le roy les renvoya et chacun leur tour ils s'inclinèrent et se pressèrent de sortir de la salle. Resté seul, Philippe souffla et pria intérieurement pour que cette guerre soit rapidement terminée et que le calme revienne à nouveau. 

- Messieurs, il est temps pour nous de fêter cette victoire ! N'oublions pas de pleurer nos morts et buvons à leur santé. A nos morts !

Sur ces paroles de Jean de Namur , tous les hommes répondirent la même chose puis allèrent se servir de la cervoise à foison. Les seigneurs étaient quant à eux attablés dans un coin, en train de discuter des suites de la bataille. Pierre ne participait pas à la conversation, préférant penser à son échec. Depuis la mort de son compagnon Walram de Juliers et de son frère Guillaume, il ne pensait qu'à une chose : tuer son pire ennemi, Robert d'Artois. 

Il savait qu'il aurait pu y arriver même blessé. Pourquoi avait-il fallut que ce soldat l'achève ? S'il retrouvait ce dernier, il le tuerait de ses propres mains, infligeant ce qu'il avait réservé à d'Artois.
Dans sa tête se jouait et se rejouait les derniers instants de cette bataille. Le rictus heureux d'Artois lorsqu'il avait vu sa mine déconfite, même son visage après le dernier râle gardait ce sourire narquois. 

Lassé de ces festivités auxquelles il ne prenait pas goût, il se leva de table et s'avança jusqu'à la lisière de la forêt, près du petit ruisseau. Là, il s'assit et regarda l'eau couler. Depuis que cette guerre avait commencé, il n'avait pas pris un seul temps pour lui. Il n'avait jamais pensé à tout ce qui s'était passé l'arrivée des Dampierre dans leur famille. Et c'était là, ce soir, près du ruisseau qu'il repensait à tout ça. 


Il se souvint des parties de touche-touche avec son frère et Marie. Durant toutes ces années où ils grandirent ensemble. Leurs différentes cachettes pour échapper à leur tuteur, leurs lieux de rencontre, les punitions qu'ils avaient eues, lorsqu'il avait pris la défense de Marie devant André.
Et puis, ils avaient grandi. Même s'ils se voyaient moins, les trois faisaient tout leur possible pour se retrouver de temps en temps. Marie travaillait au château, Guillaume et Pierre s'entraînaient pour devenir chevalier. Leurs parents les regardaient, heureux. Quelques fois, ils sortaient en famille pour rester soudés. 

Les réceptions se sont succédé au fil des années et il avait dû rencontrer différentes prétendantes pour unir les comtés.  Pourtant aucunes n'étaient assez bien comparé à celle qui faisait battre son cœur depuis quelques années. Marie. Et à cause de cet amour puis de cette union qui n'étaient pas autorisés, elle avait été bannie du château et lui avait été envoyé ici dans les Flandres. Les choses s'étaient enchaînées très rapidement et bientôt il ne lui restait plus que sa femme. Et maintenant son fils. Son héritier. Thibaud avait maintenant 2 ans tandis que lui avait 26 ans. Son père et sa mère n'étaient même pas présents pour rencontrer leur petit-fils, pour le féliciter, pour le guider dans sa vie de père. 

Pierre leva la tête et observa le ciel étoilé. Il n'y avait pas de lune ce soir. 

- Oh père, mère, Guillaume... Comment puis-je faire sans vous à mes côtés ? Je suis perdu. J'ai maintenant une femme et un fils qui comptent sur moi. Je suis trop jeune pour cela, pour tout ce que j'ai vécu jusqu'à maintenant. J'ai besoin de vous, et vous n'êtes point présent. Ne m'abandonnez pas du Ciel. Veillez sur ma famille et moi. Aidez-moi !

Une larme roula sur sa joue, la première depuis trois ans. Il enfouit son visage dans ses bras et laissa sa tristesse s'échapper de son âme. Ce n'est que lorsqu'il sentit quelque chose de chaud sur son épaule qu'il releva la tête et tourna les yeux vers sa droite.
Marie était là, contre lui, sa tête sur son épaule, son bras dans son dos. 

- Mon amour, tout va bien ?

- Je repensais à notre enfance, notre adolescence et notre vie de maintenant.

- Et qu'en pensais-tu ?

- Tout cela me manque. Castelroc me manque, Guillaume, mes parents, mes amis, tous me manque.
      Pierre tourna la tête vers elle et la regarda droit dans les yeux.
Si je devais te perdre Marie, je ne souhaiterais plus vivre. Je ne voudrais plus exister sur cette Terre. Tu es toute ma vie et maintenant, Thibaud s'est rajouté à la nôtre.

- Alors si je devais mourir, tu devrais vivre. Au moins pour lui ! Il aurait besoin de toi.

Elle caressa sa joue de son doigt et embrassa la commissure de ses lèvres en murmurant un « je t'aime ».

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La Revanche de LantagnacOù les histoires vivent. Découvrez maintenant