Chapitre XXI

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Émerveillée, j'observe avec les yeux d'une enfant les paysages dont la magnificence me coupe le souffle et qui défilent à toute allure sous les ailes de Poliav. Je regarde les forêts multicolores s'étaler sous mes pieds comme autant de points uniques faisant partie d'un tout magique. L'air qui siffle à mes oreilles me raconte une histoire bercée par une douce mélodie qui me réconforte. Le feu du soleil caresse mon visage avec une délicatesse émouvante. Les nuages dans leur douce humidité naturelle m'enveloppent de temps à autre, cachant à mes yeux un monde étrangement merveilleux dont les fantasys et la beauté sauvage me sont inconnues. Mais je me le promets, plus pour longtemps. Après tout. J'ai l'éternité pour explorer cette immense planète dont les promesses tendent à me faire plonger dans une enfance irisienne que je n'ai pas eue.

Une brusque euphorie m'envahit soudain et donnant une impulsion à Poliav je fais un pique vers le sol. La sensation est grisante. L'air fouette mon visage. Mes yeux pleurent, mais pour une fois c'est de joie et de légèreté. Les sensations s'infiltrent dans mes veines et je les y accueille avec bonheur. Je ne pense plus à rien. Je me sens légère. Si légère. Tout me paraît futile alors que je tombe. Attirée par la beauté de cette terre que je n'ai presque jamais foulée. Le sol s'approche à une vitesse effarante. Et malgré le risque que je cours, je ne ressens aucune peur. J'ai entièrement confiance en Poliav. De plus, je ne risque pas de mourir...

Soudain, les ailes précédemment repliées de mon Amoliar se déploient et je sens tout mon poids peser des centaines de fois sur moi pendant que nous retrouvons notre place haut dans les nuages. La puissance de la pesanteur juste après la douceur de la légèreté est déroutante et un sourire indélébile s'inscrit sur mon visage alors que tous mes sens reviennent lentement à la normale et que je me stabilise à côté de mes amis.

- Tu pourrais au moins prévenir quand tu fais ça, tu ne crois pas ?

Bougonne Yale. Je me tourne vers lui avec un froncement de sourcils. Je ne comprends pas. Grâce au récent retour de mes souvenirs, je sais que je n'ai jamais justifié le moindre de mes actes. Yale étant derrière moi je passe ma jambe droite du côté gauche du large dos de Poliav, me suspendant ainsi dans le vide et le regarde droit dans les yeux.

- Je ne comprends pas.

Il pousse un long soupir avant de s'expliquer ;

- Je sais que tu n'as pas l'habitude de t'expliquer. Mais au moins prévenir ce n'est pas la mer à boire. Tu es incontrôlable et ça me rend littéralement fou.

Bien évidemment, son point de vue me semble tout à fait cohérent et je comprends que ses sentiments le poussent à s'inquiéter pour moi plus que de raison. Mais je ressens à son égard trop de sentiments contradictoires pour savoir comment prendre son comportement protecteur. Je sens le lien qui nous lie et que je ne connaissais pas jusqu'il y a quelques heures, mais je me rappelle aussi de la douleur de son départ du vide, de la solitude. Je ne sais plus comment me comporter avec lui et cette constatation me déstabilise.

- Je ne suis pas sûre que tu as le droit de me dire ce que je dois ou non faire, désolée Yale.

Je repasse ma jambe de l'autre côté de mon Amoliar pour éviter de tomber et voyant Kahanu qui avait été envoyé en éclaireur revenir, j'ordonne à Poliav de s'en approcher. Mon esprit frôle celui du jeune homme à la longue tresse et la connexion se fait immédiatement.

- Alors ? Tu penses que nous pouvons nous rendre à Grego sans risque ?

Grego est la capitale d'Alairia, le royaume de l'air dirigé par le père de Kahanu. L'un des souverains les plus influents de la planète derrière ma mère et Yale, le nouveau Roi de Terraïate. Kahanu désirant récupérer un objet important ainsi que s'entretenir avec son père et Alairia étant sur le chemin, nous avions décidé de nous y arrêter un jour ou deux avant de rejoindre la capitale d'Amurisse. Ne connaissant le Roi Styfæn que de ouï-dire je ne pouvais décemment pas me préparer à la réaction qu'il aurait en voyant la princesse d'un pays qu'il considérait comme ennemi débarquer en son royaume et cela ne me rassurait pas du tout. Sentant mon appréhension Kahanu tente de calmer mes angoisses :

Rubis - I. Renaissance Où les histoires vivent. Découvrez maintenant