*22 mars 835*
Presque une semaine s'était écoulée depuis l'envoi de ma lettre aux Ivoldo. Junna y avait répondu deux jours plus tard, annonçant que Kássandros avait suivi les recommandations à la lettre en allant faire une demande à la Garnison en poste au District d'Utopia, au nord du Mur Rose. Ayant eu vent des affaires, elle avait accepté sans hésiter ; des soldats se relayaient toutes les quatre heures devant l'atelier pour monter la garde, et veillaient également la nuit. Pour le moment, aucune mauvaise âme n'avait été arrêtée. C'était une bonne nouvelle. J'en avais touché deux mots à mon chef d'escouade et au Major Shadis, et tous deux s'étaient montrés soulagés. J'avais été assez surprise venant du Major, parce que ce n'était pas le genre à montrer facilement ses émotions devant ses soldats.
Dans sa lettre, ma tante avait aussi précisé que mon oncle passerait dans la semaine à Trost, en compagnie de trois de ses artisans. Apparemment une réunion des chefs d'ateliers se tiendrait à l'atelier situé à Shiganshina ; il en profitera pour passer au Q.G. du bataillon d'exploration et me rendre visite.
Je me demandais quel serait la réaction de Kássandros en me voyant porter l'uniforme militaire des ailes de la liberté. Quand je leur rendais visite à Pegasus pendant mes jours de repos, les Ivoldo m'avaient toujours vue habiller en civil. Ilías me taquinait parce que je n'osais pas me montrer chez eux avec l'uniforme du bataillon d'exploration — et c'était malheureusement vrai. Ça risquerait donc de faire drôle à mon oncle quand il arrivera... D'ailleurs, quand arrivera-t-il à Trost ? Déjà qu'il me reprochait de ne pas suffisamment venir au village de Pegasus ; là, il risquerait de me faire la fête. Et avec son fichu franc-parler d'artisan, je ne pourrai pas y échapper.
Tous ses employés parlaient de cette manière, à l'atelier. Ils gueulaient, ils utilisaient un jargon bien à eux, il leur arrivait de se prendre la tête, bref le répertoire complet. Pour avoir vécu deux ans entre l'atelier et la maison des Ivoldo avant d'entrer dans les brigades d'entraînement, je connaissais le système. Et, malheureusement pour moi, j'avais fini par m'habituer à cette mauvaise habitude...
La matinée avançait doucement. Assise au réfectoire pour le petit-déjeuner, à la table où nous nous rendions avec Mike et Erwin, je discutais avec Honey. Quelques soldats matinaux s'étaient eux aussi levés de bonne heure. En revanche, Erwin et Mike répondaient aux abonnés absents.
- Alors, tu sais quand ton oncle va passer ? me questionna Honey, toute curieuse de connaître les détails. Avait-il donné une date, dans sa lettre ?
- Non, ils ne m'ont rien dit, Honey, soupirai-je, lassée de subir un interrogatoire. Seulement que ça sera la veille de la réunion des artisans qui est tenue à l'atelier de Shiganshina. Mon oncle a toujours eu le chic de ne pas s'attarder sur les détails, quand ça l'arrange.
Quand Kássandros avait décidé de faire ses visites dans la semaine, il le fera dans la semaine, ou alors en fin de semaine, ou même dès le premier jour du début de la semaine. C'était selon ses envies. Tous le décrivaient comme un véritable électron libre, ce qui était absolument vrai. Mais il avait trop tendance à suivre son instinct, et à parier que ce qu'il sentait comme « juste » était le bon choix.
- Tu ne me croirais sans doute pas, mais mon oncle est un entêté de première. Impossible de le faire changer d'avis ! Il est tellement campé sur ses positions qu'on pense qu'il ne va jamais flancher.
- Tiens ! c'est marrant, ça me fait penser à quelqu'un. Une fille aux allures de garçon manqué qui est assise en face de moi.
- Oh, la ferme ! Ma coiffure me donne peut-être des allures de garçon manqué, mais moi, au moins, je mets des robes !
- C'est vrai que je préfère plus les pantalons aux robes, admit mon amie. Je les trouve plus confortables.
- Les robes sont tout aussi confortables, aux dernières nouvelles.
Ne porter que des pantalons à longueur de temps lorsqu'on faisait partie de l'armée, peu importe que ce soit une femme ou un homme, ça se comprenait, l'uniforme le demandait. Mais pour les femmes qui en portaient même pendant les jours de congés, on se disait qu'elles préféraient la facilité. Enfin, tout le monde avait ses goûts bien définis...
Souhaitant changer de sujet, je m'exclamai, l'air de rien :
- Bon ! Ce n'est pas que je m'ennuie, mais les gars ne sont toujours pas arrivés. Ils sont pires que des jeunes mariés !
- Tu ne dis pas ça parce que tu attends une personne en particulier ? me taquina Honey. Avoue que tu l'aimes, ton prince charmant.
Aussitôt je me mis à devenir aussi rouge qu'une écrevisse, faisant ainsi un joli contraste avec mes cheveux blonds. Et je commençai à balbutier.
- Mais... Mais non, pas du tout ! balbutiai-je. Qu'est-ce que tu racontes ? Je ne suis pas amoureuse !
- C'est ça, ouais. Tu es devenue si rouge qu'on aurait dit que tu es restée au soleil tout l'après-midi. Entre nous, il est mignon, pas vrai ?
A peine avait-elle prononcé ces mots, qu'une serviette en papier atterrit en pleine figure. Je le lui avais balancé pour qu'elle ne sorte pas d'autres sottises de ce genre. Et ce qui allait se passer ensuite, Honey avait intérêt à se préparer...
- Honey, tu sais toujours courir aussi vite ?
- Évidemment, acquiesça Honey, qui ne remarqua pas l'air de conspiratrice qui était apparu sur mon visage, mais je ne vois pas pourquoi ça me serait utile.
- Et bien, maintenant ça te sera utile ! Tu as intérêt à prendre les jambes à ton cou, parce que je vais te faire regretter tes moqueries sur mon « amour » !
Comprenant enfin où je voulais en venir, Honey se hâta de manger ce qui lui restait dans son assiette, et prit la fuite sans demander son reste. Le banc qu'elle avait poussé à la va-vite fit un bruit du tonnerre, ce qui attira l'attention des quelques soldats présents dans la grande salle. Et ils firent de nouveaux bonds de trois mètres lorsqu'un hurlement — le mien — résonna sur les murs de pierre :
- HONEY !!!!! VIENS LÀ, QUE JE T'ÉTRANGLE !
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« 𝓣𝓱𝒆 𝓬𝓪𝓹𝓽𝓪𝓲𝓷 𝓸𝒇 𝓶𝔂 𝓼𝓸𝓾𝓵 [SNK ~ Mike X OC] » / TERMINÉ
Fanfiction« Akiko Eyre, 23 ans, fait partie du bataillon d'exploration depuis la fin de ses années d'entraînement. Son vœu le plus cher est d'éradiquer tous les Titans de ce monde, pour qu'un jour les hommes puissent vivre libres. Chaque jour est un combat po...