Chapitre 8

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*22 mars 835*

Qu'est-ce que j'allais faire ?
La question tournait et retournait en boucle dans ma tête, depuis la lecture de la lettre. Déjà que j'avais envie d'étriper mon paternel pour tout ce qu'il m'avait fait subir, enfant, et ça ne datait pas d'hier... surtout qu'il avait eu 13 ans pour se faire pardonner ! Mais, là, il venait de signer son arrêt de mort en écrivant cette lettre. S'il avait le malheur de croiser mon chemin, je lui réglerai son compte !
Bien sûr, je ne le ferai pas, ce n'était pas dans mon tempérament. Mais il n'empêche qu'il était tout de même gonflé de tout m'avouer dans une lettre. Pensant obtenir mon pardon, Ménélas n'avait fait qu'aggraver son cas en augmentant la vive rancœur que je ressentais pour lui.
Poursuivre le mystérieux personnage qui avait confié cette lettre à Honey, pour ensuite me la donner en main propre, était inutile. Il devait être déjà loin, à présent. Et s'il s'avérait que mon géniteur et ce visiteur ne faisaient qu'un, il avait dû faire en sorte que mon amie ne connaisse son nom en cas de questions.
Prévoyant... et drôlement culotté, le gus ! Même moi, je n'aurais jamais osé me présenter devant un collègue et ami de mon enfant, en sachant parfaitement que ce dernier refuse tout contact avec moi. Remarque, je n'avais pas donné - pour ne pas dire jamais - de précisions sur ce à quoi pouvait ressembler mon père, et même si on me posait la question je serais incapable de répondre. Ne l'ayant plus revu depuis plus de dix ans, il avait dû prendre un sacré coup dans la tronche.
Je tournais en rond tel un lion affamé dans une cage. Aller rejoindre les autres en réunion n'arrangerait en rien l'état dans lequel je me trouvais actuellement ; mon escouade, sans compter Ilías et Kássandros, m'interrogerait sans doute en remarquant ma tête déconfite. Et je n'avais pas envie de cela. Un endroit me vint à l'esprit - le seul où une personne en particulier aurait l'idée de m'y retrouver. Le cas « de dernière minute ».
Sans hésiter je traversai les longs couloirs du Q.G., ne prêtant nullement attention au regard étonné de certains soldats croisés en chemin, et arrivai à destination au bout de quelques minutes. Vérifiant que personne ne traînait aux alentours, je me faufilai en toute discrétion dans la chambre en question après avoir crocheté la serrure.
Celle de Mike.
Mon ami se demandera certainement pourquoi la porte de sa chambre était ouverte, alors qu'il l'avait fermée le matin même, mais il comprendra qui était assez osé pour y pénétrer. Et dans une humeur suffisamment maussade comme raison. C'était le cas actuellement.
En journée la chambre paraissait toute tristounette et sans vie, sans l'occupant des lieux. Ça donnait un sentiment de mal-être. Mike devait se sentir bien seul, dans cette pièce où il n'y avait que lui qui y dormait. Il m'avait confié à plusieurs reprises qu'il lui était arrivé de se réveiller en panique en pleine nuit, en rêvant de nos compagnons d'armes tombés au combat lors des expéditions Extra-Muros à cause des Titans. Il se sentait coupable, alors qu'il n'y était pour rien. Je ne pouvais pas imaginer ce qu'il pouvait ressentir dans ces moments où les cauchemars l'assaillaient sans aucun répit.
L'enveloppe et la feuille de papier toujours dans les mains, mon premier réflexe fut de m'asseoir sur le lit. Mes jambes semblaient devenir lourdes et j'avais senti qu'elles se déroberaient si je ne prenais pas appui sur quelque chose. Le vide se ressentait dans mon corps tout entier, j'avais du mal à retrouver mon souffle ou à réfléchir correctement, la totale ! Cette foutue lettre m'avait mise dans tous mes états.
Des larmes mêlant incompréhension et colère coulèrent sur mes joues, profitant que je sois seule pour me libérer des émotions qui m'assaillaient. Je me sentais seule, si seule... Comment avait-il osé faire ça ? J'avais imaginé toutes sortes de scénarios qui auraient pu expliquer le comportement plus qu'impardonnable de mon géniteur - mais la confession qu'il avait faite dans la lettre dépassait de loin le monde de l'imaginaire, ou la douleur ressentie à la perte d'Explorateurs pendant les sorties en-dehors des Murs. Ces deux-cas, ce n'était rien en comparaison des « aveux » de l'homme qui me servait de paternel. Je n'avais jamais compris - et je ne comprenais toujours pas, d'ailleurs - comment un père pouvait se comporter de la sorte avec ses propres enfants, uniquement parce que sa femme était décédée en couches et qu'il ne l'acceptait pas.
Je pleurai pendant de longues minutes, incapable de m'arrêter, et puis quand je n'en eus plus la force je me sentais encore plus vidée qu'au départ. Épuisée, je m'allongeai sur le lit. Mes paupières se refermèrent aussitôt, sans que je ne m'en rendis compte.

« 𝓣𝓱𝒆 𝓬𝓪𝓹𝓽𝓪𝓲𝓷 𝓸𝒇 𝓶𝔂 𝓼𝓸𝓾𝓵 [SNK ~ Mike X OC] » / TERMINÉOù les histoires vivent. Découvrez maintenant