Chapitre 2

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*15 mars 835*

L'heure du dîner approchait. Après avoir rangé nos équipements dans nos chambres, à l'instar de nos collègues, Erwin, Mike et moi discutions de tout et n'importe quoi en marchant dans les longs couloirs du Q.G. Ça nous permettait de tuer le temps, de penser à autre chose qu'à la prochaine expédition.
Et justement, on finit par s'étaler sur le sujet. On s'était arrêtés de marcher. Je n'arrivais même pas à me souvenir comment nous étions venus à en parler.
- Vous croyez qu'on réussira à revenir avec le moins de morts possibles, la prochaine fois ? demandai-je en m'adossant contre le mur. Ce n'est pas très réjouissant, les vies perdues que l'on déplore après chaque sortie en-dehors des Murs.
- Tu sais que nous ne pouvons rien face au risque de mourir de la main d'un Titan, nota Mike. C'est le risque à prendre quand on fait partie du bataillon d'exploration. Et la peur qui saisit certains soldats une fois sur le terrain à l'extérieur, peut arriver.
- C'est vrai que même les soldats les plus aguerris ne sont pas immunisés face à la peur procurée à la simple vue des Titans, reconnut Erwin, ça ne concerne pas que les débutants. La peur est humaine. Mais personne ne pourra nier que nous tirons au flanc.
Le bataillon d'exploration était connu pour souffrir d'un manque cruel de personnel dans ses rangs, à cause du taux de mortalité très élevé à travers les luttes continuelles contre les Titans. Tout ce qu'on gagnait finalement était un faible taux de réussite. Ces simples points suffisaient cependant à décourager la plupart des jeunes recrues de rejoindre cette division. Les rares qui y entraient s'investissaient complètement à la cause de l'humanité, souvent au prix de leur propre vie et de leur vie de famille. Il existait quand même une grande différence entre les Brigades Spéciales et le bataillon d'exploration : contrairement aux soldats de la première branche, ceux de la seconde n'étaient pas paresseux et incompétents, et encore moins enclins à la corruption ; une solide confiance et l'honnêteté régnaient parmi son personnel, comme les Explorateurs n'avaient personne sur qui compter, en-dehors de leurs camarades et des familles des rares qui s'étaient mariés.
Cette branche de l'armée, bien qu'elle soit la meilleure des trois branches militaires en terme de troupes, n'était malheureusement pas très bien soutenue financièrement et politiquement. Hostiles contre notre corps d'armée, les bureaucrates et les conservateurs avides de pouvoirs la considéraient comme une perte d'argent et semblaient persuadés que les soldats du bataillon gaspillaient les ressources de l'Humanité à cause du manque cruel de survie de ses troupes. Une grande partie des Brigades Spéciales pensaient la même chose qu'eux.
C'est pour cette raison que je vouais une haine à ces hommes qui se faisaient du fric sur le dos du peuple Intra-Muros, celui-là même qui travaillait dur pour gagner leur pain, et ne pensaient qu'à leur nombril. Ils étaient tellement pathétiques, dans leur richesse et les pots-de-vin. Pour eux, nous n'étions que des insectes qui devaient se soumettre, tête baissée, au gouvernement, et que c'est à eux que nous étions redevables.
Quelle bande de pourris, ces mecs !
- Le mieux que l'on puisse faire, c'est d'essayer d'attraper un Titan durant l'expédition, reprit Erwin. Pas un grand, j'entends bien. Mais, en faisant des recherches sur lui, on pourrait comprendre d'où ils viennent et pourquoi ils mangent les humains, alors qu'un tas d'animaux les côtoient à l'extérieur des Murs.
- Et par où veux-tu commencer ces fameuses recherches sur notre futur cobaye ? ironisai-je. Même en le tenant bien, tu crois vraiment qu'il va se laisser faire ? Ce n'est déjà pas évident de se débarrasser d'un déviant quand il y en a un qui te poursuit. Et les têtes de nœuds d'en haut, tu penses aussi qu'ils nous laisseront gentiment agir à notre guise ? Eux et les Brigades Spéciales nous mettent des bâtons dans les roues depuis des années, et ce n'est pas près de changer, crois-moi.
- Je suis d'accord, mais en cas d'éventuelles réussites dans les données récoltées sur le Titan capturé, ça sera un grand pas en avant pour l'Humanité.
- Pour ça, il faudrait déjà que l'on comprenne pourquoi ces monstres humanoïdes ne mangent pas à leur faim.
Contrairement aux hommes, les Titans ne ressentaient aucunement la soif et la faim, étaient dénués de toute forme d'intelligence que ce soit, et dépendaient aussi énormément de la lumière du soleil, ce qui soulevait un tas de questions là-dessus. En presque une centaine d'années aucun de nous n'avait trouvé la réponse à ces mêmes questions.
Le plus étrange était que les Titans ne dévoraient que des humains et ne semblaient intéressés que par eux, alors qu'il existait plusieurs espèces animales à l'extérieur des Murs comme à l'intérieur. Et le pire, c'est qu'ils attaquaient toujours le centre des zones importantes, soit les zones les plus peuplées, alors que les déviants manquaient cruellement d'intelligence ; cela signifiait donc que leur principal intérêt était l'Humanité. Mais pourquoi ? Et pour quelle raison ils nous bouffaient, nous poursuivaient inlassablement ? C'est QUOI, LEUR PROBLÈME ?
- Jusqu'à maintenant, on sait que la nuque est la seule faiblesse des Titans et aussi le seul moyen de les tuer, relatai-je. Et aucune autre découverte là-dessus, à part celle-là. En quoi sont-ils faits ? Ils ne possèdent pas de cuirasse sous la peau, aux dernières nouvelles !
- Akiko, ne te fais pas de nœuds au cerveau, lança Erwin pour me calmer. Les Titans nous en font voir de toutes les couleurs, c'est vrai, mais ils ne sont pas invincibles pour autant. Nos prédécesseurs ont peut-être raté des points importants pendant les expéditions. Qui sait, il existe peut-être d'autres points faibles qui nous seront avantageux par la suite.
- Il y a beaucoup de peut-être dans ta théorie. Et au cas où tu l'aurais oublié, le premier Titan qui a été tué au niveau de la nuque par un soldat du bataillon d'exploration, remonte à l'an 778. Et l'équipement tridimensionnel n'a abouté définitivement qu'en 792, soit quinze ans plus tard. Le bataillon avait alors été mis à pied pendant toute cette période, à cause des conservateurs qui s'étaient mêlés de nos affaires, en 778. Qui dit qu'ils ne recommenceront pas ?
Mike, qui n'avait rien dit jusqu'à présent, intervint :
- Les pertes matérielles et humaines ne jouent pas en notre faveur, en effet. Mais ça ne veut pas dire que nous ne devons pas nous battre pour notre survie. Rien n'est encore perdu. Il faut se relever encore et encore pour venir à bout des Titans. Pour cela, on attendra le moment venu. C'est la clé de notre réussite.
Sa main se posa sur le haut de ma tête en signe de réconfort. Ce geste eut l'effet escompté et je me résignai, calmée.
Au fond de moi, pourtant, cette situation me fit rire, parce qu'entre Mike qui mesurait un mètre quatre-vingt-seize (un vrai géant) et moi, un mètre soixante-seize, il y avait une différence de taille ! A côté de lui, je ressemblais à une fourmi. Mes amis les plus proches me taquinaient par rapport à ça.
Face à cette situation plus que cocasse, je rougis de gêne.
- Euh... Mike, marmonnai-je, t'es bien gentil, mais tu es en train de rappeler à tout le monde que je suis plus petite que la moyenne, tu es au courant ?
- Ça va, ce n'est pas comme si tu mesurais un mètre cinquante, commenta Erwin qui ne put s'empêcher de sourire. Tu restes dans la moyenne.
- Peut-être, mais c'est déstabilisant ! On voit que ce n'est pas toi qui es complexé par ta petite taille, Erwin. Déjà que je viens d'une famille qui n'est pas grande en général... Quant à vous deux, je ne sais pas comment vous faites avec vos deux mètres de haut !
- Akiko, je mesure un mètre quatre-vingt-six, je te rappelle.
- Peu importe ! Ça revient au même. Vous n'êtes pas loin des deux mètres de hauteur !
- Cadets Eyre, Zacharias et Smith !
Notre discussion coupa court et, tous trois, nous nous redressâmes d'un coup, comme électrocutés. A quelques mètres de nous, notre chef d'escouade, Clémens Rosenberg, nous fixait avec une lueur d'amusement dans les yeux et un sourire « prêt à raconter une connerie à tout moment ». D'après ce que j'avais entendu dire, il mesurait un mètre quatre-vingt-dix pile. C'était grand, très grand.

« 𝓣𝓱𝒆 𝓬𝓪𝓹𝓽𝓪𝓲𝓷 𝓸𝒇 𝓶𝔂 𝓼𝓸𝓾𝓵 [SNK ~ Mike X OC] » / TERMINÉOù les histoires vivent. Découvrez maintenant