Give me hope

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Connor

Il est mignon cet Isaac, même si je ne l'ai vu qu'à la faible lueur des réverbères, je dois reconnaître que c'est un beau mec. Il est légèrement plus grand que moi, brun et semble le genre de gars propre sur lui.

Tout le contraire de moi !

Et puis ça m'étonnerait qu'un beau gosse comme ça soit gay.

Je secoue la tête pour chasser ce bel inconnu de mes pensées. Je ne le reverrai jamais de toutes façons. Travis ne va pas tarder à se pointer et je ne suis pas pressé de le voir. Je sais que je suis dépendant de lui, comme à un tas d'autre chose d'ailleurs, donc moins je le vois mieux c'est. J'espère vraiment qu'un jour j'arriverai à rebondir et à me délivrer de cette merde. Pour ça il me faudrait une bonne motivation.

Depuis que je suis à la rue il m'a un peu prit sous son aile. J'exécute quelques petites taches pour lui et en échange j'ai droit à ma dose. Joint, héro, ecsta, coke, peu importe tant que j'ai de quoi m'exploser le crâne. Ah et puis il me permet de squatter son appartement juste le temps de prendre une douche, de manger ou de dormir un peu. C'est loin d'être négligeable même si mes fringues deviennent usées. Comme leur proprio...

Une fois que Travis sera venu, je vais aller au point de rendez-vous habituel pour écouler la marchandise et j'essayerai de me dégoter un minet à amadouer pour pouvoir lui subtiliser quelques vêtements et bouffer à l'oeil. Je ne suis pas fier de profiter des gens avec qui je traîne mais la plupart sont des gosses de riches qui cherchent juste à s'éclater la tête et prendre du bon temps alors qu'est-ce que ça peut bien leur foutre de perdre deux ou trois habits ?

Je patiente encore quelques minutes quand je vois sa voiture se garer un peu plus loin dans la rue. J'avance et entre dans l'habitacle en me frottant les mains.

-Tiens, tout est là. Tu prends ta dose habituelle et je repasse demain soir pour l'oseille. Tu viendras avec moi à l'appartement, t'as besoin d'une bonne douche toi, ricane-t-il.

-Tu me frotteras le dos ? Je demande pour le provoquer.

-Même pas en rêve ! J'suis pas gay moi ! Allez dégage de là !

Cette fois c'est moi qui rigole avant de courir jusqu'à la ruelle où les clients habituels ne vont sûrement pas tarder à se pointer.

Je vends la quasi totalité de la came. Tout ce pognon... Si j'avais le courage de le faire je prendrais le premier train et j'irais le plus loin possible recommencer une nouvelle vie. Malheureusement c'est impossible. Il me retrouverait, je le sais il ne me lâcherait jamais.

Aucun des types venus ce soir n'était à mon goût ou ne semblait intéressé par ma personne. Dommage, je ne rentrerai pas à l'entrepôt les bourses légères et mieux habillé. J'avais l'espoir de revoir ce petit beau gosse brun qui vient une fois par semaine et qui est plutôt doué au lit mais il n'est pas venu. Je ne sais même plus quel jour on est. Je n'en peux plus de cette vie.

Une fois à l'abri dans le bâtiment désaffecté, je grimpe l'escalier en métal jusqu'à l'endroit où mon vieux sac de couchage est posé. Je me glisse à l'intérieur tout habillé et ferme les yeux attendant que le sommeil m'emporte. Encore une fois l'image d'Isaac s'impose dans mon esprit ainsi que ses paroles. Si seulement j'avais un minimum de volonté je ferais ce qu'il m'a dit et j'irais dans un de ces centres. Mais à quoi bon ? Une fois désintoxiqué je ferai quoi ?

Mes parents ne me reprendront jamais à moins de devenir hétéro ce qui n'arrivera jamais. Personne ne m'attendra dehors pour me féliciter et m'accueillir à bras ouverts. Je reviendrai inévitablement vers Travis qui, même s'il est con, est le seul qui se préoccupe plus ou moins de mon sort. Je replongerai dans ce cycle infernal qu'est la drogue, la délinquance et le sexe avec mon plan cul régulier. Autant continuer comme ça. Je glisse petit à petit dans un sommeil agité.

-Connor ! Connor ! Bouge toi y'a les flics !

Je me redresse d'un bond. Qu'est-ce qu'ils viennent foutre ici de si bon matin ? J'entends des voix, des protestations et des cris. Je m'extirpe avec difficulté de ma couche et regarde dans tous les sens. Je palpe les poches de mon blouson pour vérifier que l'argent et le reste de dope s'y trouvent encore. Je tente de descendre les escaliers mais c'est trop tard deux policiers montent déjà.

Je fais demi tour et cherche un endroit où me cacher. Qu'on me déloge est une chose mais si on me fouille je suis mort. Quoique en prison on peut se laver et manger tous les jours. Et puis il doit y avoir des mecs en manque de sexe qui se feraient une joie de... Non mais c'est quoi ces pensées ?

Je cours jusqu'à une armoire dans laquelle je me cache. C'est débile je sais mais je ne réfléchis pas correctement alors que je viens juste d'ouvrir les yeux. Je tente de calmer ma respiration. Le bruit des pas se rapprochent. Par le petit interstice entre les portes je vois le gars en uniforme. Bien foutu...

Je gémis malgré moi parce que ma position est très inconfortable. Quel con ! Ni une ni deux le gars ouvre les portes. Je n'ose même pas relever la tête.

-Isaac t'as quelqu'un de ton côté ? Hurle une voix au loin.

Brusquement je redresse la tête. Putain c'est pas vrai ! J'ouvre grand la bouche. Ce mec est flic, ça c'est vraiment pas de bol... Il baisse les yeux et quand il me reconnaît je remarque un truc dans son regard que je ne saurais interprété.

-Isaac ça donne quoi ?

Il ne répond pas, il me fixe et moi je le défie du regard. Je la joue provoc' alors qu'en fait j'ai la trouille de ma vie. Il semble très hésitant. Il fouille dans une de ses poches en sort un carnet et gribouille un truc.

-Alors y'a encore quelqu'un ? Demande la voix plus proche.

Il se tourne puis revient vers moi. Mon coeur bat à cent à l'heure. Vas-y ose...

Il glisse le bout de papier dans ma main puis referme avec empressement les portes de l'armoire métallique.

-Y'a rien ici ! Crie-t-il en réponse à son collègue.