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Isaac

Pour ne pas le faire attendre trop longtemps j'ai pris ma voiture et arrive en à peine dix minutes au poste. Il est dans un petit bureau avec mon collègue et ami Parker. Il a meilleur aspect que tout à l'heure même s'il semble prêt à tomber de fatigue d'une seconde à l'autre. Quand j'entre dans la petite pièce il se redresse instantanément l'air soulagé.

-Désolé de t'avoir réveillé, s'excuse Parker.

Je secoue la tête, lui demande pourquoi Connor est là et il m'explique dans les grandes lignes sa petite mésaventure. Je soupire agacé mais ne dit rien.

-Comment vous vous connaissez au fait ? Il est pas bavard le gamin ! rigole mon ami.

-C'est euh... Il habite à côté de chez mes parents. Il traîne souvent avec des gens peu recommandables malgré mes avertissements.

J'ai débité mon mensonge sans même réfléchir et le petit gars roule des yeux avant de se lever. 

-Ouais, même qu'il s'occupait de moi quand j'étais plus jeune ! ajoute Connor en ricanant.

-J'ai vu ta date de naissance, lui indique Parker, vous avez pas tant d'écart que ça...

Quel âge il a au juste ?

-J'ai pas précisé de quelle façon il s'occupait de moi, réplique mon faux voisin avec un sourire en coin.

-Oh je vois ! s'exclame mon collègue en riant.

Je pique un fard en grommelant qu'on ferait mieux d'y aller. On rend ses affaires à Connor soit un téléphone, un paquet de cigarettes, un briquet et un porte-feuille puis nous nous dirigeons vers la sortie. Il me suit sans un mot semblant avoir perdu l'usage de la parole après avoir joué au malin il y a une minute. Je lui désigne d'un geste ma voiture m'attendant à ce qu'il refuse de monter mais à ma grande surprise, et pour mon plus grand plaisir, il grimpe dedans en soupirant.

-Tu vas bien ?

-Ouais j'ai pas été mêlé à la bagarre, je cherchais juste un endroit où dormir, marmonne-t-il en baillant.

-T'aurais aussi bien pu venir chez moi comme je te l'avais dit, lui fais-je remarquer.

-Pourquoi ? demande-t-il en haussant un sourcil.

-Pour dormir déjà ! Et manger parce que t'as vraiment une sale tête ! 

-Merci, t'es moins sympa d'un coup, grogne-t-il.

Je meurs d'envie de lui poser des questions sur le connard blond mais je doute qu'il y réponde alors je me contente de rouler jusqu'à mon appartement en silence. Je descends le premier du véhicule en remarquant qu'il s'est assoupit. J'ouvre la portière et le secoue doucement, il sort en s'appuyant sur son pied blessé et pousse un gémissement. Je l'aide ensuite à monter les escaliers et le fait asseoir sur le canapé avant de fouiller dans les placards à la recherche d'un truc à manger. 

-Fais voir ton pied.

-C'est rien Isaac...

D'autorité je lui retire sa converse usée jusqu'à la semelle et sa chaussette puis remonte son jean. Je pince les lèvres en voyant l'état de sa cheville. Je cherche de quoi le soulager et il me regarde les yeux plissés sans rien dire.

-Pourquoi tu fais ça pour moi ?

-Je ne sais pas, je réponds parce que c'est vrai.

A genoux devant lui j'applique une crème apaisante et bande sa cheville. Il me regarde les sourcils froncés mais ne dit rien, j'ai même la sensation que de me voir ainsi devant lui l'amuse. S'il savait...

-Tu devrais aller te coucher. A cause de moi tu vas être crevé pour le travail.

-C'est gentil de t'inquiéter pour moi mais je ne bosse pas alors j'ai tout mon temps. Tu peux prendre ma chambre je vais dormir ici.

Il proteste mais il a plus besoin d'un bon lit que moi. Une bonne nuit de sommeil ne lui fera pas mal. Je le conduis jusqu'à ma chambre et reste sur le pas de la porte pendant qu'il porte un regard envieux sur mon grand lit. Le pauvre, depuis combien de temps n'a-t-il pas dormi dans autre chose que le vieux sac de couchage qu'il y avait à l'entrepôt ?

-Le lit est assez grand si tu veux... commence-t-il. Je veux dire, si ça te dérange pas de dormir avec un autre mec on peut aussi bien le partager.

Je me contente de hocher la tête alors qu'il se déshabille ne gardant que son boxer. Je déglutis en remarquant son corps pâle et frêle. Il n'y a pas que d'un endroit confortable où dormir dont il manque. Quand il remarque que je le dévisage il se glisse sous la couette en poussant un soupir ravi qui me fait frissonner. Je dois me contrôler parce que ça fait trop longtemps que je suis seul et il n'a pas l'air d'avoir remarquer que je suis gay moi aussi. En même temps, ce n'est pas écrit sur mon front. J'ôte mes vêtements, éteins la lumière et m'allonge à ses côtés en imposant une petite distance de sécurité.

-Qu'est-ce que tu vas me demander en échange ?

-De quoi tu parles ? je demande intrigué.

-En général les gens ne sont pas aussi gentils que toi. Tu ne peux pas être aussi parfait, c'est impossible. Tu vas forcément vouloir que je fasse un truc pour toi.

-Mais non ! je proteste. 

-C'est toujours comme ça que ça fonctionne. On te rend un service et en échange tu dois faire pareil.

-Tu parles du connard blond ? je grogne.

Il laisse échapper un petit rire rauque. J'aime bien ce son et j'aimerais l'entendre encore à l'avenir.

-Tu lui as déjà trouvé un surnom ? rigole-t-il. Travis c'est... compliqué.

-Ouais c'est un mec qui pousse des petits jeunes qui n'ont rien à perdre à vendre sa merde en échange de quoi ? Qu'est-ce que ce mec fait pour toi ?

Mon ton est agressif mais je n'y peux rien, je ne supporte pas le genre de personne qui abusent de la faiblesse des autres pour leur faire faire n'importe quoi. 

-Il m'aide à sa façon, c'est tout ce qui compte.

-Non, t'aider ce serait te donner un toit et de quoi te nourrir convenablement pas te faire vendre de la drogue ! Et fumer de l'herbe aussi ! 

-C'est pas ce qui va me tuer, rétorque le petit gars.

-Qui sait ? Tu ne sais pas comment ce genre de chose peut finir ! 

-Et je ne veux même pas le savoir, soupire Connor.

-Si tu le voulais, si tu essayais, je suis certain que tu trouverais des gens plein de bonnes intentions pour te remettre sur le droit chemin. Des gens de confiance qui t'apporteraient ce dont tu as besoin, sans arrières pensées.

-J'ai juste besoin d'espoir, souffle-t-il avant de remuer légèrement.

Ses mots me touchent énormément. Je pourrais être cette personne s'il me laisse une petite place dans sa vie. 

-Allez, dors maintenant.

Quelques minutes plus tard alors que je pense qu'il dort je le sens s'approcher de moi pour venir coller son corps froid contre le mien qui est au contraire bien chaud. Je ne dis rien et me place de façon à ce qu'il puisse être totalement à l'aise.

-Merci. Merci pour tout, chuchote-t-il en embrassant ma joue.

Il ne peut pas le voir dans l'obscurité de la chambre mais mon sourire doit être étincelant.

Give me hopeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant