True Love

Partie trente neuf

Une sublime maison a l'architecture atypique s'impose dans un lotissement au delà du sommet des vallées pleines et luxuriantes. Elle domine toutes les autres habitations d'une part grâce à son originalité et sa devanture aux multiples baies vitrées. Je marche lentement en admirant avec émerveillement derrière le portail blanc crème, un jardin arboré de fleurs aux couleurs chatoyantes ainsi que la piscine à débordement offrant une vue imprenable sur une partie de la ville encore illuminée.

— J'ai vécu dans cette baraque presque toute mon adolescence.

Je sursaute en me retournant jusqu'à la voix rauque et suave du beau brun à la chevelure en bataille, assis sur un petit banc.

— Le paysage est encore plus beau que celui d'une carte postale.

Le silence prenant qui triomphe dans l'immensité de la pleine verte me coupe le souffle. Je le regarde avec insistance et dans la pénombre, ses yeux brillent davantage comme deux petites étoiles.

— Les personnes qui vivent ici sont encore plus extraordinaires que cette vue. Il se racle la gorge en me murmurant spontanément ses quelques mots.

Je m'assoie à ses côtés en rejoignant lentement ma main à la sienne.

— Il y a une raison à ce que tu reviennes ici ? Ma voix est tellement basse que cela en devient presque douloureux.

— On avait dit plus de secrets, non ?

Je suis plutôt surprise et pourtant cette petite attention me touche à un point inimaginable. Mason a besoin d'extraire le négatif de lui-même en commençant au tout début de l'histoire et ça fonctionne aussi avec leurs deuxième famille. Je veux juste comprendre pourquoi maintenant et surtout qui est vraiment le petit garçon qui a perdu ses parents aussi soudainement qu'une volée de poussière.

— Deux jours après noël, mon père a eut l'accident de voiture.. il est resté en réanimation plus de six mois et a finalement succombé à ses blessures. Il empoigne le rebord du banc, le regard vide sur l'incroyable paysage. Je voyais ma mère qui pleurait tous les jours en cachette dans sa chambre et c'était franchement insupportable.

Il respire un peu plus bruyamment en  encaissant en même temps la vérité en plein visage.

— Angelina ne comprenait pas grand chose, elle était trop petite.. j'imagine qu'elle croyait qu'il était en voyage et que notre père reviendrait un jour ou l'autre à la maison. Je reste silencieuse en l'écoutant. Putain, quand ma mère c'est barrée de la maison, quelques heures après, il y avait déjà les services sociaux et un connard de mec responsable d'un centre pour jeune.

— Je suis désolée, Mason.. si c'est trop difficile je peux le comprendre.

— Non c'est bon, je crois que j'en ai besoin tout compte fait.

Les lumières de la maison s'illuminent les unes après les autres dans un moment propice aux  révélations. La porte s'entrouvre lentement en  dévoilant sous le porche, une jeune femme à la chevelure rousse flamboyante, un sac à dos à la main.

— C'est pas vrai, c'est bien toi ?

Elle s'immobilise soudainement en plongeant un instant, ses yeux bruns caramels dans ceux de Mason.

— Comme tu le vois.

Cette belle femme s'avance lentement jusqu'à lui en le prenant aussi fort qu'elle le peut dans ses bras. Je ne peux pas dire que je suis jalouse de leurs complicités flagrantes, mais cette situation me dérange d'une certaine façon. Mason est tellement distant d'habitude, que je ne comprends pas vraiment pourquoi il ne se raidit pas comme il le fait systématiquement. Ceux connaissent-ils plus qu'il ne pourra jamais l'admettre ? J'espère que non.

— Bon sang, tu es vraiment une enflure ! Je croyais que tu ne reviendrais plus jamais.. Elle encadre le visage de mon Mason entre ses mains. Tu étais où ?!

— Je suis a Columbia depuis quelques mois, je voulais être seul un moment.

Elle ferme les paupières en retenant sans succès des larmes qui perlent à grande vitesse le long de ses pommettes.

— C'est pas une raison valable, désolée trouve mieux la prochaine fois ! La petite brune lui fait un bon doigts d'honneur puis se retourne soudainement jusqu'à moi en me détaillant de tout mon long. Elle est vachement belle, tu l'as trouvé où celle-là ?

Elle parle à Mason en faisant comme si je n'étais pas là et c'est plus ou moins ce qui me dérange le plus dans cette histoire.

— Il ne m'as pas trouvé.

Je fronce les sourcils en la dévisageant une minute.

— Désolée c'était pas ce que je voulais dire, c'est juste que c'est rare qu'il ramène quelqu'un ici. Elle balaye le périmètre de la main en souriante gênée. Il me reste encore quelques minutes, on rentre ?

J'ai le cœur qui bat la chamade en regardant du coin de l'œil Mason toujours immobile et silencieux. Il esquisse un petite sourire faux et marche jusqu'au perron en me faisant signe de le rejoindre.

— Tu n'es pas obligé de le faire.. je murmure cette petite phrase en espérant intérieurement que ça ne va pas le rendre encore plus mal avec le temps.

— Ils méritent au moins une explication.

La bile me remonte dans la gorge en passant le seuil de la porte. Comment vont-ils prendre le fait qu'il réapparaisse soudainement après un long moment d'absence ?

— Mason ?!