*******EMMA*******Mon radio-réveil affiche 08h45. Je me sens bien reposée quoi que toujours un peu vaseuse et dépitée. L'alcool seul n'est pas en cause. C'est mon état général avec tout ce qui se passe qui engendre cela.
J'ai passé la journée du vendredi, le lendemain de notre retour, à me traîner entre mon lit et le canapé et à pleurer toutes les larmes de mon corps. Les volets et les rideaux sont restés fermés. Je n'ai pas répondu une seule fois à mon téléphone que j'avais pris soin de mettre sur silencieux. J'ai seulement pris le temps, au cours de la journée d'envoyer un message à Brock et Nick – je leur avais suffisamment fait peur comme ça – leur disant que j'appellerai le lendemain, mais que pour le moment j'avais besoin de repos. J'aurais été bien incapable d'aligner deux mots sans fondre en larmes de toute façon.
Ce matin j'ai l'impression que cela va mieux. Enfin je crois. J'espère.
Je sors de mon lit, le temps de mettre la main sur mon téléphone, resté dans le salon et retourne me pelotonner sous ma couette, bien au chaud, bien à l'abri du reste du monde. Souvent on fait cela – en se mettant en position fœtale – comme pour se rassurer et surtout se rappeler le cocon que formait le ventre chaud maternel.
Une sorte de résilience ?
En était-il de même pour moi ? Etait-ce à son ventre que je me référais quand je prenais la même position ? Malgré tout ce à quoi ça renvoie, je me rends compte que cette position reste un réconfort pour moi. J'ai le souvenir ancré en moi, de ma mère qui venait parfois se mettre dans mon dos et me tenait fort contre elle que j'étais malade, quand j'avais été grondée par mon père ou Brock, quand j'étais malheureuse sans même savoir pourquoi. Des chagrins d'enfants tout simples. Je n'étais pas sortie de son ventre mais cette position fœtale est aussi en rapport à elle, Gayle, ma mère. Comme j'aimerais revenir à cette époque où ces problèmes seuls me donnaient l'impression de l'insurmontable, et comme j'aimerais n'avoir que ceux-là.Elle, elle n'a eu personne pour la protéger, personne pour la rassurer. Elle a dû avoir tellement peur ! Heureusement que Gayle a été là pour elle sur la fin. Cela me réconforte et je me dis que grâce à ma mère, elle m'a peut-être un peu moins détesté et qu'avec le temps elle m'a même pardonné, d'être qui je suis.
Je me faisais des nœuds au cerveau pour comprendre ce qu'elle avait vécu parce que j'avais besoin de comprendre. Celle qui m'a portée, avait-elle seulement été heureuse avant cela et plus important, a-t-elle pu l'être après ma naissance. Le fait de m'avoir laissée à d'autres, lui avait-il permis de trouver du réconfort, un semblant de paix, de bonheur ? Avait-elle pu se reconstruire assez pour avoir d'autres enfants ou ai-je définitivement mis fin à ses désirs de maternité. Peut-on seulement espérer une telle chose après avoir vécu l'enfer ? Je n'en savais rien !
M'a-t-elle détestée à la seconde même où elle a su que je poussais en elle. Peut-être même a-t-elle cherché à me faire mourir alors que je n'étais qu'un fœtus ? Et puis-je vraiment lui en vouloir. Elle devait avoir peur de ce que je représentais et du rappel constant de sa souffrance, de l'horreur qu'elle avait vécue. Peut-être avait-elle peur en me regardant de ne voir que son bourreau et son acte odieux ?
Comment avait-elle pu survivre à tout cela. Etait-elle encore vivante ? Avais-je envie de la retrouver ? Elle ne devait sûrement pas avoir envie de me revoir. Moi son cauchemar !
Trop de souffrance, trop de mauvais souvenirs. Qui voudrait revivre son pire cauchemar ? Qui voudrait le voir prendre vie devant ses yeux ? Personne assurément ! Cette femme à suffisamment souffert à cause de moi, je ne peux pas m'imposer dans sa vie maintenant. Si elle a réussi à m'oublier, j'en suis heureuse pour elle mais je ne le saurai jamais. Je n'ai pas demandé à Brock ses coordonnées.Oui sincèrement j'espère qu'elle a une belle vie loin de moi.
Je me rabroue pour me sortir de mes pensées moroses, je suis désolée pour ce qu'elle a vécu mais je ne pouvais malheureusement rien changer au passé.
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Destins croisés : It's always been us T2
RomansaIl est temps de poursuivre les aventures d'Emma et Henri ne croyez-vous pas ? Nous les avions laissé à Cornwall le soir du réveillon de la Saint Sylvestre 2014, sur le vœu d'Henri : "Bonne année Emma et j'espère qu'elle nous apportera beaucoup". En...