CHAPITRE TRENTRE SIX

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« Alors ? s'impatientait Octave.

— Attends, ça charge. »

Créa avait le nez sur l'ordinateur, tandis qu'Octave se lamentait sous l'oreiller du canapé. Ses parents l'avaient déjà appelé trois fois pour connaître ses résultats, mais le site saturait.

« On va jamais y arriver, se désespéra-t-il. C'est un signe, on me préserve de voir la catastrophe.

— Pense aux vacances qui nous attendent, tenta Créa pour le détendre.

— Pas si je vais aux rattrapages. »

La jeune fille s'acharnait à coup de clics sur la souris, impatiente elle aussi de connaître ses propres résultats.

« Octave, s'écria-t-elle. Ça marche !

— Alors ? répéta-t-il.

— Je cherche ton numéro, s'exclama-t-elle en parcourant des yeux la liste. Tu l'as ! »

Le garçon se précipita sur l'écran pour le voir de ses propres yeux, il poussa un petit cri aigu et se jeta au cou de Créa.

« À ton tour », lui susurra-t-il fou de joie.

Elle se rendit compte du tremblement de ses mains lorsqu'elle reprit en main le clavier. Les numéros étudiants défilaient sous ses yeux.

« Je ne comprends pas, lâcha-t-elle soudain.

— Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? », s'affola-t-il.

Octave poussa Créa pour mieux voir l'écran.

« C'est quoi ton numéro déjà ? »

Le doigt de la jeune fille se posa sur une série de chiffres. Octave suivit la ligne du tableau, sans remarquer les larmes qui coulaient sur les joues de Créa.

« Putain, jura-t-il dans l'euphorie. Félicitations ! »

**

« Maman ?

— Bonjour ma chérie.

— Les notes ont été publiées. J'ai réussi.

— C'est vrai ? s'émerveillait la petite voix au téléphone.

— Oui, répondit Créa en refoulant le sanglot qui logeait dans sa gorge. J'ai eu treize. Juste ce qu'il fallait pour rattraper le sept du premier semestre.

— Ma chérie », répéta sa mère bouleversée.

Son timbre de voix faisait virevolter le sourire de Créa, elle y sentait toute la fierté et les espérances qu'on avait placé en elle.

« On devrait fêter ça, se reprit la bonne femme à l'autre bout de la ligne. Rentre à la maison. Je vais appeler ton père. On fera des pancakes, moelleux et pas trop cuits, comme tu les aimes. Rentre à la maison. »

Créa soupira d'amertume.

Depuis quand n'avait-elle plus envie de retourner dans son patelin ? La variation de ses envies s'était étrangement tourné vers l'avenir, au lieu de rester dans l'obscurité de ses remords. Était-ce enfin le grand envol quel redoutait par le passé qui la poussait, à présent, à l'indépendance ?

Elle devait y retourner. Elle devait y retourner pour dire aurevoir. 

« Je prendrais le bus demain, capitula-t-elle. 

— Je t'attends pour midi ?

— Oui, parfait.

— À bientôt, Créa.

— À bientôt, maman. »

**

Ce soir là, dans l'appartement d'Octave, un silence pesant imprégnait les murs tandis que Créa remplissait son sac de voyage. Il n'était pas encore revenu de sa soirée avec ses amis. La jeune fille l'attendait pour aller se coucher. Le lendemain, elle repartirait pour une durée indéterminée.

Tout ce flou qui vaguait dans sa vie ne semblait plus autant l'effrayer qu'auparavant, pourtant il y était plus omniprésent encore. Où serait-elle après l'été ? Continuerait-elle sa licence ? En dépit de tous les efforts qu'elle avait fournis pour obtenir son année, se sentait-elle capable d'abandonner une nouvelle fois, de tout recommencer ?

Elle somnolait devant la télévision lorsque Octave rentra. Il sentait un peu la cigarette, la menthe et le shampooing. S'il y avait bien une chose qu'elle ne voulait pas quitter, c'était bien cette odeur qui la berçait désormais depuis quelques semaines.

« J'ai rencontré mon prince charmant, ce soir, lui souffla-t-il au cœur de ses cheveux emmêlés, alors qu'il s'asseyait à ses côtés.

— Le vrai ?

— Je ne sais pas encore, peut-être. »

Créa souriait, tandis que la télévision menaçait de s'éteindre depuis le temps qu'elle était allumée.

« Il te tiendra compagnie lorsque je ne squatterais plus ton salon », ricana-t-elle.

Octave attrapa la télécommande et appuya sur une touche pour empêcher l'émission de s'arrêter.

« Tu pourrais rester, suggéra-t-il.

— Ne soit pas égoïste, ironisa-t-elle. Ma famille n'apprécierait pas ton idée, pas après le repas que prépare ma mère pour demain.

— Non, je veux dire, quand tu reviendras, tu pourrais rester ici au lieu de prendre une chambre étudiante. On deviendrait colocataire. »

Créa venait enfin de trouver son point d'attache, celui qui dispersait le brouillard et éclairait son chemin à prendre.

Elle prit une grande bouffée d'air, éclata d'un rire franc, puis se laissa aller dans les bras de son ami. Elle n'aurait pas rêvé mieux comme perceptive pour son avenir.


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Crépuscule sous les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant