Chapitre 2 : La rencontre

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Le déchargement des cartons se conclut assez rapidement. L'un des instants mémorables fut celui où je dus aider ma belle-mère à transporter son énorme (et horrible) fauteuil et qu'il me tomba sur le gros orteil !

« Purée de pomme de terre sautées ! » m'exclamai-je en me sautillant sur place.

Ma mère nous avait toujours interdit de dire des grossièretés, c'est pourquoi là où d'autres lâchaient des p*tains, m*de, Elsa et moi laissions échapper des insultes...étranges. J'étais d'ailleurs spécialiste des jurons avec des fruits et légumes. Quand j'étais petite je m'étais cognée le petit doigt de pied et j'avais réussi à dire entre deux sautillements :

« Purée de pomme de terre sautées... à l'eau...au four...sur le barbecue ! »

Cela avait fait rire toute la famille, et mon père m'avait même acheté Le livre des fruits et légumes oubliés afin que je puisse enrichir mon vocabulaire ! C'est ainsi que lorsque j'étais véritablement en colère, ou que j'avais extrêmement mal, je pouvais pousser des jurons avec rutabaga, topinambour ou arroche ! Dans ce cas-ci la douleur n'était pas assez forte. Sophie eu l'air paniquée :

« Oh mon Dieu ! Tu as très mal, tu peux encore le bouger ?! C'est peut-être cassé !

-Ça va, ne t'inquiète pas ! »

La vérité était que j'avais quand même mal, la douleur semblait augmenter de seconde en seconde, comme le volume de mon orteil ! Je sentais venir un juron avec un rutabaga... Sophie me soutint jusqu'à une chaise qu'un des déménageur avait apporté. Celui à qui j'avais dit que ma mère avait disparu m'apporta également un tabouret, et Sophie revint en courant avec un poche de glace. C'est ainsi que finalement je me retrouvai de nouveau à l'arrière de la voiture, en compagnie de mon père et de l'un des déménageurs qui avait accepté de nous conduire jusqu'au cabinet médicale le plus proche.

Nous traversâmes le petit village de Miremont où se trouvait notre nouvelle maison. Puis après avoir roulé pendant un temps qui me paru infini, nous arrivâmes dans la ville de Pontomur. L'homme guida papa jusqu'à un petit bâtiment d'aspect miteux où se trouvait le cabinet. Il n'y avait personne dans les rues. Tous les rideaux étaient tirés, l'endroit semblait morne et vide. Le médecin qui me reçut sembla étonné d'avoir une patiente en plein après-midi.

Pendant qu'il examinait mon pied il me raconta ses vacances. Lorsqu'il apprît que je venais de déménager, il s'empressa de me raconter le moment où sa fille avait elle aussi quitté Pontomur pour s'installer à Lyon. Il m'assura qu'elle s'y était plu, qu'elle avait fait de belles rencontres... Je me demandais si papa n'avait pas payé toutes les personnes du coin pour qu'elles m'assurent que j'allais être heureuse dans ma nouvelle maison avec l'air pur de la campagne et pleins de copains, et si tous les adultes avaient l'habitude de raconter la vie de leurs filles.

Finalement j'appréciai tout de même ce docteur car il me diagnostiqua une simple fêlure et il me recommanda de mettre une poche de glace dessus et de me reposer. Il me donna même une sucette !

« Il est doué pour se faire de l'argent, ce médecin ! dis-je à mon père. Il donne des sucreries à ses patients alors que ce n'est pas vraiment recommandé pour la santé ! »

Mon père éclata de rire. Cela faisait longtemps que nous n'avions pas eu un moment de complicité, et cela me fit plaisir. Je cessai de sourire cependant lorsqu'il se remit à me parler de la superbe vie que nous allions avoir ici, et de ma nouvelle école.

« Apparemment elle est située près d'un joli petit bois, tu auras une belle vue, puis il n'y a pas beaucoup d'élèves, tu ne seras pas trop déstabilisée, en plus la proviseure m'a dit qu'il y a un atelier d'écriture prévu sur le temps du midi... »

Le Papillon RougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant