Le Papillon Rouge

Chapitre 22 : L'enquête est compromise.

« Ce n'est pas possible. Dis-je. Cela ne peut pas être l'ex-petit ami de ma mère à 17 ans.

-Ce serait incroyable en effet que tu le croises dans ce trou paumé... les possibilités sont quasiment nulles. Approuva Edmond.

-Mais elles existent ! lança Agathe.

Elle se leva et fit les cents pas autour de la table. Nous étions attablés chez moi, dans la cuisine. Sophie nous avait préparé un goûter royale, puis nous avait laissé « entre jeunes ». Je l'entendais s'activer dans le jardin.

-C'est la seule piste que je n'ai pas creusé. Continuât-elle en réponse à nos regard stupéfait. Nous l'avons écarté dès le début, pensant que c'était trop surréaliste. Mais au fond, cette affaire est surréaliste : une mère qui a disparu depuis cinq ans sans qu'on en retrouve trace, c'est incroyable. Normalement, dans ce genre d'enquête, la victime est retrouvée au bout de quelques jours... morte ou vive.

Je frissonnai. Edmond jeta à sa sœur un coup d'œil qui signifiait : « Fais attention à ce que tu dis ! »

-Mais c'est complètement dingue ! m'exclamai-je. Qu'est-ce qu'il ferait ici !?

-Peut-être qu'il fait comme nous, peut-être qu'il cherche ta mère !

-Tu penses à la piste de la vengeance, parce qu'elle a quitté leur groupe ?

-Oui, j'ai lu attentivement le carnet. La scène du lynchage collectif... ça m'avait l'air d'être du sérieux.

-C'était un petit gang, rétorqua Edmond, ils étaient adolescents à l'époque, je ne pense pas que le groupe ait continué d'exister une fois qu'ils ont quitté le lycée...

-Et pourquoi pas ? Si le « petit gang » était devenu grand ?

-Tu penses à une sorte de mafia ? demandai-je.

-Oui, lorsque Brian a dit à ta mère qu'il pourrait lui offrir un avenir, elle a répliqué qu'elle voulait « un avenir honnête ». Et s'ils s'étaient tous lancés dans le trafic de drogue ou quelque chose comme ça ? Ils avaient l'air d'avoir de belles voitures...

-Tu t'emballes un peu... dit le jeune homme. Je ne crois pas beaucoup à cette histoire de drogue...

-Peut-être qu'ils ne trafiquent rien du tout mais qu'ils sont restés en bande. Ils ont peut-être formé une sorte de secte... avança Agathe.

-Et ils voudraient se venger de maman après trente ans ?

-Le soir où ta mère a dit à Brian qu'elle en aimait un autre, il avait l'air vraiment en colère. Qui sait, il aurait pu ruminer l'affaire pendant des années, et attendre le bon moment pour agir. Un peu à la manière d'un Odilon.

Je compris qu'elle était au courant des brimades que j'avais subi :

-L'histoire de la cantine ne remontait qu'à quatre ans, le laps de temps n'est pas du tout le même !

-Mais en amour, fit le jeune homme, tout peut paraître très court.

Il y eut un silence.

-Enfin, on n'est même pas sûr que ce soit notre Brian alors... grommelai-je.

-Moi, j'en suis persuadée... » n'en démordait pas la fillette.

Nous replongeâmes dans notre mutisme. Je leur servis un verre de jus d'orange.

Agathe sortit d'un sac que je n'avais pas remarqué le dossier dans lequel elle consignait toutes les données sur l'enquête. Elle se mit à relire ses notes.

« Quelque soit leur identité, je suis sûre que c'est eux qui ont fait cette sinistre œuvre d'art avec les papillons ! lança Edmond.

-Parce qu'ils ont une tête à commettre du vandalisme ? répliquai-je avec un petit sourire.