Le Papillon Rouge

Chapitre 16 : La vérité.

Allongée sur mon lit, je me repassai la conversation avec Agathe :

« Je pense qu'ils l'ont tué. »

Cela n'avait aucun sens, cela n'était pas possible, je ne voulais pas le croire. Je me rappelai de ma réponse :

«Mais enfin pourquoi ?! Pourquoi auraient-ils tué ce chien ?

-Peut-être était-ce un accident, ils ont simplement voulu s'amuser en mettant le chien dans l'eau... sauf qu'il ne savait pas nager !

-Mais pourquoi Edmond n'a-t-il rien dit ? demandai-je.

-C'est évident non ? avait répliqué la fillette d'un air agacé. Il n'allait pas dénoncer la moitié des enfants du village ! Il ne voulait pas se les mettre à dos ! »

Je fermai les yeux, tentant de faire taire les horribles images que produisaient mon cerveau surchauffé. Le cadavre du chien que l'on sort de l'eau. Edmond, 12 ans et quelque, courant en larmes jusqu'à sa sœur pour lui annoncer la nouvelle.

Je tentai de me raisonner. Agathe devait avoir à peine quatre ou cinq ans à l'époque. Elle ne pouvait se souvenir de l'affaire avec autant de précision. Et même si elle avait remarqué des choses étranges, elle n'en avait certainement pas saisi le sens. Elle déformait la réalité.

« Souviens-toi, dit une petite voix dans ma tête. Agathe fait preuve d'une maturité étonnante et porte sur le monde un regard juste. Si elle exagère peut-être un peu, il y a quelque chose d'étrange là-dessous. »

Je me tournai dans mon lit en grognant. Je ne pouvais pas imaginer Saba s'amusant à torturer un chien innocent.

-Les gens d'ici s'ennuient ! » m'avait lancé la fillette en guise de salut.

Edmond ne voulait pas aller à une sortie organisée par Saba car la dernière fois qu'il y était allé, il avait perdu un être cher. Même si la jeune fille et ses amis n'étaient sans doute pas impliqués dans l'affaire, je pouvais comprendre qu'il ne soit pas pressé de renouveler l'expérience. Et s'ils étaient responsable d'une façon ou d'une autre de la mort du chien... alors il avait d'autant plus de raison de refuser de s'amuser en leur compagnie !

Il fallait que je tire cette affaire au clair. Mais comment aborder le sujet ?

« Salut Saba, je me demandais, il y a trois ans as-tu volontairement ou involontairement tué un jeune chien en le noyant dans une rivière ? »

Je me redressais sur mon lit et allumait ma lumière, bien décidé à attraper mon portable et à envoyer un SMS à Edmond pour m'excuser et demander des précisions. Alors que je descendais de mon lit, je m'arrêtais en plein élan. Essayer de se réconcilier par texto était une mauvaise idée, aborder un sujet sensible par ce biais l'était encore plus ! Le jeune homme n'allait pas apprécier.

Je n'avais pas le choix, il fallait que j'interroge Saba, je devais faire preuve de subtilité, l'amener à parler elle-même de ce qui c'était passé. Je pourrais dire que j'étais triste d'être brouillée avec Edmond, (ce qui était vrai), et lui demander de me raconter leurs souvenirs de collège. Ou encore l'interroger pour savoir s'il était vrai que le jeune homme possédait un autre chien avant Lupa...

Mes projets furent contrariés le lendemain matin. Je me levais en me sentant légèrement fiévreuse. Je continuais bravement jusqu'à la cuisine en tremblant de tous mes membres.

« Maëlys, tu te sens bien ? me demanda Sophie. Tu m'as l'air un peu nauséeuse.

-Je vais très bien. Balbutiai-je.

Et je m'écroulai le nez dans mes tartines. Quand je revins à moi, mon père me releva et m'aida à monter les escaliers pour que je puisse m'étendre. Ensuite, papa me prit la température.