Chapitre 21 : Encore des papillons.

11 1 0
                                    

Cette accalmie dura jusqu'au mois de mars. Les cours reprirent, Odilon finit par changer de classe car sa mère trouvait qu'il était trop « rejeté » en Seconde 2. Agathe se démenait pour retrouver une trace de ma mère. Elle la perdait après Clermonferand. Plusieurs fois elle me fit visionner des images de caméra dans les gare. On y voyait une femme rousse marcher d'un pas rapide. Elle semblait scruter l'horizon autour d'elle, mais je ne pouvais affirmer avec certitude qu'il s'agissait de ma mère.

« Je la retrouverai ! dit Agathe avec détermination en se passant une main dans les cheveux. Elle avait des cernes sous les yeux, la fillette faisait des nuits blanches, penchée sur des plans de train, des coupures de journaux, des copies du dossier de police. Edmond et sa tante s'étaient fâchés à plusieurs reprises parce qu'elle refusait d'aller au lit. Moi-même je lui avais demandé plusieurs fois de ne pas en faire trop. Une fois, j'avais même suggérer d'abandonner tout.

« Maëlys, avait répliqué Agathe, tu sais bien que tu ne connaîtras pas la paix tant qu'on ne l'auras pas retrouvé ! Il faut continuer ! »

Puis des évènements étranges commencèrent dans le petit village de Miremont. Tout d'abord, il y eu des affiches avec de grands papillons rouges barrés affichées un peu partout sur les murs. Elles étaient assez sinistres, et personne ne savait pour quel évènement elles avaient été placardées. Lorsque le père de Saba interrogea le maire à ce sujet, alors qu'il venait boire un verre dans son bar-tabac, ce-dernier pensait qu'il s'agissait d'un acte de vandalisme. Aucune animation n'était prévu pour les mois à venir.

Puis, aux alentours d'avril, d'étranges personnages arrivèrent dans le village. Vêtus comme des punks avec des vestes en cuirs et des vêtements déchirés, conduisant de grosses voitures noires qui rugissaient dès qu'on allumait le moteur, ils semblaient tout droit sorti d'un concert de rock. Il détonnait singulièrement parmi les mirmontais, qui ne les regardaient pas d'un très bon œil. Ils logeaient tous dans le petit hôtel du village, et investissaient le bar-tabac aux heures des repas. Sinon, ils sillonnaient Miremont et ses alentours, comme s'ils cherchaient quelqu'un.

On leur attribua d'ailleurs le deuxième incident sinistre qui s'abattit sur Miremont Je le remarquai alors que j'allais faire les courses en compagnie de mon père. Sur le mur de l'église quelqu'un avait cloué des centaines de papillons morts. Ils avaient tous au préalable été trempés dans de la peinture rouge. Cette sinistre œuvre d'art me mis mal à l'aise, comme si je connaissais la personne qu'elle visait, car de toute évidence, elle avait pour but d'intimider quelqu'un.

« Mais qui ? demanda Edmond.

Nous étions dans le car du soir. Pour une fois, c'était Gilles qui conduisait. Il avait dû remplacer en urgence la femme qui faisait normalement la tournée à cette heure-ci. Depuis l'arrivée des rockeurs, elle s'était mise en arrêt maladie et ne sortait pas de chez elle.

-Pourtant, vu son look, elle aurait dû se sentir à l'aise en leur présence, non ? avait lancé Benjamin d'un air pensif.

-Et si c'était elle qu'ils cherchaient à intimider ? hasardai-je.

-Je ne sais même pas s'ils l'ont déjà croisé suffisamment longtemps pour mettre un nom sur son visage ! Cela fait des années qu'elle vit à Miremont. »

Nous eûmes malheureusement l'occasion de côtoyer de plus près ces sinistres individus. Alors que j'aidais Edmond et Agathe à toiletter Lupa, (exercice particulièrement ardu car la chienne ne cessait de se débattre), nous entendîmes un bruit de voiture. Les deux grosses berlines noires des punks s'arrêtèrent devant nous. L'un d'eux sorti de la voiture, suivit par une femme et un autre homme.

« S'cusez-moi les jeunes, dit-il avec un sourire qu'il voulait engageant.

Nous nous tassâmes légèrement sur nous même. Sous mes doigts, je sentis que Lupa tremblait. Je lui jetai un coup d'œil, elle avait les yeux exorbité par la peur. Je regardai Edmond. Il me fit signe de la lâcher et nous la laissâmes filer ventre à terre jusqu'à sa niche.

-J'crois que j'ai fait peur à vot' chien.

-Ne le prenez pas pour vous, elle a peur des inconnus en général. Fit le jeune homme.

C'était un mensonge, j'en avais eu la preuve quand j'avais rencontré pour la première fois la chienne.

-Ah ok, reprit l'homme. Je voulais juste savoir, les habitants de ce bled semblent pas trop disposés à nous parler, s'il y avait de nouveaux arrivants dans l'coin.

-Euh... je suis arrivée ici l'été dernier, dis-je bravement, et un garçon de ma classe, Odilon Gédéon est arrivé il y a quelques mois.

-Y a pas eu de femme seule, de femme qui avait l'air en cavale ?

-Non. Dit Agathe d'un ton abrupte.

C'était la première fois qu'elle ouvrait la bouche depuis l'arrivée des voitures, elle fixait l'homme d'un regard pénétrant.

-Bon, ben merci.

-Elle est rousse, ajouta soudain sa camarade. Avec des yeux noirs.
-Laisse tombé Jo, elle serait sûrement pas venue ici de toute façon. Elle irait plutôt dans les grandes villes ! »

Ils nous firent un signe de tête, et commencèrent à s'éloigner. Mue par une étrange intuition, je dis soudain :

-Au fait, nous n'avons même pas été présentés, je m'appelle Maëlys, et vous ?

-Brian Josh, Mlle, répondit l'homme avec un sourire. Au plaisir ! »

Et il remonta dans sa voiture. Je m'efforçai de conserver mon sourire aimable jusqu'à ce qu'elle ait disparu dans le virage.

Le Papillon RougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant