Chapitre 8 : La pipe d'ivoire

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Je racontais tout à Edmond. Tout, depuis mes recherches infructueuses dans Paris après les cours jusqu'à ma sœur poursuivant Odilon à travers la cantine en passant par mon refus de manger.

Il me regarda quelques instant puis me demanda :

« Est-ce que tu veux évoquer les bons moments que tu as passé avec elle ?

Je fus très surprise. Personne ne m'avait encore demandé cela, au contraire, tout le monde essayait de trouver quelque chose qui n'allait pas chez ma mère, quelque chose qui pouvait expliquer les raisons de sa disparition.

-Maman... était rousse, comme moi. Elle souriait et riait fort. Elle était plus âgée que mon père. Elle voulait absolument améliorer sa culture. Elle pensait qu'elle n'était pas assez intelligente, elle trouvait qu'elle avait pris trop de retard, car elle n'était pas attentive en classe quand elle avait notre âge. Maman était toujours prête à nous aider. Elle nous emmenait en balade dans les parcs de Paris à la recherche de trésors qu'elle avait dissimulé la veille... »

Je me rendis compte que je souriais malgré moi. Cela faisait longtemps que je ne m'étais pas remémorer tous ces bons moments.

Nous remontâmes le chemin qui menait jusqu'à nos maisons.

« Tu veux déposer des affaires chez toi ? m'a-t-il proposé.

J'ai acquiescé, et me suis hâtée de traverser le jardin. Sophie était en train de tenter de planter quelques magnolias.

-Dis à papa que je vais faire un exposé chez Edmond. Lançai-je en guise de bonjour.

-Euh... d'accord, fit ma belle-mère un peu interloquée.

-Et pour ta gouverne, tu as de la terre jusque dans les cheveux. Ajoutai-je en repassant dans l'autre sens.

-Ah... merci... »

Me remémorer tous les bons moments passés en compagnie de maman m'avait également rappelée à quel point je trouvais Sophie terne à côté d'elle. Si ça avait été ma mère qui plantait ces magnolias, elle n'aurait pas eu le visage maculé et aurait transformé notre terrain en jardin digne de ce nom !

Je m'apprêtai à franchir la limite qui séparait notre propriété de celle des Dantès quand quelque chose bougea soudain. Je me figeai sur place. Un animal était en train de s'avancer lentement dans ma direction.

Au début, je crus être face à un loup, puis je m'aperçus qu'il s'agissait en réalité d'un chien, de la race des husky. Il n'avait pas l'air agressif mais il ne paraissait pas très amical non plus. Le plus troublant n'était non pas le fait qu'il ait une oreille déchirée, ou qu'il n'ait pas émis le moindre son, mais plutôt ses yeux. Ils avaient l'air incroyablement humain, et, plus étonnant encore, ils étaient vairons, noir et bleu, exactement comme les miens.

« Bonjour... gentil... petit chien... balbutiai-je.

Le husky me cligna des yeux et me lança un regard qui semblait signifier :

« Un petit chien ? »

« Maëlys ! N'aie pas peur, elle ne mord pas !

-C'est une femelle ? demandai-je en me précipitant avec un certain soulagement vers Edmond.

-Oui, elle s'appelle Lupa !

La chienne s'était mise à remuer la queue dès qu'elle avait vu son maître apparaître.

-Viens la caresser... Lupa, donne la pa-patte à Maëlys... S'il te plaît », ajouta-t-il devant l'air impérieux de l'animal.

Après un instant de silence il ajouta :

Le Papillon RougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant