Chapitre 23 : Le contrat.

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J'étais anéantie. Toute énergie m'avait quittée, et j'errais dans la maison comme une âme en peine. Elsa était repartie en internat. Elle n'avait rien dit à mon père à propos de l'enquête que j'avais confié à Agathe, mais je savais qu'elle avait détruit toutes les feuilles. J'avais essayé de les récupérer mais je les avais trouvé réduites à l'état de confettis dans sa corbeille.

« Nous pouvons toujours nous baser sur nos hypothèses. Dit Edmond d'un ton ferme alors que nous étions cette fois chez lui, dans la cuisine. Nous soupçonnons donc fortement notre Brian Josh d'être le Brian Josh du journal de M. Black. Nous le soupçonnons également de rechercher Mme Black. Il a peut-être un tatouage en forme de papillon rouge, c'est sans doute un signe de reconnaissance.

« Il a sans doute fait cette sculpture pour adresser un message funeste à ta mère Maëlys. Elle est sûrement dans les environs, car je doute qu'il vandalise un mur pour le plaisir, s'il veut se faire discret pour la traquer.

-Oui, mais en admettant même que nous ayons raison, je pense qu'elle est déjà partie à l'heure qu'il est. Répondit tristement Agathe.

-Tu crois ? demandai-je, déçue.

-Elle a réussi à disparaître pendant cinq ans sans laisser de trace. Ce doit être une experte en matière de cachette, de traque et de filature. Elle les a certainement déjà repérés, et aura quitté l'Auvergne sans plus tarder !

-Finalement c'est peut-être mieux pour elle, si Brian et ses hommes ont bel et bien de mauvaises intentions à son sujet. »

Je sentis les larmes me monter aux yeux. Je battis précipitamment des paupières.

-Maëlys... dit doucement Edmond.

-Elsa a peut-être raison, il vaudrait mieux qu'elle ne revienne pas, comme ça, nous vivrons tranquillement tous les quatre. Je finirais par m'habituer totalement à la présence de Sophie, papa sera tout à fait remis de son chagrin...

-Je ne pense pas que ce genre de blessure guérisse si facilement. Affirma le jeune homme. Même ta sœur qui semble avoir surmontée la disparition de ta mère doit être en réalité très affectée. Son refus de la voir revenir est sans doute dû à la colère qu'elle ressent envers elle. Ta mère est partie sans donner d'explication. Elsa se sent trahie.

Je suis également persuadé que ton père, qui paraît avoir tiré un trait sur son passé est en vérité toujours aussi perplexe, troublé. Surtout quand on sait qu'ils se connaissaient depuis le lycée. Le lien entre eux était très fort, il doit se demander ce qui a pu le briser. Peut-être même se sent-il coupable. Vous méritez une explication. Et je pense ta mère serait ravie de vous la donner. Si elle est véritablement traquée, elle doit se sentir très seule. Vous devez lui manquer terriblement.

-Et si elle n'était pas du tout partie pour cela, si elle nous avait simplement abandonnés ?

-Alors elle vous doit quand même une explication. Tous les parents doivent un jour s'expliquer envers leurs enfants. » répliqua Edmond.

Et j'eus l'impression qu'il songeait aux siens.

***

Nous entrâmes dans le bar de M. Asmara. Comme nous l'espérions, la bande de Brian Josh était attablée au comptoir. Lorsqu'il nous vit, Brian s'exclama :

« Mais c'est les jeunes de l'autre fois ! Comment allez-vous les enfants ?

-Pas si bien que ça ! répondit Edmond d'un ton fataliste.

-Il veut absolument gagner de l'argent ! grognai-je en levant les yeux au ciel.

-Il doit bien y avoir quelque chose que tu sais faire.

-Bof, je pourrais faire des petits boulots...

-Dans quoi tu es bon ? demanda l'homme d'un ton paternel.

-Je connais bien les plantes, la nature... Je sais également très bien m'orienter dans les forêts alentours.

-Il connaît la région comme sa poche ! affirma Agathe.

L'œil de Brian brilla. Il posa une main sur l'épaule d'Edmond qui se raidit légèrement mais ne se déroba pas.

-Tu sais quoi jeune homme, je vais t'aider. Je te donne rendez-vous demain à dix heures pour que tu nous fasses faire le parcours le long de la Sioule. Je te payerai vingt euros l'aller-retour, cela te conviens ? »

Il aurait pu proposer de le payer cinq centimes, mon ami n'aurait pas hésité. Ils celèrent leur accord par une poignée de main.

« Est-ce que je peux emmener mon amie et ma sœur ? ajouta-t-il.

Brian nous toisa comme s'il pensait que nous allions le retarder.

-Nous apporterons les sandwichs. Dis-je en prenant ma voix de gentille fille un peu cruche et soumise mais bien utile malgré tout.

L'un de ses compagnons lança :

-Prenons-les aussi avec nous. La chasse, ça creuse ! »

Brian Josh sourit et me serra également la main, puis il tapota la tête d'Agathe qui demeura impassible.

« A demain ! » dit-il alors que nous sortions.

Le père de Saba nous jeta un coup d'œil inquiet. Il était certainement moins anxieux que moi.

« La chasse, ça creuse ! » avait dit l'un des rockeurs.

Et si c'était une chasse à l'homme ?

Le Papillon RougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant