Pesanteur : Tome 2

48. Dix millilitres

Je regarde cet acte de décès entre mes mains tremblante. 

Toutes les autres lettres tombent par terre.

J'hésite à l'ouvrir...mais je ne peux pas juste l'ignorer...

Je finis par ouvrir l'enveloppe et en sors une feuille pliée.

Je respire un grand coup avant de l'ouvrir. Je commence à lire avec appréhension :

"Nous avons le regret de vous informer du décès de...."

...

"...de Yun Méniesa".

Ma...ma mère est morte ?

Je relis la phrase encore et encore. Puis je lis la suite. Le document dit juste son heure de décès, notre lien de parenté, le lieu de son décès... "New York » ?

Je ne comprends plus rien.

Je lis encore et encore le papier.

Je...Je me sens partager entre un sentiment de soulagement que ça ne soit pas Elijah et un sentiment de...de tristesse.

Pourquoi...pourquoi... Pourquoi je me sens triste ?

Je...je l'ai toujours détesté et je me suis toujours dit que si elle mourrait je serais le plus heureux des hommes. J'ai déjà souhaité sa mort tant de fois et elle a également souhaité la mienne alors pourquoi je suis triste ?!

Des larmes tombent de mes yeux malgré moi.

Je devrais être heureux que ce papier ne soit pas à propos d'Elijah. Je devrai être heureux qu'elle soit enfin morte ! Pourquoi ça me fait tant de mal ?!

Je ferme les yeux. De nombreux souvenirs d'elle passent. Aucun n'est heureux. Aucun souvenir maternel. Juste des souvenirs d'elle me criant dessus et me frappant.
Au fond, même si je la déteste, elle était quand même ma mère. J'avais...j'avais encore espoir qu'elle finisse par m'aimer un jour. Qu'elle finisse par regretter tout ce qu'elle m'a fait. Qu'elle me prenne dans ses bras en me disant que je n'étais pas une erreur...

Maintenant, c'est fini. Elle est sûrement morte en me maudissant.

La porte de mon immeuble s'ouvre sur ma voisine du dessous. Elle porte de nombreuses toiles blanches sous les bras. Elle me regarde et me dit tendrement :

-Bonj...Keo ? Qu'est-ce qu'il se passe ?

J'essuie mes larmes et dis en sanglotant :

-Ma mère est morte.

Elle pose ses toiles par terre et vient vers moi, inquiète. Elle me donne un mouchoir et me dit :

-Oh je... Je comprends... C'est affreux...

-Non ça ne l'est pas ! Je l'ai toujours détesté !

Elle me regarde, perdue. Je ramasse mon courrier par terre et lui dit :

-Merci de votre inquiétude, mais ça ira.

Je me dirige vers mon appartement en essayant de ne plus pleurer.

J'entre dans mon appartement en jetant toutes les lettres par terre.

Mes mains tremblent toujours. Je me dirige vers mon salon et vois sur la table basse le livre sur la langue de signes. Depuis que je l'ai, je lui ai lu une vingtaine de fois.

Je le prends et le jette à la poubelle.

Ce qu'Elijah m'avait dit... C'était...

"Même après ma mort, je ne t'oublierais jamais"