Chapitre XLIV

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- DRACULA -


" 4 février 19XX


Cher journal,


Cela fait un moment que je n'ai pas couché mes pensées sur papier. Il faut croire que cela arrive de plus en plus fréquemment. Beaucoup de choses se sont passées et j'ai été très occupé dernièrement. Cela fait plus d'un mois maintenant que j'erre dans les environs à la recherche d'un de mes confrères. Cela ne fait aucun doute, le meurtrier du Bal de Noël est un vampire. Mon corps a failli s'arrêter lorsqu'Amé m'a appris qu'il avait récidivé. Ma petite canine me dit qu'il n'est pas prêt de s'arrêter, sauf si je l'attrape. Je ne compte pas sur la police, qui est complètement dépasser par cette affaire. Ils sont à mille lieux de s'imaginer que l'homme qu'il recherche n'est pas humain et qu'il possède quelques facultés. Ces minables, dont le crâne d'œuf, ne le stopperons jamais. Je mourrais de chagrin si Amé était l'une de ses prochaines victimes.


Seulement, plus les jours passent, plus je dois avouer que la tâche s'avère être difficile. Malheureusement, ce vampire est loin d'être un imbécile. Malgré le fait qu'il semble agir de manière impulsive et désordonnée, ce n'est pas le cas. Il est très intelligent. J'avoue ne pas comprendre comment il a pu tuer cette étudiante dans les toilettes sans être repéré. D'après ce que j'ai pu entendre, personne n'a vu un type louche se promener lors du bal. Il semble donc bien se fondre dans la masse. Le loup est entré dans la bergerie déguisé en mouton et il prend un malin plaisir à liquider doucement le troupeau.


Il y a cependant une chose que je n'explique pas et qui reste un mystère pour moi. Le lieu de ses crimes. Pourquoi diable s'embête-t-il à attaquer et vider de leur sang des étudiantes dans cette école ? Cela serait beaucoup plus facile de tuer une personne isolée, dans la rue, en pleine nuit. Mais notre meurtrier, lui, agit dans un endroit rempli de monde et en plein jour. Il faut être fou pour prendre de tels risques ! Il n'agit pas pas instinct, il ne répond pas à sa soif. Il y a une raison, mais je ne l'ai pas encore trouvé.


En plus de ce vampire incontrôlable, une autre personne occupe une grande partie mon esprit depuis maintenant plusieurs mois. Et il s'agit d'Amé, bien sûr. Je n'aurais jamais imaginé la tournure que pouvait et qu'allait prendre notre relation. Bien que j'en mourrais d'envie et que j'en rêvais, jamais je n'aurais imaginé qu'elle puisse me voir autrement qu'un homme un peu étrange et hors du temps. Avec une certaine classe et un charisme indétrônable, bien sûr. J'étais persuadé qu'elle me présenterait un autre loser comme ce Dim...


J'ai cru faire un arrêt cardiaque lorsqu'elle a découvert ce que j'étais. Je savais que je devrais lui en parler un jour ou l'autre, mais je ne pensais pas qu'elle trouverait toute seule et me ferait face. Même si cela n'a pas été facile et que j'ai eu peur de la perde, aujourd'hui, il n'y a plus de secret entre nous. Elle connaît enfin le mien.


Seulement une chose a changé petit à petit depuis que nous nous sommes rapprochés. Mes sentiments. Au fur et à mesure des jours que nous passons ensemble, mon attachement devient de plus en plus fort et une drôle de sensation à commencer à se développer. Difficile à expliquer. C'est la première fois que je suis face à cet étrange phénomène. Lorsque je la vois, ou que je sens son odeur, j'éprouve l'irrésistible besoin de la mordre. La soif de goûter son sang. A chaque fois que mes yeux s'arrêtent sur son cou, je meurs d'envie d'y planter mes crocs. Et je dois luter de toutes mes forces pour ne pas céder à cette nouvelle pulsion. Mes oreilles sont focalisées sur le bruit de sa circulations sanguine dans ses veines. Une merveilleuse symphonie qui amplifie mon appétit.


J'ai bien essayé d'augmenter ma consommation de poche pour pallier au problème, mais cela a été un échec. Cela n'a rien changé à ma soudaine envie de planter mon croc dans le coup d'Amé. Et cette dernière ne me facilite pas la tâche.J'essaye de garder légèrement mes distances, afin de ne pas trop exciter ma soif en contrôlant les contacts physiques. Seulement... C'est très difficile, surtout lorsque la femme que nous aimons est demandeuse...


Jusqu'à quand vais-je tenir sans dérapage ?


Mais je ne suis pas le seul... J'ai bien vu qu'Anne s'affaiblissait de jour en jour et je m'inquiète vraiment pour sa santé. Elle me répète sans cesse de ne pas m'inquiéter, mais je ne peux faire autrement. Sa perte serait tragique pour nous. Aussi bien pour Amé, que pour moi. Elle est l'un des piliers de cette maison.


Dernièrement, un souvenir me revient souvent en tête. Il date d'il y a plus de trente ans maintenant. Nous étions assis dans le salon avec Anne, elle broderait un napperon tandis que je sirotais tranquillement un verre rempli de sang. Elle me l'avait ramener le jour même du boucher. Ce jour-là, je ne sais pas pour qu'elle raison, je lui ai demandé si elle voulait que je la change en vampire. Elle a été aussi surprise que moi par ma question. Je me souviendrais toujours de sa réponse. "Je suis persuadée que quelqu'un d'indispensable vous accompagnera dans votre vie, mais ce n'est pas moi. Je vous soutiendrez et vous aiderez jusqu'à l'arrivée de cette personne. Et je partirais, pour toujours." Elle m'avait chaleureusement souri, tandis que je haussais les épaules. Ce n'était qu'une façade, au fond, j'étais triste. J'aurais aimé garder Anne avec moi, je ne voulais pas qu'elle me laisse, mais c'était son choix. Elle voulait vivre sa vie d'humaine et je le respectais.


J'ai la désagréable impression que lorsque la vie vous apporte quelque chose de bien, elle vous en prends une en retour. J'ai gagné Amé, mais en contre partie, je vais perdre Anne. "


****


Une douce odeur légèrement sucrée arrive à mes narines. Je ferme les yeux et prends une longue inspiration pour rempli mes poumons de doux parfum. Je le connais, je l'ai déjà senti, mais où ? Je veux le goûter ! J'ouvre brusquement les paupières et mon regard se focalise sur ce liquide rouge qui coule doucement. Il m'hypnotise, m'ensorcelle. Je ne peux détourner le regard. Sa couleur rubis est magnifique, aussi attirante pour la vue que pour l'odorat. Je déglutis. J'en ai l'eau à la bouche, je dois goûter ce délicieux nectar.


— Dra ? chuchote une voix qui me semble lointaine.


Je n'arrive pas à bien distinguer la masse devant moi. Elle a l'air petite et fine. Est-ce elle qui a parlé ? Qu'a-t-elle dit ? Mes yeux se focalisent à nouveau sur ce sang qui me crie de le boire. Je sens mes crocs descendre doucement le long de mes canines pour les couvrir. Je déglutis une nouvelle fois.


— Dra, regarde-moi. C'est moi, Amé.


J'avance doucement vers ma proie qui semble reculer au fut et à mesure que j'avance.


— Stop ! ordonne une voix avec peu d'assurance.


A table, le dîner est servi. Je fais un grand pas en avant tandis que la silhouette s'élance dans le couloir, en sens inverse. Oh, ma proie est joueuse, elle essaye de s'enfuir. Je bondis et me lance à la poursuite de cette délicieuse odeur.

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