Chapitre 1: le faux médecin patient.

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Il sonnait à peine treize heures et Raphaëlle baîllait déjà. Il y avait de quoi, avec ce week-end extrêmement chargé.

Entre les consultations spéciales, la conférence du samedi et les inombrables courses du dimanche, elle avait à peine eu le temps de s'assoupir.

Pour se rassurer, elle vérifia qu'il s'agissait bien de son dernier dossier. Quel soulagement...

Elle récupéra son portable et se mit à traîner sur whatsapp. À la seconde, le dernier client de la journée se faufila dans la pièce climatisée. Pour un cabinet privé, Raph' avait pris le soin d'en faire un véritable paradis. Quiconque y entrait ne voudrait plus en sortir.

C'était loin d'être tout beige. Cette couleur unie lui rappelait trop de mauvais souvenirs de l'hôpital de référence du pays. Elle avait opté pour un bleu qui rappelait le ciel ensoleillé. Des meubles de qualité première et ses gadgets professionnels n'étaient pas donnés.

Continuer de manipuler son mobile n'était pas du tout poli alors que le patient était déjà assis. Mais elle avait pour mauvaise habitude de ne pas s'en préoccuper.

- Bonsoir docteur.

Elle s'esclaffa avant de reposer son téléphone. C'était encore l'un de ces bêtes messages de groupe.

- Oui bonsoir, répondit-elle en relevant la tête.

Le sourire scotché à ses lèvres disparaissait alors. La bouche entrouverte, ses yeux allaient et revenaient entre le dossier et le patient.

- Euh... Médecin? S'étonna-t-elle en lisant la profession du jeune homme.

- Vous avez un problème avec les médecins?

Elle referma la chemise et s'adossa.

- Absolument pas. Alors... C'est quoi le souci?

- J'ai mal.

- Ah. Et... Vous avez mal où exactement?

- Aux yeux bien évidemment.

- Ah oui bien sûr. Et...

Elle se redressa pour déposer ses mains sur le burreau.

- Ils sont où vos yeux?

À son tour, le jeune homme adopta la même posture qu'elle, torse avancé, mains entrecroisées.

- Auriez-vous oublié votre anatomie très cher docteur?

- Disons que... Les patients ne savent pas toujours ce dont ils parlent.

- Je vois ça. Eh bien disons que je veux bien vous montrer mes yeux... Mais pas ici.

Un sourire malicieux se dessina dans un coin des lèvres de Raph'. Elle appuya sur l'interphone et interrogea son infirmier-réceptionniste.

- Antoine, c'est bien le dernier patient qui vient d'entrer, n'est-ce pas?

«Oui docteur, c'est le dernier.»

- D'accord. Pouvez-vous passer une minute?

«Tout de suite docteur.»

Elle lissa son long tissage doré vers l'arrière et reprit son mobile. Antoine entra et s'avança vers la table.

- Vous avez fini de ranger?

- Oui docteur, tout est au point. J'attends juste que vous ayez fini avec cette consultation.

- Alors, vous pouvez rentrer, n'est-ce pas?

- Ah docteur, je pensais qu'il fallait attendre la fin des consultations pour...

- Ne vous inquiétez pas pour ça, je m'en chargerai. Vous pouvez disposer.

Antoine demeurait perplexe face à cette demande.

- C'est un ordre Antoine. Disposez.

Il jeta un coup d'œil perdu au patient qui étouffait un rire dans sa paume.

- Antoine?

- J'y vais de ce pas docteur... Bonne soirée.

- Je vous en souhaite autant... Et n'oubliez pas de fermer à clé!

En entendant le double tours dans la serrure, Raph' devinait que son collaborateur avait déjà libéré les lieux. Néanmoins, elle se leva pour vérifier que le hall d'entrée était bien vide.

Elle se retourna alors et s'adossa à la porte.

- Je vous suis, décida-t-elle.

Dr DJENGUÈ Où les histoires vivent. Découvrez maintenant